Quel été ! Après avoir été arrosés trop souvent alors qu'on espérait du soleil, nous voici inondés avant le temps par le déluge habituel d'annonces sur le retour à l'école (qui ont commencé remarquablement tôt, cette année).
Et pourtant, même si les bilans officiels restent à venir, la saison touristique, elle, n'aura pas été vilaine, loin de là.
À Montréal, par exemple, le festival Juste pour rire n'aura jamais vendu autant de billets (plus de 250 000). Les hôteliers, eux, ont largement profité d'Osheaga, devenu un des événements les plus profitables de l'été.
On n'était pas en reste à Québec, où le Festival d'été a fracassé ses records d'assistance (les Rolling Stones aidant), ce qu'étaient également en voie d'accomplir les Fêtes de la Nouvelle-France, aux dernières nouvelles.
En ajoutant un deuxième week-end de compétitions, le Grand Prix de Trois-Rivières a attiré plus de monde. Et on pourrait continuer sur cette lancée et faire le tour du Québec pour se rendre compte que bien des festivités ont été hautement courues et appréciées, malgré des conditions météo souvent déplaisantes.
Les festivals n'ont pas été les seuls à contribuer: l'addition de nouvelles activités ou de nouveaux équipements a aussi aidé. Par exemple, le bateau tout neuf maintenant affecté à la liaison Matane-Baie-Comeau, le F.-A. Gauthier, vient renouveler l'expérience de cette traversée de quelque 60 kilomètres et constitue à lui seul une attraction touristique. Il est carrément impressionnant, ultramoderne, des voyageurs font de longs détours pour se rendre sur place et monter à bord, tandis que le traversier qu'il vient remplacer, le valeureux Camille Marcoux, a pratiquement l'air d'une grosse barque en comparaison.
On pourrait citer d'autres cas où l'offre s'est embellie, mais de toute évidence, la cause principale de cette affluence demeure le dollar canadien... ou ce qu'il en reste.
Il a précisément choisi le mois de juillet pour chuter à des niveaux jamais vus depuis la crise de 2009. Sa valeur a rétréci comme une peau de chagrin: en un an, elle est passée de 0,94 à 0,75 dollar américain ! La dégringolade frôle 20%. Avec un pouvoir d'achat durement touché, pas étonnant que bien des Canadiens aient choisi de demeurer à l'intérieur des frontières. Il suffisait de regarder les plaques des voitures circulant sur les routes du Québec pour constater le phénomène.
En même temps, les étrangers sont venus en plus grand nombre, à commencer par les Américains, attirés par les aubaines créées par la force relative de leur dollar.
On avait observé la tendance dès ce printemps: en mai, 2,3 millions de visiteurs internationaux ont voyagé au Canada, une augmentation de 6,5% par rapport à la même période l'an dernier. Tout indique que la vague s'est poursuivie durant les mois d'été.
Une stratégie à plus long terme
Les compilations définitives viendront un peu plus tard, mais dans les circonstances, alors que l'économie canadienne frôle la récession, cette manne inespérée ne peut faire que du bien... en autant qu'on en tire les bonnes leçons. L'argument du dollar faible ne tiendra pas éternellement. Tôt ou tard, sa valeur va se raffermir, et il serait risqué de miser sur ce facteur forcément aléatoire pour une stratégie à plus long terme.
Un mot sur Montréal, d'abord.
Les festivals s'y suivent en séquences, à tel point qu'ils contribuent à l'identité de la ville, l'été. Un des principaux acteurs de la scène, Gilbert Rozon, y croit fermement, et il pense qu'on pourrait même en rajouter. Depuis 2009, il promène l'idée que la ville devrait suivre l'exemple d'Édimbourg, en Écosse, où des festivals en tous genres se chevauchent pendant trois semaines, en août, attirant des millions de visiteurs. Un festival des festivals, en somme, avec une offre de spectacles pour tous les goûts.
Le projet est séduisant, et pour se concrétiser un jour, il va demander qu'on en change la perception : pour l'instant, quand des événements différents se produisent en même temps, les responsables finissent par se plaindre en invoquant un risque de dilution. Au contraire, il faudrait reconnaître que le nombre et la diversité renforcent l'attraction globale.
De son côté, Québec est maintenant sur la carte mondiale avec la réputation que s'est bâtie son Festival d'été. Les Fêtes de la Nouvelle-France n'ont pas le même statut, mais le leur aura grandi d'année en année. Dans les deux cas, une même explication revient: les organisations ont pris le pari du professionnalisme. On ne dépend plus de la bonne volonté du moment. À cet égard, Daniel Gélinas et son équipe du Festival d'été en sont l'illustration la plus convaincante.
Et c'est la voie que devraient suivre les autres festivals régionaux qui parsèment le paysage du Québec. À défaut d'immenses ressources, on peut quand même tabler sur de réelles compétences, et les établissements québécois forment de plus en plus de diplômés en gestion événementielle. Il est temps de leur ouvrir les portes.
L'été n'aura pas été profitable pour tout le monde, les activités de plein air ayant pâti de la pluie et du temps frais, mais dans l'ensemble, l'industrie a surpris avec de beaux résultats. Il convient maintenant d'imaginer la suite.
Statistique
Pour que vive l'Institut de la statistique du Québec !
Coincé par des restrictions budgétaires, l'Institut de la statistique du Québec (ISQ) envisage de fermer le site Internet lié à sa Banque de données statistiques officielles sur le Québec. Pourquoi est-ce embêtant ? Parce qu'on y retrouve en un clic de souris un portrait précis du Québec et de ses composantes. Des affaires municipales au secteur minier, si vous voulez savoir ce qui se passe, comment évolue le domaine, quelles sont les grandes tendances, l'information est là. Pensez aux questions de démographie, si importantes alors que le Québec s'interroge sur son avenir : la section «Population et démographie» vous donne l'heure juste. Et ce n'est qu'un exemple parmi tant d'autres.