BLOGUE. Décidément, l’écrivain Jean de la Fontaine devait avoir une prémonition de la politique québécoise actuelle quand il a écrit ses mémorables fables, au XVII e siècle. Après « La laitière et le pot au lait », qui s’applique fort bien à la stratégie de Pauline Marois, voilà comment il présentait il y a presque 350 ans les misères de Jean Charest dans « La cigale et la fourmi ».
PLUS : Pauline et le pot au lait
Vous vous en souvenez ?
La cigale ayant chanté tout l’été, se trouva fort dépourvue quand la bise fut venue [...] Elle alla crier famine chez la fourmi sa voisine, lui priant de lui prêter quelques grains pour subsister [...] Mais la fourmi n’est pas prêteuse, c’est là son moindre défaut. Que faisiez-vous au temps chaud ? dit-elle à cette emprunteuse…
C’est stupéfiant. Traduisons : Jean Charest ayant flâné pendant l’essentiel de son mandat, se trouva mal pris à la veille des élections. Il alla demander la faveur des citoyens, les priant de lui prêter les votes nécessaires pour se tirer d’affaire. Mais les électeurs ont la mémoire longue, c’est là une de leurs qualités. « Que faisiez-vous alors que vous deviez avoir les deux mains sur le volant », dirent-ils à cet emprunteur…
La fin de l’histoire, faut-il le rappeler, est triste : la fourmi claque la porte au nez de la cigale en lui suggérant de danser, condamnant l’infortunée à dépérir de faim et de froid à l’approche de l’hiver. Et c’est ce qui risque d’arriver au PLQ que les sondages mettent en troisième place, loin du pouvoir. On évoque même le pire résultat depuis la Confédération.
Pourtant, les bonnes idées n’ont pas manqué, ni les prises de position audacieuses. Du Plan Nord à l’augmentation des frais de scolarité, les libéraux ont proposé une vision tout à fait valable. Mais l’exécution a fait défaut. Pire, ils se sont allègrement enfargé les pieds dans les fleurs du tapis avec la construction, les garderies, le financement partisan… Et le premier ministre, lui, avait souvent l’air désintéressé alors qu’il aurait dû redoubler d’ardeur et de conviction.
Le verdict populaire ne sera pas tendre.
Il reste au PLQ un espoir : dans une version adoucie (pour ne pas faire pleurer les enfants), une dessin animé de Walt Disney montrait la cigale à l’article de la mort être secourue par les fourmis qui la ramenaient dans leur fourmilière pour la réanimer. Une fois réchauffée, elle reprenait son violon pour faire danser toute la troupe…
Mais c’était au cinéma. Dans la vraie vie, les fourmis, pardon, les électeurs, ne seront probablement pas aussi compatissants. On le saura le 4 septembre. Et la bise risque d’être glaciale pour Jean Charest.
PS : Il me reste une fable à trouver, pour François Legault. Je pensais à « La grenouille qui veut se faire aussi grosse que le bœuf ». Il y en a peut-être d’autres qui conviendraient. Si vous avez une idée, allez-y !