Scandale potentiel en Corée du Sud, arrêt de la production de l’avion d’affaires Learjet 85 aux Etats-Unis, rentabilité affaiblie, analystes de plus en plus suspicieux, la compagnie fait face à des vents contraires.
Et localement, on vient d’apprendre avec consternation que la production des nouvelles voitures du métro de Montréal, à l’usine de La Pocatière, allait être suspendue pour six mois (au moins).
Les usagers vont inévitablement en pâtir, eux à qui on promet depuis des lunes le renouvellement des antiques voitures originales du métro qui auront bientôt 50 ans. Les investisseurs aussi : le titre, déjà léthargique, a plongé la semaine dernière sous les 3 dollars. Pour une entreprise qui engrange environ 20 milliards $ de revenus par année, c’est misérable. Les profits ne suivent simplement pas et les analystes s’inquiètent de l'état de ses liquidités.
Les investisseurs à bout de patience peuvent toujours larguer leurs actions. Mais les utilisateurs des produits de Bombardier, eux, n’ont d’autre choix que de vivre avec les hauts et les bas de l’entreprise.
Qu’est-ce qui faut défaut pour les voitures de métro ? Un sérieux retard dans la livraison d’un élément essentiel, le système de contrôle automatisé et de protection des trains. Malgré la présence d’opérateurs à bord, le métro de Montréal est fortement automatisé. Mais on doit s’assurer, par exemple, qu’une rame de ne parte pas d’une station si celle qui la précède se trouve toujours, elle, au quai suivant. C’est entre autres ce qu’assure le système en question.
Or, le sous traitant qui doit le fournir, la firme italienne Ansaldo (filiale d’Alstom) accumule les retards. Déjà, en octobre dernier. Bombardier annonçait un délai de quatre mois du fait des carences de livraison. Le délai atteint maintenant six mois, et on a décidé de suspendre la fabrication des voitures à La Pocatière pour ne pas être enseveli sous des inventaires qu’il faudrait entreposer. Environ 150 employés seront temporairement mis à pied et placés sur une liste de rappel.
C’est le modèle de construction lui-même qui a changé, selon Marc Laforge, directeur des communications et des relations publiques pour Bombardier Transport. « Auparavant, dit-il, on pouvait partir d’une feuille de métal et assumer toute la fabrication. Nous fonctionnons maintenant avec une chaîne d’approvisionnement ». Avec ses avantages et ses inconvénients, aurait-il pu ajouter.
Les usagers du métro seront déçus, puisqu’ils ne pourront voyager dans les nouvelles voitures que vers la fin de 2015… s’il ne survient pas d’autres pépins. Par rapport au scénario original, il s’agirait d’un sérieux report de plus de 18 mois ! Et ce, même si on garantit –pour l’instant- que les livraisons ultimes auront lieu comme prévu en 2018.
La Société des transports de Montréal (STM), elle, doit être carrément mécontente et des pénalités sont prévues en cas de retards dans ce genre de contrat. En plus, on ne signera pas tout de suite les chèques à Bombardier, qui pourrait à son tour exiger réparation de la part d’Ansaldo, qui risque à son tour de demander des comptes à un fournisseur… Bref, des chicanes à prévoir, et comme d’habitude ce sont des avocats qui vont en profiter alors que tout ce beau monde va se poursuivre.
Au moins, chez Bombardier, on a compris que mieux valait faire preuve de transparence dans cette affaire. L’entreprise ne s’est pas toujours distinguée par ses soucis de communication dans d’autres circonstances. Cette fois-ci, c’est Marc Laforge lui-même qui a pris les devants pour expliquer de quoi il en retournait. Tant mieux si on réalise que mieux vaut être proactif, parce que ces jours-ci, Bombardier a beaucoup de gens à rassurer.