Il y a de cela un an, je mettais la dernière touche à mon livre Le Cheval et l'Âne au bureau (TC Média Livres, 2013), un livre qui, grâce à vous, est devenu un best-seller. Tout un challenge, car les idées qu'il véhiculait bousculaient nombre d'a priori sur les moyens d'être à la fois heureux et efficaces au travail.
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Et mon livre : Le Cheval et l'Âne au bureau
Ainsi, j'y démontrais que l'idéal était de fonctionner en cercle, non pas en triangle comme nous le faisons classiquement depuis des décennies. En cercle? En triangle? Une petite explication s'impose…
De nos jours, les triangles sont partout dans notre univers de travail. Sans qu'on le réalise. On les trouve dans la pyramide hiérarchique. On les trouve encore, par exemple, dans les réunions : le leader a tendance à se mettre en bout de table, et les autres à se ranger inconsciemment en forme de triangle par rapport à lui.
L'ennui du triangle, c'est qu'il est composé de pointes et de tensions variables entre celles-ci. Ce qui se traduit par des dysfonctionnements au sein de l'équipe (luttes de pouvoir, jalousies, etc.). Et ce qui nuit, par voie de conséquence, à l'efficacité de celle-ci.
Quelle est la forme géométrique contraire au triangle? Tout simplement le cercle. Là, les tensions sont uniformes, et même harmonieuses. L'efficacité y est maximale.
Appliqué au concept d'équipe, le cercle favorise :
> L'égalité entre les membres de l'équipe. Imaginez-vous tous debout, en cercle. Vous verrez alors les autres autrement, comme des personnes, et non comme des individus ayant un rôle et une fonction au sein de l'entreprise. Pourquoi? Parce que votre regard a dès lors tendance à se porter sur ceux qui vous font face et sur vos voisins immédiats, et non plus sur le boss en bout de table de réunion.
> L'esprit de communauté. En cercle, chacun a la sensation de faire partie d'un tout. Et ce, au même titre que les autres.
> Le partage. En cercle, on se sent plus proche des autres. Physiquement comme psychiquement. Ce qui amène naturellement à vouloir partager avec autrui ce que l'on a de meilleur à lui apporter.
> L'envie de s'impliquer. En cercle, on ressent l'envie de contribuer au succès de l'équipe. On se montre volontaire, y compris pour ceux qui d'habitude préfèrent suivre le mouvement, sans trop s'exposer personnellement.
Dans Le Cheval et l'Âne au bureau, je montrais comment des entreprises pionnières fonctionnaient concrètement en cercle. Comme Gore-Tex (États-Unis), Whole Foods (États-Unis) et Favi (France). Et je soulignais à quel point le succès était phénoménal pour elles, grâce à cette façon originale de travailler en équipe. Un exemple frappant : les magasins de produits naturels et biologiques Whole Foods, qui risquaient de devoir mettre la clé sous la porte tant la concurrence était rude, ont décidé de fonctionner en cercle, dans les années 2000; aujourd'hui, on dénombre quelque 400 magasins employant 60 000 personnes et enregistrant des revenus annuels de 13 milliards de dollars.
Cela a inspiré des entreprises québécoises – dont je ne peux pas divulguer l'identité, bien entendu –, qui m'ont contacté pour en savoir davantage à ce sujet. Toutes avaient un point en commun : leurs managers sentaient que les membres de leurs équipes ne se donnaient pas à 100%, et donc que l'efficacité n'était pas optimale; et ils avaient beau faire, cela ne changeait jamais grand chose.
Et convaincues, elles se sont lancées! Oui, elles ont eu ce cran. Elles ont entamé des opérations pilotes de fonctionnement en cercle. Et d'ores et déjà, les résultats se font sentir. Des résultats franchement intéressants…
Je le vois d'ici, vous aimeriez avoir des détails sur ces opérations pilotes. C'est clair. Mais non, je ne peux rien dire. Néanmoins... Néanmoins… Néanmoins… J'ai un petit bijou à partager avec vous!
Ce bijou va répondre à toutes vos attentes. Et même les dépasser, je pense. Il s'agit d'un vidéo produit par Spotify.
Spotify? C'est une entreprise suédoise spécialisée dans le streaming musical. Le principe est simple : les utilisateurs de son logiciel peuvent écouter les morceaux de musique de leur choix, de manière illimitée et gratuite. Seule contrainte : l'obligation d'écouter de la publicité, de temps à autres. Pour éviter cela, une astuce : devenir un abonné Premium, en payant une certaine somme d'argent tous les mois. Le succès est retentissant : Spotify compte aujourd'hui plus de 10 millions d'abonnés payants dans le monde (à noter que Spotify va bientôt être disponible au Canada).
L'intérêt de ce vidéo-là? Il décrit par le menu la façon dont les employés de Spotify œuvrent tous les jours. Une façon particulière, comme vous l'avez deviné : en cercle!
À ses débuts en 2008, Spotify fonctionnait suivant la méthode Scrum. Une méthode réputée agile, que l'on peut résumer comme suit :
> Transparence. La communication se doit d'être transparente entre tous, en particulier entre le manager et les membres de son équipe.
> Vérification. À intervalles réguliers, on vérifie l'avancement des travaux de l'équipe. Au besoin, on corrige le tir.
> Adaptation. Le manager et son équipe recourt à différentes techniques pour s'adapter à chaque difficulté rencontrée. Comme la "réunion de planification d'avant-sprint", la "mêlée quotidienne" et la "revue de sprint".
Le hic? Ça ne fonctionnait pas bien. La mayonnaise ne prenait pas avec les employés de Spotify. Si bien que la direction s'est dit que «les règles, ça a du bon, jusqu'au moment où il devient nécessaire de les enfreindre». Autrement dit, Spotify a pris la décision d'inventer son propre type de management.
Résultat? Le vidéo l'explique clairement, et je vous invite fortement à le regarder dans son intégralité. Mais pour les pressés, voici de quoi les mettre en appétit…
> Fini l'équipe, place à l'escouade. Chez Spotify, on ne fonctionne plus en équipes, mais en escouades. La nuance? Une escouade est :
– Petite : elle est composée au maximum de 8 personnes.
– Responsable : elle est tenue responsable de l'atteinte de la mission qui lui est confiée.
– Libre : elle décide elle-même de la solution à apporter aux problèmes rencontrés en chemin.
– Bienveillante : elle vient en aide à toute autre escouade qui a besoin de ses lumières.
> Nouveaux rôles. Chez Spotify, le leader n'est pas à proprement parler un leader :
– "Leader" : le "leader" a pour rôle d'expliciter aux membres de l'escouade le problème à résoudre, un problème identifié et adopté par l'ensemble des membres de l'escouade. Puis, il doit se mettre au service des autres pour leur permettre d'atteindre l'objectif fixé d'un commun accord. Et c'est tout. On ne devrait donc plus l'appeler "leader", mais plutôt "catalyseur".
– Le membre de l'escouade : le rôle de chaque membre de l'escouade est, lui, de collaborer avec les autres afin de trouver la meilleur solution au problème à résoudre.
> L'autonomie avant tout. Chez Spotify, l'autonomie est ce qui fait la force de l'escouade. Car cela lui permet d'être :
– Motivée : quand on est autonome, on prend soi-même les décisions qui nous concernent. Cela peut certes effrayer, au départ, mais assez vite on y prend goût. C'est qu'être maître de son destin est un moteur puissant de la motivation.
– Rapide : quand on est autonome, on n'a pas besoin de consulter pléthore de bosses pour prendre une décision. On la prend soi-même, et on fonce. C'est tout.
> Repères. Chez Spotify, on l'a compris, chaque escouade a une mission à remplir. Pour s'assurer que les membres de l'escouade s'y attachent bien, il leur est demandé deux choses :
– Stratégie : lorsqu'ils décident ensemble d'une mission, ils doivent veiller à ce qu'elle corresponde à la stratégie globale de l'entreprise.
– Tactique : ils doivent veiller à ce qu'ils progressent de manière continue vers l'objectif fixé, si bien qu'ils doivent déterminer des micro-objectifs et s'assurer de les atteindre, tous les trimestres.
«On peut voir une escouade comme un musicien jouant dans un groupe de jazz. Chacun joue à merveille de son instrument, avec en tête le souci de jouer en harmonie avec les autres et l'envie d'interpréter ensemble le morceau à la perfection. Quand les musiciens sont excellents, le résultat est fabuleux, surtout lorsqu'il convient d'improviser», résume Henrik Kniberg, consultant en management et réalisateur du vidéo.
Voilà. Peut-être ai-je réussi à insinuer en vous la graine du changement. Celle qui vous amènera, un beau jour – qui sait? –, à fonctionner en cercle.
En passant, le philosophe britannique Francis Bacon disait : «Il est plus sage de changer beaucoup de choses qu'une seule».
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