Le sujet des impôts progressifs est souvent utilisé par les politiciens et les gens du milieu académique pour décrier les inégalités sociales. En prenant des chiffres qui semblent comparables en apparence, on arrive facilement à façonner l'opinion publique afin de lui donner une direction bien précise.
L'argument populaire réside dans les taux d'impôts prélevés sur les revenus bruts des salaires et des investissements. On critique le taux moins élevé prélevé sur les gains de placement et dividendes, comparativement aux salaires. Dès le départ, on ne prend en compte qu'une partie de l'impôt du côté des investissements. En effet, les sociétés, qu'elles soient en Bourse ou détenues au privé, paient un certain impôt avant la distribution finale.
Ceux qui critiquent les inégalités des taux vont même jusqu'à comparer uniquement les taux de sociétés avec les taux des salariés. Or, lorsqu'une société est taxée, on prélève un premier impôt. Ensuite, dans le cas d'une société à capital fermé, l'actionnaire peut soit se verser un salaire, et ainsi payer le même impôt que n'importe qui. Dans ce cas, le salaire devient déductible dans la société, et annule le premier impôt qui aurait été autrement versé.
La deuxième possibilité réside dans le versement d'un dividende, ou dans l'apparition de gains en capital. Dans les deux cas, un deuxième impôt est prélevé. Lorsque l'on combine les deux impôts ensembles, nous obtenons des taux passablement plus élevés. La comparaison devient alors plus juste. Par conséquent, il serait irrationnel d'imposer une société aussi fortement qu'un individu, à moins que le dividende ou le gain en capital ne soit totalement exempt d'impôts.
Une comparaison injusteVoilà le problème. On prend un revenu taxé une fois, pour le mettre en évidence contre un revenu qui est taxé deux fois. On garde bien sûr sous silence l'une des deux impositions. Parfois, on prend les revenus de sociétés, d'autres fois, les revenus de dividendes ou de gains en capital. Un exemple pertinent? Pensez à toute l'attention que l'on porte aux impôts payés par les banques canadiennes. On réfère souvent aux banques comme si elles étaient des humains, payant un certain impôt, pour ensuite dépenser et jouir de la vie.
On devrait se demander qui sont les véritables propriétaires des banques? Non, ce ne sont pas les banques elles-mêmes, car elles ne respirent pas et ne possèdent point de corps physiques. En moyenne, la Banque Royale (Tor., RY) a payé plus de 23% d'impôts sur les dix dernières années. Des 77% de profits restants, près de la moitié sont versés en dividendes, alors que l'autre moitié contribue à la hausse du titre en Bourse à long terme.
Les dividendes sont versés, entre autres, à ceux qui détiennent fonds de pensions, des REER ou des CELI. Ces derniers ne paient aucun impôt, puisque celui-ci est repoussé à très long terme, jusqu'au moment où le taux d'imposition sera normalement bien plus bas. En effet, sans fonds de pension et REER, chaque dollar de dividendes ou de gains en capital serait soumis à l'impôt marginal, étant donné que ce dollar serait en sus du salaire gagné.
Qu'en est-il des riches?
Pour les mieux nantis, dont les régimes enregistrés ne constituent souvent qu'une petite partie de leurs avoirs, un deuxième impôt doit être versé, en plus de celui payé par la Banque Royale. Soulignons que certaines banques paient moins d'impôts, comme c'est le cas de la Banque TD (Tor., TD), dont le taux moyen sur 10 ans atteint environ 17%. Toutefois, ce sont les fonds de pensions, les institutions et les portefeuilles des gens de la classe moyenne qui en bénéficient le plus. Un taux de taxation plus élevé forcerait une baisse des dividendes ou une réduction des gains à l'abri de l'impôt.
Finalement, après avoir épuisé leurs arguments, les critiques seront tentés d'ajouter que les mieux nantis n'ont pas besoin de tout l'argent dont il dispose après avoir payé leurs impôts. Autrement dit, il leur en resterait trop dans les poches. Nous pourrions aller très loin dans cette direction. En suivant ce raisonnement, un joueur de hockey gagnant 8 millions de dollars par année devrait payer 99% d'impôts afin qu'il ne lui reste que 80 000$ à dépenser. Ainsi, son salaire net demeurerait comparable à celui de la classe moyenne...