La saine gouvernance est surtout une affaire d'éthique et de déontologie. Il y a en effet les valeurs qui en constituent la fondation et un ensemble de règles qui fixent le cadre de gestion, assurent le bon fonctionnement des instances concernées et permettent la mise en place de bonnes pratiques.
Toutefois, au-delà de l'éthique et de la déontologie, il y a aussi le savoir-être, qui est la capacité d'une personne de respecter ses interlocuteurs, de s'ajuster à différentes situations et de s'adapter aux cultures propres aux organisations dans ou avec lesquelles elle interagit. Cette disposition est difficile pour les narcissiques, et peut les conduire à des dérapages.
Ne souffrant d'aucun complexe et communicateur habile, le ministre de la Santé et des Services sociaux, Gaétan Barrette, a tenté à tort d'imposer la nomination du Dr Patrick Harris à la direction du Département de chirurgie du Centre hospitalier de l'Université de Montréal (CHUM), malgré l'opinion contraire unanime du Dr Jacques Turgeon, directeur général de l'établissement, de son conseil d'administration (CA) et des neuf membres du comité de sélection du futur directeur de ce service. C'était inacceptable et injustifiable.
La crise que vient de traverser le CHUM a été créée par la maladresse du ministre Barrette, qui n'avait pas le droit de s'immiscer dans cette nomination. Selon la Loi 10 sur l'organisation et la gouvernance du réseau de la santé et des services sociaux qu'il a lui-même fait adopter, les pouvoirs du ministre se limitent à nommer les membres du CA, le directeur général des centres intégrés de santé et de services sociaux (CISSS) et des centres intégrés universitaires de santé et de services sociaux (CIUSSS), comme le CHUM.
La bonne gouvernance d'une organisation repose sur le respect des rôles et des responsabilités des différentes instances. Dans le secteur de la santé, le rôle du ministre est de conseiller le gouvernement sur les orientations et les politiques à mettre en place en matière de santé, et de s'assurer que celles-ci sont mises en oeuvre.
Le ministre exerce les pouvoirs que lui confère la loi. Il ne doit pas intervenir dans la gestion des hôpitaux à moins d'une crise majeure ou d'une incapacité des exécutants à réaliser leur mission et à atteindre les objectifs déterminés par le CA. Son interlocuteur est le président du CA. Quant à ce dernier, il doit s'assurer que la direction générale s'acquitte des responsabilités qui lui sont confiées et qu'elle exécute les tâches nécessaires à la bonne gestion de l'organisation. Elle fait sa reddition de compte au CA.
Pas de crise au CHUM
Il n'y avait pas de crise au CHUM. Il y en avait eu une sous la direction de Christian Paire. Le CA avait alors demandé de l'aide au gouvernement pour gérer l'institution. Deux accompagnateurs avaient été nommés, et Michel Fontaine (actuellement sous-ministre de la Santé et des Services sociaux) avait été désigné directeur général par intérim. La haute direction avait été allégée et renouvelée. De nouveaux administrateurs et un nouveau directeur général, Jacques Turgeon, avaient été nommés.
À part la crisette survenue au Département de chirurgie, les choses allaient bien au CHUM. Les troupes étaient davantage mobilisées, et malgré des réductions budgétaires d'au moins 20 millions de dollars, le projet de construction du nouvel hôpital avait rattrapé son retard et se réalisait selon le budget prévu. La direction planifiait le déménagement, ce qui n'était pas une simple tâche. Le comité de sélection du futur directeur du Département de chirurgie poursuivait son travail.
Si, comme il se doit, le ministre Barrette avait respecté le CA et le directeur de l'hôpital et mis son ego de côté, il aurait renommé le Dr Turgeon sans chercher à profiter de l'occasion pour imposer la reconduction de tous les directeurs de Département (une façon de protéger le poste du Dr Harris, un ami de M. Barrette).
Un oeil au beurre noir
Le premier ministre Couillard n'a pas pris à la légère les démissions de plusieurs administrateurs, dont celle de Jean-Claude Deschênes, ex-haut fonctionnaire réputé, et de Michel Gervais, ex-recteur de l'Université Laval, qui ont tous deux été directeurs de centres hospitaliers.
Il faut se réjouir du retour du Dr Turgeon à la direction générale du CHUM, comme l'avaient souhaité de nombreux gestionnaires de l'hôpital, plusieurs intervenants du domaine de la santé, le premier ministre et le ministre de la Santé lui-même.
Ce dernier s'en sort avec un oeil au beurre noir, promettant «le respect intégral du processus de nomination des chefs de département, qui relève de l'administration interne».
Ce dénouement est heureux pour le CHUM et pour le gouvernement, qui n'avait pas besoin d'une autre démission après celle récente du ministre Yves Bolduc, à l'Éducation. Il l'est aussi pour les autres CISSS et CIUSSS, qui craindront moins l'interventionnisme intempestif du boss de la santé dans leurs affaires internes.
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