C'était le 16 octobre 1945. Ce jour-là, il régnait toute une effervescence au centre-ville de Montréal. Plus de 300 représentants de l'industrie aérienne provenant d'une cinquantaine de pays convergeaient vers l'Hôtel Windsor pour assister à un événement hors du commun : la toute première assemblée générale de l'International Air Transport Association (IATA), une association créée pour représenter les intérêts des compagnies aériennes. Le rendez-vous qui se tenait au lendemain de la Seconde Guerre mondiale était historique. Le Windsor l'avait bien compris. La veille de l'événement, l'hôtel s'est offert une publicité pour saluer ses invités du bout du monde et souligner toute sa fierté de les recevoir à Montréal. «Dans les coulisses de Windsor s'écrit l'histoire aéronautique. On y pose les fondations de "la liberté des airs"«, pouvait-on lire dans l'encart publié le 15 octobre 1945 dans The Gazette.
Montréal pouvait être fière. À la tête de cette organisation internationale, siégeait au poste de président un Canadien du nom de Herbert J. Symington. Si ce nom ne vous dit rien aujourd'hui, sachez que M. Symington était loin d'être un illustre inconnu au siècle dernier. De 1937 à 1947, soit pendant 10 ans, cet homme a dirigé Trans-Canada Airlines, l'ancêtre d'Air Canada. Cet homme a également participé activement à la création en 1944 de l'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI). Aujourd'hui, l'IATA et l'OACI ont toutes deux leur siège social à Montréal. D'autres institutions sont venues se greffer par la suite, comme l'Airports Council International (ACI).
Malheureusement, l'impact économique de ces organismes passe souvent inaperçu. En fait, et c'est malheureux, il aura fallu une crise pour se rappeler de leurs poids. En 2013, Montréal a failli perdre le siège social de l'OACI au profit du Qatar qui était prêt à dérouler le tapis rouge à l'organisme onusien pour qu'il déménage ses pénates au Moyen-Orient. Après un branle-bas de combat diplomatique, Ottawa a réussi à conserver le fameux siège social à Montréal (jusqu'en 2036). Cette tentative de ravir le siège social de l'OACI s'inscrit dans la volonté du Moyen-Orient d'en mener plus large dans le ciel aérien, comme le raconte notre manchette. Financièrement, il ne sera peut-être pas toujours possible de concurrencer certaines villes ou certains pays. Mais, tout comme le Windsor le soulignait en 1945, faisons au moins honneur à ces organismes qui continuent de poser des jalons importants dans l'histoire aéronautique et attirent chez nous de nombreux délégués internationaux. Quand une réunion est callée, ça fait du monde en ville.
Géraldine Martin
Éditrice adjointe et rédactrice en chef,
Groupe Les Affaires
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