Le titre de Twitter gazouille-t-il trop?
La question nous est venue en matinée, alors qu'au lendemain de résultats supérieurs aux attentes, l'action du réseau social s'est envolée de plus de 20%.
Quel est le déclencheur de cette envolée?
Une adhésion d'usagers supérieure à ce qui était attendu (et probablement aussi pas mal de couverture de ventes à découvert…).
Officiellement le marché attendait autour de 14 millions de nouveaux abonnés, mais plusieurs jugeaient ce chiffre optimiste et chuchotaient que l'ajout pourrait plutôt se trouver entre 8 et 12 millions.
Il en est finalement venu 16 millions.
De quoi relever l'optimisme.
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Faut-il pour autant se dépêcher d'acheter le titre?
Non.
Comment évaluer l'action
Ce qui est difficile avec les sociétés affichant de fortes croissances, c'est d'évaluer si on l'on paie trop cher les bénéfices futurs.
Une société qui se négocie à 12 fois le BAIIA (bénéfice avant intérêts, impôts et amortissement) à venir est généralement considérée comme fort bien payée. C'est que l'on attend une bonne croissance du bénéfice dans l'avenir.
Dans le cas de Twitter, le titre se négocie aujourd'hui à plus de 130 fois le bénéfice 2014. C'est énorme. Mais son bénéfice fait aussi des pas de géant. À la fin de l'année, il devrait être le triple de celui de 2013.
Comment juger de ce qui est raisonnable?
En se projetant un peu plus loin dans le temps, et tentant de voir si les hypothèses nous conduisant à cette destination sont raisonnables.
On a arbitrairement retenu l'exercice 2017, soit dans trois ans. Il s'agit de voir à quel multiple sera à ce moment le titre s'il ne bouge pas et demeure à 47$.
Si le scénario de croissance des bénéfices que l'on retient nous indique qu'en 2017 le titre serait à 12 fois le BAIIA, le titre est un achat évident. La croissance à venir au-delà de 2017 sera en effet à tout le moins comparable aux fortes croissances anticipées pour des titres plus traditionnels.
À 20 fois, ça pourrait être intéressant, mais ça devient moins évident.
À 30 fois et plus, on oublie cela et on pense à la vente à découvert.
Quel scénario retenir?
Quel scénario retenir?
Voilà qui est difficile.
L'écart entre les prévisions de croissance de notre univers d'analystes nous a fait sursauter.
Sur l'année 2016 par exemple, voici les BAIIA anticipés par trois maisons:
-FBN Securities: 778 M$ US;
-Deutsche Bank: 910 M$ US;
-Cantor Fitzgerald: 1,2 G$ US.
Qui a le scénario le plus raisonnable?
Cantor voit s'ajouter 126 millions de nouveaux usagers sur la période, alors que FBN en voit 139 millions. Pourtant, l'anticipation de bénéfice de Cantor est de 1,5 fois supérieure à celle de FBN.
L'écart réside dans ce qu'on appelle la monétisation, ou, si l'on préfère, la capacité de Twitter à multiplier ses revenus publicitaires. FBN est simplement moins optimiste que Cantor du côté des revenus publicitaires.
On a de toute façon décidé de larguer les deux scénarios. Simplement parce qu'ils postulent un ajout de 60-70 millions d'usagers par année pour les prochains exercices.
Ça semble trop considérable. Depuis 2013, le nombre d'usagers de Twitter a en moyenne augmenté de 14 millions par trimestre, ou 56 millions par année. Il était jusqu'à maintenant plus facile de gagner des usagers. La vitesse de pénétration devrait ralentir. Il est vrai qu'avec 16 millions d'ajouts au dernier trimestre, on roule sur une tendance de 64 millions, mais le dernier trimestre comptait la Coupe du monde de soccer. La performance devrait être nettement moindre dans les mois à venir.
Le scénario de la Deutsche Bank, pendant ce temps, table sur une croissance à venir de 40 millions d'usagers par année. C'est plus raisonnable.
À quel multiple arrive-t-on en conservant le cours actuel de Twitter (47$) et utilisant le BAIIA 2017 projeté de la firme?
À un peu plus de 23 fois le BAIIA.
C'est très au-dessus du signal clair d'achat de 12 fois dont on parlait plus haut, et également au-dessus du 20 fois où l'on devenait plus hésitant.
Le titre semble effectivement gazouiller trop fort.
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