BLOGUE. TORONTO- Ce n'est pas exactement à une assemblée annuelle démontée à laquelle a dû faire face le conseil d'administration de SNC-Lavalin, jeudi. En moins d'une heure, tout était réglé. Sans vraiment que le ton ait monté ou qu'il y ait eu quelque contestation.
Un seul événement émotif a en fait ponctué la rencontre. Une actionnaire, amie de Cynthia Vanier, a demandé à la direction de lui venir en aide. Madame Vanier est actuellement détenue au Mexique parce qu'elle aurait tenté de faire entrer illégalement au pays l'un des fils de Mouammar Kadhafi. "Elle est la mère de deux enfants et n'a pas d'argent", est venue raconter avec émotion l'actionnaire.
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Le président du conseil, Gwyn Morgan, a dit compatir, mais que l'entreprise ne pouvait aider. Quelques autres questions ont suivi, mais jamais personne n'a été véritablement inquiété.
Peu de neuf
Avec les journalistes, la joute a été plus difficile pour monsieur Morgan et le chef de la direction par intérim, Ian Bourne.
Ce que l'on a appris?
Peu de nouvelles choses, malgré nombre d'essais.
Au moins sait-on maintenant que le conseil d'administration a pensé à contester l'indemnité de départ de Pierre Duhaime, son ancien PDG, qui a approuvé les paiements inexpliqués de 56 M$.
Pourquoi monsieur Duhaime a-t-il approuvé ces paiements?
Ça, on ne le sait toujours pas et le conseil n'a pas l'intention d'en dire davantage. La chose a été réglée dans le meilleur intérêt de la société, se borne-t-on à dire.
Il est difficile de porter un jugement sur le comportement des administrateurs. Il est possible que la présence de monsieur Duhaime, qui est toujours à l'emploi jusqu'au 27 juin, ait été nécessaire pour la suite des choses. Il est aussi possible que les preuves d'une mauvaise conduite aient été rares ou inexistantes. Et il est probable que le silence actuel des parties provient de l'entente finalement négociée entre elles et vise à ne pas jeter plus de doutes encore sur les façons de faire de l'entreprise.
En revanche, ce silence est aussi malheureusement susceptible d'entretenir les soupçons à l'endroit du conseil. Ses membres avaient-ils une connaissance de certaines façons de faire, connaissance qui aurait pu avoir d'importantes conséquences pour eux si, se voyant de toute façon perdu, monsieur Duhaime s'était mis à parler?
Disons-le, les administrateurs nous semblent personnellement de bonne foi.
L'aveu candide de Ian Bourne aux analystes en après-midi qu'il s'attend à ce que d'autres révélations surviennent lors d'enquêtes dans d'autres juridictions, est de nature à laisser voir qu'il ne craint pas pour sa probité.
Autre signe: l'arrivée au conseil de Eric Siegel, ancien président de Exportation et développement Canada. Après les rebondissements des dernières semaines, si l'on croit que des loups sont à la table, on n'ira certainement pas se mettre dans leur gueule.
(ST)La suite des choses, quelle sera-t-elle?
Ça dépendra effectivement de ce que trouvera la police dans les prochains mois.
En Suisse, l'étau se resserre sur Riadh Ben Aïssa, l'acteur central de toute l'affaire, par qui sont passés les paiements inexpliqués de 56 M$. Il y est maintenant incarcéré.
De là devraient provenir des éclaircissements plus concrets.
Si le conseil n'est pas atteint, aussi curieux que la chose puisse paraître, de nouvelles révélations pourraient être bénéfiques à l'entreprise. Le défi est de les accompagner d'une réaction énergique.
Alors que la rumeur mondiale donne souvent le secteur de l'ingénierie comme sensible à la corruption, de suspecte, SNC deviendrait alors modèle de réforme.
La carte du délinquant repenti n'est pas sans pouvoir commercial.