L'affaire a fait couler beaucoup d'encre. Faut-il laisser TransCanada installer un terminal pétrolier à Cacouna, dans le Bas-Saint-Laurent, afin de favoriser l'exportation du pétrole de l'Ouest ?
Le site Internet de TransCanada prévoit que le futur terminal devrait pouvoir accueillir des navires-citernes de 900 pieds de long. En langage maritime, il s'agit de Suezmax (en référence à la longueur maximale autorisée sur le fameux canal). La capacité des pétroliers est d'environ 1 million de barils. Ils n'appartiennent pas à la catégorie des plus imposants bateaux du monde, mais plutôt à celle de taille moyenne (entre les Very Large Crude Carriers, de 2 millions de barils, et les Aframax, qui transportent 0,5 million de barils).
TransCanada indique que les installations devraient accueillir de deux à quatre pétroliers chaque semaine.
À chacun ses conclusions sur la position à adopter dans le dossier, mais l'idée nous est venue de jeter un coup d'oeil sur le potentiel du transport maritime pétrolier. La démarche nous a mis sous les yeux une intéressante étude de la Deutsche Bank, dont la conclusion est surprenante.D'abord, le marché pétrolier
La première chose à examiner est ce que fera la demande de pétrole dans le monde.
Depuis 2005, celle-ci a grimpé à un rythme moyen annuel de 1 %.
L'analyste Amit Mehrotra s'attend à une croissance de la demande en pétrole de 1,1 % cette année, de 1,2 % en 2015 et de 1,4 % en 2016.
Ces données, qui n'ont rien d'extraordinaire, cachent un phénomène. Cette année devrait être la première dans l'histoire où la consommation de pétrole sera plus élevée dans les pays en développement que dans les pays développés. En d'autres termes, il n'y aura pas de croissance dans les pays de l'OCDE, mais il y en aura dans les pays émergents, particulièrement en Asie.
Ce fait vaut la peine d'être mis en exergue pour ce qui suit. Il n'y a pas que le volume de pétrole transporté qui compte dans l'industrie, mais aussi la distance sur laquelle il est transporté. On devrait normalement livrer plus de pétrole des régions productrices vers l'Asie. Il s'agit non seulement d'une hausse de volume, mais aussi de parcours plus longs. Les prix étant fixés par journée de transport, il y a un effet de levier.
Oui, mais, avec le pétrole de schiste, les Américains importeront moins de volume, dira-t-on. Vrai, mais l'analyste estime que les exportations de l'Afrique de l'Ouest qui comblent principalement les besoins des États-Unis devraient trouver preneurs sur des destinations plus éloignées en Asie. Ce qui, encore une fois, allongera les distances de transport.
Plus de pétrole à être transporté, donc, sur des distances plus longues.La relation entre l'offre et la demande penche du côté des bateaux
Pour que le secteur reste intéressant cependant, il ne doit pas y avoir trop de bateaux qui s'ajoutent, car cela aurait pour effet de diviser la tarte.
L'historique n'est pas formidable de ce côté. Le nombre de navires de transport a en moyenne augmenté de 3,4 % par année de 1999 à 2013 (+ 3,7 % en capacité), et ce, malgré l'obligation de retirer les bateaux à simple coque pour 2010. L'offre a en fait grimpé plus vite que la demande.
La Deutsche Bank prévoit que l'offre de transport, en termes de capacité, augmentera de 1,8 % cette année, de 1,3 % en 2015 et de 3,4 % en 2016.
Constat ?
D'ici à 2016, l'offre devrait de nouveau grimper plus vite que la demande.
Les carottes sont cuites, rien ne fonctionne plus ? Pas tout à fait.
On l'a vu précédemment, il devrait se parcourir plus de distance, ce qui veut dire que les navires seront en service pour des périodes plus longues.
Il y aura plus de monde pour transporter le pétrole, mais personne ne manquera de travail, parce qu'il faudra le transporter plus longtemps et qu'on sera rémunéré sur un plus grand nombre de jours. En fait, le taux d'utilisation des navires (en capacité) devrait grimper.
On prévoit que ce taux passera de 82,3 % en 2013, à 84,3 % en 2014, puis à 84,8 % en 2015 et à 85,4 % en 2016.Qu'est-ce à dire sur le prix du transport ?
Le prix du transport par pétrolier a en moyenne été de 36 000 $ US par jour depuis 1995 (prix moyen réparti sur les trois catégories de bateaux et pondéré). À 13 500 $ US par jour, le prix est actuellement fort faible, alors que le taux d'utilisation est à son plus bas des dernières années (82,3 %).
Étant donné la hausse prévue du taux d'utilisation en 2015 et en 2016, la Deutsche Bank voit le prix se redresser significativement et passer à plus de 20 000 $ US par jour. C'est un formidable bond de 50 %, qui devrait donner un élan significatif au secteur.
Qui jouer ?
Si on croit à l'équation, et elle comprend beaucoup de facteurs d'incertitude, les titres de Teekay Tankers (NY, TNK, 3,57 $ US), Navios Maritime Acquisition (NY, NNA, 2,74 $ US) et Capital Product Partners (Nasdaq, CPLP, 9,91 $ US) ont des cibles respectives de 7 $ US, 5,50 $ US et 15 $ US.
Sur le radar
Navios Maritime Acquisition (NNA, 2,74 $ US)
Les recommandations des analystes qui suivent le titre de Navios
1 Conserver
4 Acheter
5 Surperformance
Cours cible : 5,10 $ US
Source : Bloomberg