Habituellement, cette chronique est consacrée à la recherche de titres qui sont sous-évalués. De temps à autre un de ces titres croise notre chemin, mais souvent le constat est le suivant : trop cher et trop risqué.
S'il en est ainsi, peut-être serait-il plus intéressant d'inverser la logique et de miser sur leur baisse, se disait-on depuis quelque temps.
Pas facile non plus. Un titre trop cher peut vous infliger une lourde perte lorsque joué à la hausse si les attentes ne sont pas au rendez-vous. De même, un pari à la baisse peut aussi jouer un fort mauvais tour si les attentes sont nettement dépassées.
Quand même, on s'est lancé à la recherche de ce qui pourrait être un titre intéressant sur lequel parier à la baisse.
Le hasard nous a mené à une recommandation de Short Ideas, une lettre financière qui se spécialise dans la vente à découvert. Sa cible actuelle : le détaillant Best Buy (BBY, 35,14 $ US).
Les résultats du quatrième trimestre de l'entreprise, qui doivent être publiés dans quelques semaines, devraient être assez forts. Mais ce sera le dernier bon trimestre, croit-elle.
Le raisonnement va ainsi.
Au cours des 19 derniers trimestres, cinq fois seulement Best Buy a dévoilé des ventes de magasins comparables positives. Chaque fois, ces périodes coïncidaient avec de fortes ventes de téléphones intelligents.
Cela n'a rien de surprenant. Aux États-Unis, d'où provient la majorité du chiffre d'affaires de l'entreprise, 50 % des ventes sont liées aux ordinateurs et aux téléphones intelligents.
Les résultats du quatrième trimestre devraient être intéressants. Apple a dévoilé il y a quelques jours des expéditions de 74,5 millions d'iPhone, une hausse de plus de 45 % par rapport à l'an dernier.
La question est davantage de savoir ce qui se produira ensuite.
Short Ideas soutient que les ventes d'iPhone ont généralement tendance à être très bonnes durant la période des fêtes, mais à ralentir par la suite, de janvier à août.
Elle note également que la loi des grands nombres commence à rattraper la compagnie, alors que la croissance des volumes diminue en pourcentage.
Pendant ce temps, peu d'aide semble disponible du côté de Samsung, le principal concurrent d'Apple. À son quatrième trimestre, sa part de marché est tombée à 19,6 %, alors qu'elle était à 32,8 % un an plus tôt (la part d'Apple est à peu près au même niveau). Il y a dans cette chute une migration vers des appareils de plus bas de gamme (ce qui aide beaucoup moins les ventes de Best Buy), mais il semble aussi y avoir des gains des nouveaux iPhone sur les appareils Android. Cela veut dire que les résultats exceptionnels d'Apple à son dernier trimestre ne signifient pas des résultats aussi exceptionnels à venir pour le détaillant.
Le marché de la tablette pourrait théoriquement procurer un certain secours. Selon IDC, les ventes ont augmenté de 11,5 % au troisième trimestre, pour atteindre 53,8 millions d'appareils dans le monde. La difficulté est cependant que la croissance vient de tablettes peu coûteuses (autour de 100 $ US) qui ne peuvent pas tellement augmenter les ventes. Le nombre de tablettes expédiées par Apple a d'ailleurs reculé dernièrement.
Reste l'arrivée des nouvelles télés 4K. Peut-être seront-elles en mesure de donner un coup de main. Après tout, elles se vendent à plus haut prix et il semble y avoir un certain engouement. Encore ici, Short Ideas n'y croit cependant guère, en soulignant que toutes n'acceptent pas les contenus de Netflix et d'Amazon, que le consommateur a souvent besoin d'une capacité Internet supplémentaire et que la différence avec les écrans de moins de 40 pouces n'est pas perceptible.
Espoir de gain sur la descente de l'action ?
Autour de 20 %, estime la lettre financière.
Faut-il tenter le coup ?
Hum ! on le disait plus haut, il est au final tout aussi difficile de jouer un titre à la hausse qu'à la baisse.
Publié avant les derniers résultats d'Apple, le commentaire reconnaît que des expéditions supérieures à 70 millions d'iPhone sont susceptibles de mettre sa recommandation plus à risque, en ce que les ventes de téléphones intelligents (et conséquemment des magasins comparables de Best Buy) pourraient être plus importantes que prévu dans les trimestres suivants. À 74,5 millions, elles sont effectivement significativement supérieures.
Il y a aussi le fait qu'il n'y a pas que les ventes à examiner, mais également les coûts. Dans six de ses sept derniers trimestres, Best Buy a réussi à augmenter ses marges, même lorsque ses ventes de magasins comparables baissaient.
Il est enfin vrai qu'à 14 fois le bénéfice anticipé l'an prochain, le titre n'est pas une aubaine, mais le multiple n'est pas non plus à une hauteur telle qu'un consensus raté le ferait automatiquement solidement débouler.
On surveillerait pour le plaisir de l'exercice, mais on ne ferait pas l'exercice avec notre portefeuille.