Nous vous présentions la semaine dernière une liste de 32 titres considérés par l'équipe de stratèges de Barclays Capital comme d'intéressants candidats pour une vente à découvert. Difficile d'avoir meilleur synchronisme. Entre la date de publication et lundi, les Bourses ont chuté de 8 %.
Deux questions se posent donc :
1) Où s'en va le marché ?
2) Est-il toujours intéressant de jouer certains de ses acteurs à la baisse ?
Où va-t-on ?
La force et la rapidité de la chute nous ont grandement étonné. La Chine est en difficulté, mais ce n'est pas nouveau. Parce qu'il y a plus de mouvements d'humeur que de nouvelles données, les prochaines semaines risquent d'être plus volatiles qu'à l'habitude.
On notera qu'à la suite de la dernière baisse, le S&P 500 se négocie à un peu plus de 16 fois le bénéfice prévu en 2015, que l'on voit avancer de 5 % par rapport à 2014. C'est peut-être encore un peu cher, mais la Réserve fédérale américaine parlait encore la semaine dernière d'une possible hausse des taux, étant donné une situation économique qui n'est pas extraordinaire, mais qui prend du tonus. La moyenne historique est de 15 à 16 fois les bénéfices, sur des progressions de bénéfices qui s'approchent de celle de cette année.
Les indices ne reculeront peut-être plus, mais on ne serait certainement pas disposé, à ce moment-ci, à vendre le S&P 500 à découvert.
Ce qui nous amène à la deuxième question.
Est-il toujours intéressant de jouer certains acteurs à la baisse ?
Avant de jeter un coup d'oeil plus actuel aux titres les plus connus qui constituaient la liste, un petit mot.
Notre hésitation constante à recourir à la vente à découvert vient d'une expérience personnelle survenue il y a plusieurs années, au lendemain d'un voyage à Omaha pour entendre Warren Buffett. Ce dernier avait dit : dans les années à venir, le bénéfice de Coca-Cola continuera de croître et de la valeur sera créée.
Coup de fil au courtier : achat !
Malheur. Les bénéfices de Coke allaient année après année effectivement continuer de croître, mais, au même moment, les multiples allaient commencer à fondre. Ils sont passés de quelque chose comme de 35-40 fois le bénéfice à 20 fois (aujourd'hui). Il y a eu création de valeur, mais rien de remarquable.
L'expérience allait nous apprendre qu'il valait mieux améliorer notre écoute de Buffett et utiliser les bons filtres d'analyse, particulièrement lorsqu'il parlait d'une société de laquelle il était actionnaire et administrateur. Comme il l'avait prévu, les bénéfices ont grimpé et il s'est créé de la valeur au fil du temps. Mais il n'avait jamais dit d'acheter Coke !
Aurait-on dû vendre à découvert, dans ce cas ? La difficulté, c'est qu'un titre peut rester longtemps surévalué et simplement faire du surplace, au fur et à mesure que sa surévaluation descend. Les bénéfices grimpent et les multiples fondent. Il y a eu quelques creux, mais peu nombreux et pas très significatifs.
Voyons, en rafale, les titres plus connus.
Facebook (FB, 86,06 $ US)
À 40 fois le bénéfice prévu, le multiple est élevé, mais, d'ici deux ans, le titre ne pourrait être qu'à 23 fois. Le potentiel de marché pour Facebook dans l'avenir est trop important. Bien que des corrections surviendront ultérieurement, on ne sait pas à partir de quel prix elles se déclencheront. Étant donné le potentiel évident de la société dans le futur, on préférerait vendre à découvert à partir d'un multiple plus élevé.
Netflix (NFLX, 106,52 $ US)
Le titre est à plus de 400 fois le bénéfice. On ne doute pas de la force du modèle d'entreprise. Il ressemble à celui d'Amazon, à l'époque : développer pour un temps un redoutable concept, quitte à sacrifier temporairement de la rentabilité. Plusieurs fois dans le passé le marché a douté et fait piquer Amazon. Quelque chose nous dit qu'il en sera de même avec Netflix. Celui-là est sérieusement à considérer.
Google (GOOG, 610,44 $ US)
Le titre est à 21,5 fois le bénéfice prévu. Ce n'est pas beaucoup plus élevé que le marché en général. Malgré la taille de la société, il semble qu'elle aura dans l'avenir plus de potentiel que le marché en général. On ne jouerait pas à la baisse.
Under Armour (UA, 87,82 $ US)
Le détaillant de vêtements sport a le vent dans les voiles, mais le titre est à 80 fois le bénéfice prévu. La mode est un secteur auquel on croit peu, du moins à ces hauteurs d'évaluation. Les concepts s'imitent, et les marques faiblissent. Le cours est à 23 fois le bénéfice prévu dans quatre ans. C'est loin dans le temps, et ça reste relativement élevé. Celui-là aussi est toujours à envisager pour une vente à découvert.
Starbucks (SBUX, 52,40 $ US)
À environ 32 fois le bénéfice prévu, le titre fait un peu penser à l'anecdote de Coke, au tournant des années 1990. À peu près le même multiple, mais Starbucks semble être devant une meilleure piste d'envol. On ne serait pas partant, du moins avec certitude.
Monster Beverage (MNST, 137,06 $ US)
À 43 fois le bénéfice prévu, il n'y a pas de doute que le multiple est «énergisé». Trop ? Beaucoup sont optimistes à la suite d'un partenariat avec Coke qui donnera du levier à la distribution. Le titre est néanmoins trop cher. C'est tentant.
Visa (V, 70,44 $ US)
À plus de 26,5 fois le bénéfice prévu, la probabilité que le titre soit surévalué et subisse éventuellement une correction est importante. D'autant qu'il n'était qu'à 24 fois il y a un mois. Mais il y a une transaction dans l'air avec Visa Europe, alors on hésite à parier trop vite.