Steve Jobs va de nouveau sur les lignes de côté pour un temps indéterminé, alors que ses problèmes de santé sont de retour. Qu'est-ce à dire pour Apple?
Depuis deux jours, c'est à peu près tout ce dont on parle sur Wall Street et Bay Street.
Depuis des années, la même question se pose aussi au sujet de la succession de Warren Buffett.
Le cas Buffett
Ce n'est pas d'hier que nous sommes hésitants sur le titre de Berkshire Hathaway.
L'hésitation vient simplement du fait que Berkshire est aujourd'hui un mastodonte. Et que pour faire avancer significativement un mastodonte, il faut un super génie charismatique de la trempe de Warren Buffett.
Depuis longtemps, l'Oracle parle d'une culture d'entreprise unique qui restera après son départ. La première partie de l'affirmation est vraie (la culture unique), la seconde est malheureusement douteuse (la pérennité de la culture).
Warren Buffett a fait de bons coups en profitant de la crise financière, mais, ces dernières années, la majorité de ses bons coups sont surtout attribuables à une chose: lui-même.
Les entrepreneurs aiment généralement pouvoir vendre leur entreprise et récolter de l'argent sonnant afin d'assurer leurs arrières. Ils hésitent cependant souvent parce qu'ils ne veulent pas vendre au premier venu et souhaitent paradoxalement pouvoir continuer à la développer.
Qui de mieux pour solutionner le dilemme que Warren Buffett? En plus de 30 ans, il a toujours laissé en place les propriétaires des entreprises achetées en leur donnant carte blanche pour leurs activités. Seule prérogative qu'il se réservait: la réallocation des capitaux générés.
Beaucoup d'entrepreneurs à succès ont choisi de vendre peu cher à Berkshire à cause de la philosophie du personnage et de son charisme. Il est douteux que l'on puisse trouver un remplaçant aussi charismatique que Warren Buffett. Et, même en supposant que l'exploit se réalise, il faudra plusieurs années avant que le doute quant au respect de la culture Buffett ne s'estompe. Les probabilités que les offres de ventes arrivent au même rythme qu'aujourd'hui sont plutôt faibles.
Pour Berkshire, Warren Buffett apparaît irremplaçable.
Est-ce la même chose pour Steve Jobs?
La situation est un peu différente.
Steve Jobs est sans doute aussi charismatique (d'un tout autre genre cependant), mais le trait de personnalité n'a eu que peu d'impact sur les rendements d'Apple au cours des dernières années.
C'est plutôt sa vision et son leadership qui ont fait le succès de la compagnie.
"Bah, pas si important la vision: lors de la dernière absence de Steve Jobs (six mois, en janvier 2009), le titre d'Apple a pris 60%", diront certains.
À court terme, peut-être. En 1985, Jobs avait cependant été évincé d'Apple, et n'y était revenu que douze ans plus tard. La compagnie nageait alors en eaux troubles. Sans son retour, elle n'existerait peut-être plus aujourd'hui.
C'est cette vision qu'il faudra remplacer chez Apple.
Contrairement à Buffett, Jobs n'est pas irremplaçable. Mais dans un monde en rapide évolution comme celui des technologies, il y aura peu de place pour l'erreur dans le choix de son successeur.
Dans l'intérim, Apple est pour l'instant en voiture, comme en font foi ses résultats de mardi (6,43$ US par action alors que le marché attendait 5,40$ US).
Le iPhone et le iPad sont sur une jeune lancée, avec une longueur d'avance sur la concurrence.
Beaucoup débattent aujourd'hui de la suffisance du niveau de divulgation quant à l'état de santé de monsieur Jobs. A-t-il de nouveaux problèmes de foie? Ou assiste-t-on à une nouvelle attaque de son cancer? La première situation étant présumée moins dommageable que l'autre. C'est un débat qui n'a pas vraiment de pertinence. L'absence de monsieur Jobs ne devrait pas trop se faire sentir en 2011, ni probablement en 2012. Un investisseur a aujourd'hui suffisamment d'information pour savoir ce qu'il doit faire avec ses actions à court et moyen terme.
C'est après que les choses sont incertaines.