L'avenir publicitaire favorise les titres Internet, c'est là que se trouve la croissance.
Si vous êtes de l'industrie des médias, c'est avec grande peine que vous entendez répéter l'énoncé. Les revenus publicitaires continuent de migrer vers le Net, les moyens des salles de rédaction s'atrophient et la qualité de l'information est de plus en plus difficile à maintenir.
En revanche, l'argent entre désormais à flots pour quelques sites Web.
Temps de se précipiter et d'acheter pour profiter de la manne ?
Ce n'est malheureusement pas aussi simple. Les investisseurs paient actuellement une hauteur de bénéfices qui ne se représentera que dans quelques années. Ils courent le risque que ces attentes ne se matérialisent jamais.
Qu'en est-il pour Facebook, Twitter et Google ?
On a décidé d'y jeter un coup d'oeil.
La méthode d'évaluation
Au risque de nous répéter, il est difficile d'évaluer si on paie trop cher pour les bénéfices futurs lorsqu'on étudie des sociétés en forte croissance.
Un titre qui se négocie à 12 fois le BAIIA (bénéfice avant intérêts, impôts et amortissement) à venir est généralement considéré comme relativement cher payé. C'est qu'on attend une bonne croissance dans l'avenir.
Dans le cas de Twitter, le titre se négocie aujourd'hui à près de 130 fois le bénéfice de 2014. C'est énorme. Mais ce bénéfice fait aussi des pas de géant. À la fin de l'année, il devrait avoir triplé.
Dans le cas de Facebook, le titre est à un peu plus de 20 fois, tandis qu'il est à 13 fois dans celui de Google.
Comment juger de ce qui est raisonnable ?
En se projetant dans le temps, et en tentant de voir si les hypothèses conduisant un peu plus loin sont raisonnables.
On a arbitrairement retenu l'exercice 2017, soit dans trois ans. Il s'agit de voir à quel multiple se négocie aujourd'hui le titre par rapport à ce bénéfice de 2017, et à quelle distance se trouve ce multiple par rapport au repère de 12 fois le BAIIA.
Facebook (FB, 73,17 $ US)
La difficulté est bien entendu de déterminer ce qu'est un scénario «raisonnable» de croissance.
Seulement trois maisons de notre univers s'avancent à donner des prévisions jusqu'en 2017. On a retenu le scénario de Canaccord Genuity parce qu'il est le plus faible des trois.
À combien de fois le BAIIA de 2017 se négocie actuellement le titre ?
À près de 10,5 fois le bénéfice (16,4 G$ US). Sachant qu'à compter de 2017, le marché de Facebook devrait encore être passablement ouvert, il ne semble pas déraisonnable d'envisager que les investisseurs puissent alors décider d'appliquer au BAIIA le fameux multiple de 12 auquel on faisait référence. Et probablement même un peu plus (14).
Ce qui représente une appréciation potentielle de 15 % à 30 % pour le titre.
Notre horizon de prévision est sur trois ans, mais comme le marché agit par anticipation, le scénario de 15 % à 30 % pourrait survenir d'ici deux ans à deux ans et demi.
Twitter (TWRT, 43,00 $ US)
Embêtant ici. Les trois scénarios disponibles offraient d'importants écarts. On a opté pour le scénario intermédiaire de la Deutsche Bank. Selon ce bénéfice de 2017, le titre est à 23 fois le BAIIA (1,4 G$ US).
L'action de Twitter pourrait sans doute obtenir un multiple supérieur à 12 à ce moment. Le bénéfice est nettement plus petit que celui de Facebook (1,4 G$ US par rapport à 16,4 G$ US), et il est plus facile d'atteindre des croissances élevées quand on part de petites bases. Cela dit, le marché des usagers semble aussi nettement plus petit. On recense environ cinq fois plus d'utilisateurs Facebook que Twitter, et il n'est pas sûr que Twitter ait encore un si grand potentiel d'interpellation.
Un multiple de 23 semble élevé, il sera probablement plus faible à ce moment. Ce qui veut dire que le titre semble davantage offrir un potentiel de recul que de gain sur trois ans.
Google (GOOGL, 571,81 $ US)
Problème important ici. Notre univers n'offrait qu'un seul scénario sur l'horizon de 2017. On a donc triché un peu, et retenu l'année 2016.
Les prévisions des quatre firmes sondées étaient somme toute assez regroupées, et on a retenu le scénario de croissance le plus faible, celui de FBN Securities.
Résultat : le titre de Google se négocie aujourd'hui à un multiple de 9 fois la prévision de bénéfice de 2016 (36,2 G$ US), et ce, grâce à une progression annuelle des bénéfices de 19 % (2015) et 15 % (2016). Étant donné la force de la progression au cours des deux prochaines années, il est probable qu'en 2016 les investisseurs seraient encore tentés d'appliquer notre fameux multiple de 12 fois le BAIIA.
Ce qui veut dire une progression de 25 à 30 % du titre. Et comme il s'agit d'une prévision qui survient une année plus tôt que pour Facebook et Twitter, le parcours pourrait se faire sur un an et demi.
Morale de l'histoire ?
Si on croit que les scénarios retenus ont de bonnes chances de se matérialiser, il faudrait actuellement : acheter Google, conserver Facebook et vendre Twitter.