BLOGUE. Décision historique pour l'économie indienne mais aussi pour les patients des pays émergents, des pays pauvres et les multinationales pharmaceutiques. La Cour suprême de l'Inde a rejeté la demande de brevet pour la nouvelle version du médicament anti-cancer Glivec de la Suisse Novartis.
Novartis perd sa bataille de 7 ans
Novartis se bat depuis sept ans pour qu'on lui accorde les droits de production exclusifs pour sa nouvelle version de Glivec. La cour a tranché: cette version "revue et améliorée" n'est ni une nouveauté ni une innovation. le "Glivec nouveau" ne mérite pas de brevet.
Une mauvaise nouvelle pour l'industrie pharmaceutique mondiale
Cette décision annonce des heures sombres pour les pharmas. Le vent ne souffle définitivement pas dans leur directement. On pourrait dire qu'il a carrément tourné. Les États des pays riches ont longtemps soutenus les entreprises pharmaceutiques. On leur a accordé une protection afin qu'elles puissent mener en paix leur combat contre la maladie. Et puis, c'était connu, les entreprises pharmaceutiques étaient de bons employeurs offrant des emplois de qualité, bien rémunérés assortis de conditions de travail au-dessus de la moyenne. Plusieurs Québécois peuvent en témoigner. C'était le bon temps.
Mais, les temps changent. Les pays émergents, surtout l'Inde, on développé leur propre industrie pharmaceutique. Une industrie générique adaptée à la réalité économique de ce l'Asie. Israël aussi s'est bâtie une solide réputation dans l'industrie générique.
La Cour suprême n'a pas tranché en faveur des génériques ni contre les pharmas. Elle a tranché en faveur des malades. Les Indiens n'ont pas les moyens de se payer un traitement de Glivec. Il leur en coûterait 2600$/mois. La version générique, elle, ne coûte que 175$/mois.
Pourquoi les pharmaceutiques doivent revoir leur stratégieOn parle de plus en plus du marché au "bas de la pyramide" ( BOP pour bottom of the pyramid). Il s'agit du marché des pauvres. Tous ceux qui ont très peu d'argent mais qui ont aussi des besoins à combler. Les pauvres doivent se nourrir, se loger, se divertir, se soigner. Vous pouvez en lire davantage dans cette entrevue que j'ai réalisée avec l'économiste Esther Duflo, directrice de la Jameel Poverty Action Lab du MIT, à ce sujet. Des entreprises comme Danone et Adidas s'intéressent au marché BOP. Elles tentent de créer des produits à faible coût et à faible prix. Le défi consiste à ce qu'ils ne soient pas ausis de faible qualité.
Le jugement de la Cour suprême indienne lance le message aux pharmas qu'il serait temps qu'elles s'intéressent aussi au marché BOP. Leur modèle d'affaires classique est cassé depuis plusieurs années déjà. C'est ce que mavait confié l'Américain Hugh O'Neill,en 2010, alors qu'il dirigeait Sanofi-aventis Canada.
"Notre modèle était simple : investir une fortune dans la R-D pour découvrir un médicament vedette (blockbuster), le produire à grande échelle et le promouvoir auprès des médecins grâce à une armée de vendeurs aguerris. Ce temps est révolu pour deux raisons : la volonté et la capacité de payer ne sont plus là. Notre plus grand obstacle est notre réussite passée"
Le modèle n'est pas seulement cassé à cause du marché des pauvres. Les pays riches aussi préfèrent les génériques.
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Lire ma chronique précédente sur la formation professionnelle en France.