Émotive, je le suis... et je me sens toujours très concernée à l'écoute ou à la lecture de mauvaises nouvelles, même si elles peuvent paraître très éloignées de mes préoccupations de femme vivant confortablement dans un pays épargné par ces atrocités qui endeuillent et ensanglantent chaque jour notre petite planète. Ces nouvelles, souvent dramatiques, ont au moins l'avantage de situer la grandeur de l'homme sur une échelle des valeurs qui a malheureusement de plus en plus tendance à le tirer vers le bas. Et là, nonobstant les distances, les différences culturelles ou les mentalités, je me sens toujours interpellée par des comportements qui me rappellent une expression balzacienne largement reprise depuis : «Grandeur et décadence», mais... de la nature humaine cette fois.
Même si nous sommes à des milliers de kilomètres de véritables foyers d'horreurs, de violences et d'injustices, nous ne sommes pas à l'abri de comportements qui, s'ils sont sans commune mesure avec ces atrocités, mettent en lumière la cupidité, l'inconscience et l'irresponsabilité de certains d'entre nous.
J'aimerais revenir sur une nouvelle qui a fait la une de notre actualité pendant peut-être deux jours en soulevant l'indignation des uns et des autres, mais dont nous n'entendons déjà plus parler. Il y a quelques semaines, un reportage à la télévision nous faisait découvrir qu'une grande enseigne d'épiceries faisait entrer tôt le matin quelques employés dont la seule mission consistait, avant l'ouverture du magasin, à changer les dates sur les emballages de viande périmée. Cette méthode visant à prolonger la vie de produits pourtant à risque m'a littéralement révoltée. Comment peut-on faire cela dans un pays socialement évolué comme le nôtre et parfaitement au fait des risques encourus par la consommation d'aliments avariés ? Si encore nous avions l'assurance, en cas de contamination, d'être pris en charge rapidement par un système de santé efficace ! Mais ce n'est pas vraiment le cas.
Bonne conscience et hypocrisie
Pourtant, ces mêmes épiciers se donnent une bonne conscience environnementale en nous proposant des sacs réutilisables ou en nous vendant pour cinq sous, censés être dissuasifs, le sac en plastique dans lequel nous mettrons nos victuailles. Autant d'aliments déjà emballés dans du plastique ou de fruits et de légumes que nous avons placés nous-mêmes dans des sacs... en plastique, largement et gratuitement mis à notre disposition dans tous les rayons du magasin. Il y a là quelque chose d'hypocrite et d'illogique qui vient heurter notre intelligence et notre conscience de citoyens responsables.
S'il est louable d'apporter sa contribution pour préserver notre environnement - et non de faire semblant - et de se battre pour protéger ours polaires, phoques, oiseaux migrateurs et bélugas... pourrait-on aussi avoir, de manière naturelle, une sensibilité suffisante pour permettre à l'homme de vivre en santé en lui évitant de prendre des risques inutiles et dictés par le seul appât du gain ?
Même indignée, je pourrais presque me réjouir si le cas de ces épiciers était unique. Malheureusement, les exemples de commerces ou d'entreprises qui n'ont que faire de notre santé et de notre hygiène alimentaire sont légion. Qui ne se souvient pas de ces abattoirs qui ont fait les manchettes pour avoir littéralement assassiné les animaux destinés à notre consommation, dans des conditions exécrables et au prix de souffrances atroces. La plupart de ces abattoirs ne disposaient même pas d'un vétérinaire capable de déterminer si une bête était malade ou non, et si sa viande était sans risque pour notre santé.
Ces cas d'insalubrité et de risques alimentaires se comptent aussi par centaines dans la restauration. Combien de fois avons-nous vu que tel ou tel restaurant s'était vu infliger une amende de quelques centaines de dollars parce qu'il ne respectait pas les règles d'hygiène les plus élémentaires ? Quelques centaines dollars pour mettre quotidiennement en danger la santé de nos familles, de nos enfants, de nos petits- enfants... J'ai beaucoup de mal avec cette évaluation financière du risque et de ses conséquences. Et si par hasard des charges trop lourdes imposaient une fermeture de l'établissement, je reste persuadée que le propriétaire incriminé s'empressait d'ouvrir, quelques semaines plus tard, un autre restaurant sous un autre nom, mais avec très probablement les mêmes méthodes.
Une responsabilité partagée
D'autres cas me viennent en tête et me mettent dans une colère que j'essaie de contenir en écrivant ces quelques lignes. Oui, j'en veux à ces commerçants et à ces entrepreneurs irresponsables et dangereux, mais j'en veux aussi à certaines institutions, aux organismes de contrôle, aux gouvernements, à des lois trop souvent archaïques et à une réglementation qui devrait permettre de fermer définitivement tous ces établissements sans laisser à leurs propriétaires la possibilité de sévir à nouveau dans un domaine aussi sérieux que celui de notre santé.
Ces affaires, qui sont à la une des médias pendant deux ou trois jours, sont vite oubliées. On passe à autre chose, et malgré la bonne volonté apparente de tous ceux qui s'expriment à ce moment-là, on ne sait jamais vraiment ce qui se passe après ni si les mesures nécessaires pour que cela ne se reproduise plus jamais ont été réellement prises et suivies d'effets.
Peut-être que certains me trouveront un peu critique et suspicieuse à l'égard de certaines instances. J'ai des raisons de l'être. J'oeuvre depuis des années dans un domaine thérapeutique qui m'est cher, celui de la prévention, et vous êtes à mille lieues d'imaginer les obstacles et les embûches que j'affronte et les bâtons qu'on peut me mettre dans les roues toutes les fois que je tente de proposer des solutions simples et efficaces pour améliorer la santé, l'hygiène alimentaire et le bien-être de chacun. Assurément parce que je viens bousculer certaines habitudes et probablement quelques chasses gardées. Mais cela fera peut-être l'objet d'une future chronique.
Danièle Henkel a fondé son entreprise en 1997, un an après avoir créé et commercialisé le gant Renaissance, distribué partout dans le monde. Mme Henkel a été plusieurs fois récompensée pour ses qualités de visionnaire et son esprit entrepreneurial. Elle est juge dans la téléréalité à caractère entrepreneurial Dans l'oeil du dragon, diffusée à Radio-Canada.