Oui, c'est possible de collaborer avec «l'ennemi»

Publié le 09/06/2016 à 11:15

Oui, c'est possible de collaborer avec «l'ennemi»

Publié le 09/06/2016 à 11:15

Par Diane Bérard

(Photo: 123rf.com)

L’Afrique post apartheid. La Colombie post guerre de la drogue. La Thaïlande post guerre civile. Trois situations qui un point commun: le Canadien Adam Kahane, spécialiste des négociations en situations complexes.

Kahane a écrit « Solving Though Problems, Transformative Scenario Planning » et « Pouvoir et amour : théorie et pratique des transformations sociétales ». Hier il a présenté « Collaborer avec l’ennemi : comment travailler avec des personnes avec qui vous êtes en désaccord, que vous n’aimez pas ou en lesquelles vous n’avez pas confiance », lors du Rendez-vous de l’innovation sociale, organisé par le Réseau québécois en innovation sociale au Salon 1861 à Montréal.

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Pourquoi est-ce si difficile de collaborer?

On oublie souvent qu’en français, le verbe collaborer a deux sens :

1- travailler ensemble

2- trahir les siens, comme ce fut le cas des collabos pendant la Seconde Guerre mondiale.

Lorsqu’on traite avec des gens qui ne pensent pas comme nous, c’est le seconde définition qui prend tout son sens. Nous avons le sentiment que collaborer équivaut laisser tomber ses valeurs et ses principes. Vu sous cet angle, personne n’a envie de collaborer avec « l’ennemi », fut-il une ONG, une grande entreprise ou la société civile. Il n’y aura pas de collaboration fructueuse entre des ennemis tant qu’ils n’adopteront pas la première définition.

Ce qu’il faut savoir lorsqu’on collabore avec un « ennemi »

1- En contexte difficile, la collaboration est toujours un second choix

On essaie de s’adapter ou alors on tente de forcer, d’imposer notre solution à l’autre. On collabore quand on n’a pas le choix.

2- La tension ne disparaît pas

Nous pensons que nous devons collaborer. Mais nous pensons aussi que nous ne devrions pas. Cette pensée demeure dans notre tête et celle de nos vis-à-vis tout au long du processus de négocation.

3 réalités de la négociation avec l’ennemi

1- La négociation ne marque pas la fin du combat

Négocier avec l’ennemi c’est faire des allers-retours entre le combat et la négociation. Adam Kahane cite le cas du Sustainable Food Lab, qui vise à créer des chaînes d’approvisionnement durables. Elle réunit les grandes entreprises, les gouvernements et la société civile. « La négociation seule n’aurait jamais suffi à convaincre les grandes entreprises d’adhérer à cette initiative. Il a fallu les manifestations citoyennes pour compléter le processus. »

2- Vous ne pouvez pas planifier

« Dans ce type de négociation, il est impossible de planifier. Vous trouvez votre chemin une étape à la fois. » En fait, vous ne bâtissez pas le pont une fois arrivé à la rivière… vous le bâtissez pendant que vous êtes dans l’eau !

En fait, tout ce que chaque partie sait et reconnaît c’est qu’il y a un problème. Fait intéressant : dans une entrevue accordée en 2103 au journal vancouverois «The Tyee», Kahane estimait que la question des changements climatiques au Canada s’avérait plus difficile à résoudre que le post apartheid en Afrique du Sud… parce que dans le second cas tout le monde s’entendait pour reconnaître qu’il y avait un problème. Ce qui n’était pas le cas pour la présence ni les causes des changements climatiques au Canada. Hier, je n’ai malheureusement pas eu l’occasion de lui demander s’il affirmerait la même chose trois ans plus tard.

3- Amour et pouvoir peuvent cohabiter

« Si vous attendez ou si vous vous attendez à ce que le processus de collaboration soit harmonieux, vous n’avancerez pas, prévient Kahane. La collaboration n’est pas obligatoirement harmonieuse. Les politiciens et les entreprises l’ont compris. Ils savent qu’amour et pouvoir peuvent cohabiter. Les acteurs de l’innovation sociale ont à l’apprendre. Ils doivent composer avec la tension entre l’amour (la pulsion vers l’unité) et le pouvoir (la pulsion de l’unicité) présente dès qu’on travaille avec un individu ou un groupe aux intérêts divergents des nôtres.

Laure Waridel, qui a mené plus d’un combat à titre de pionnière du commerce équitable au Québec, l’a bien résumé. Elle a assisté à la conférence d’hier et était responsable de commenter la conférence d’Adam Kahane.

« Au cours des premières années, notre intervention pour l’adoption du café équitable était guidée par une vision binaire : il y avait les bons et les méchants. Nous avons réalisé que c’était plus compliqué. Il a fallu accepter et travailler avec cette complexité. »

La vie est plus facile, et rassurante, lorsqu’on divise le monde en catégories. Mais lorsqu’on veut innover, celles-ci deviennent encombrantes. Surtout s’il est question d’innovation sociale. Pour changer le monde, on peut faire un bout de chemin tout seul. Mais, tôt ou tard, on aura besoin des autres. Et nos semblables suffisent rarement à atteindre nos objectifs finaux. On a aussi besoin de membres des « autres catégories ».

Voici la définition de l’innovation sociale selon le Réseau québécois en innovation sociale (RQIS):

« Une innovation sociale est une nouvelle idée, approche ou intervention, un nouveau service, un nouveau produit ou une nouvelle loi, un nouveau type d’organisation qui répond plus adéquatement et plus durablement que les solutions existantes à un besoin social bien défini, une solution qui a trouvé preneur au sein d’une institution, d’une organisation ou d’une communauté et qui produit un bénéfice mesurable pour la collectivité et non seulement pour certains individus. La portée d’une innovation sociale est transformatrice et systémique. Elle constitue, dans sa créativité inhérente, une rupture avec l’existant. »

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