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PME, vous manquez de maturité numérique

Catherine Charron|Édition de la mi‑novembre 2021

PME, vous manquez de maturité numérique

Donner la parole à sa clientèle est un bon moyen d'offrir du contenu adapté et de générer des ventes. (Photo: Blake Wisz pour Unsplash)

Fermeture des commerces non essentiels, services rendus par vidéoconférence, développement de nouvelles offres ou d’une boutique en ligne : la pandémie aura bouleversé la stratégie virtuelle de bon nombre de PME québécoises. Toutefois, elles n’ont pratiquement pas enrichi leurs techniques de marketing numérique au cours de la dernière année.

C’est le constat qu’ont fait les auteurs de la deuxième édition de l’étude «Maturité du marketing numérique des entreprises au Québec», menée par Varibase et Intgral, en partenariat avec Les Affaires, à laquelle 296 PME ont participé entre le 28 juin et le 4 octobre 2021.

«Il y a une volonté de s’améliorer, mais les entrepreneurs sous-évaluent le travail nécessaire pour significativement faire évoluer leur degré de maturité», observe Éric Azara, président de l’agence en marketing numérique Varibase.

Témoin du raz-de-marée de nouvelles offres développées au début de la pandémie sur le Net, l’entreprise a piloté un premier coup de sonde en 2020 afin de brosser un portrait de la situation. Si, auparavant, le constat était peu réjouissant, il est d’autant plus surprenant que l’état des choses est pratiquement identique aujourd’hui.

«Certaines PME étaient dans une meilleure posture, mais elle était structurelle, pas conjoncturelle. Certains restaurants faisaient par exemple déjà des commandes pour emporter. Ils étaient mieux préparés, mais pas parce qu’ils avaient anticipé la pandémie ; c’était un axe stratégique », relate le spécialiste du marketing.

Ainsi, près de 40 % des répondants estiment n’utiliser en général qu’une infime partie de l’ensemble des outils numériques aujourd’hui offerts. Un peu plus de 50 % sont plutôt convaincus que leurs stratégies sont dans la norme. Néanmoins, elles comptent changer la donne au cours de la prochaine année, peu importe leur niveau de revenu. 

Une conclusion qui fait écho à ce qui a été observé l’an dernier, mais qui ne s’est pas concrétisée, rappelle-t-on dans l’étude.

L’étude se penche sur six grands fondements pour déterminer le degré de maturité numérique des PME sondées : la collecte et la structure des données, la connaissance des clients, la stratégie de vente et de marketing, l’activation marketing et l’automatisation, le contenu et l’expérience ainsi que la mesure de la performance.

L’automatisation, la personnalisation des contenus et des campagnes ainsi que le suivi des performances sont les éléments les moins bien maniés par les PME répondantes. Sans surprise, croit Éric Azara, car elles figurent parmi les dernières étapes d’une stratégie de marketing numérique mature.

Pourtant, afin de livrer le bon message, au bon moment à la bonne personne, «ça requiert une bonne dose de personnalisation, de bien comprendre les données amassées — bien segmentées et organisées — et d’utiliser des technologies qui sont adaptées», indique au bout du fil Sophie Girouard, cofondatrice et associée de l’agence de marketing numérique Hamak.

Garantissant un rendement de l’investissement, la présidente de l’agence Mixoweb, Émilie Poirier, concède que «tant qu’on ne [s’est pas ajusté], on ne réalise pas à quel point ça peut être bénéfique. Les retombées demeurent abstraites. Lorsque c’est amélioré, on se rend compte que les ventes et la visibilité explosent».

 

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Trois solutions à ce retard 

Que doivent donc faire les PME pour court-circuiter la tendance et améliorer leur score l’an prochain? Les Affaires a posé la question à deux expertes afin que vous puissiez réellement faire preuve de maturité numérique là où de nombreuses entreprises peinent le plus à y arriver selon le rapport.

 

Conseil no1 : automatisez vos courriels

La quantité faramineuse de données collectées par les PME permettent aujourd’hui aux outils technologiques de mieux cibler l’auditoire de celles-ci et d’automatiser davantage leurs interactions avec leur clientèle. Pourtant, il semble que peu de répondants ont adopté cette pratique.

«L’activation contextuelle des interactions basées sur un événement déclencheur lié au client ou d’un comportement en temps réel est l’un des aspects les plus négligés du continuum numérique, quelle que soit la taille de l’entreprise», fait-on remarquer dans le rapport.

De plus, seulement 26 % des PME sondées usent du ciblage dynamique de l’audience pour envoyer des messages adaptés selon les informations du consommateur et son utilisation avec une plateforme.

«Lorsqu’un internaute passe par un formulaire sur son site web, l’entreprise sait comment lui répondre, mais pas toujours de façon automatisée. Dans un contexte où on manque de temps, il est d’autant plus important de faire ce travail», assure Émilie Poirier.

Certes, l’automatisation de certaines des facettes de votre stratégie marketing peut sembler être une tâche titanesque, d’autant que les possibilités sont multiples. Négociez alors ce virage étape par étape et consacrez-y les ressources nécessaires, internes ou externes, conseille Sophie Girouard.

Tout comme Émilie Poirier, Sophie Girouard recommande d’automatiser la gestion de vos courriels d’abord. «On peut passer par des plateformes d’automatisation, comme Mailchimp, ActiveCampaign ou Omnisend, qui sont plus faciles d’utilisation et qui ont des coûts moindres», suggère-t-elle.

 

Conseil no 2: personnalisez pour économiser

La personnalisation est l’une des pierres angulaires pour bonifier l’expérience du client. Pourtant, les auteurs de l’étude ont été surpris de constater que les deux tiers des PME sondées se fient uniquement à des données sociodémographiques pour s’adresser à leur audience.

«Ce sont de pratiques vieilles d’une quinzaine d’années. Aujourd’hui, on devrait personnaliser en fonction du dernier achat, du comportement qu’on a eu sur le site», s’étonne Éric Azara, car l’expérience du consommateur est aussi affectée par le contexte et le moment choisi pour acheminer l’information.

Ça devrait même commencer bien avant qu’un internaute ne souhaite se procurer le bien ou le service d’une PME, grâce au contenu de marque qu’elle produit. «Les gens veulent connaître une enseigne à leur rythme, et la contacter lorsqu’ils sont prêts», laisse entendre Sophie Girouard.

Ces textes ou vidéos informatifs «demeurent de la publicité, mais ça amène le consommateur à s’y intéresser, et ça donne aussi du contenu au site web, ce qui ajoute du référencement organique», fait remarque Émilie Poirier. D’une pierre deux coups qui devraient davantage se répercuter dans la stratégie numérique des PME au cours de la prochaine année.

Une expérience agréable obtenue en consultant du contenu de marque adapté créera un lien qui, plus il est solide, plus il générera de ventes et, ultimement, de nouveaux ambassadeurs pour votre entreprise.

«Longtemps, les PME ont eu peur de donner la parole aux clients, car ils ne savaient pas comment gérer les voix qui n’étaient pas positives. Si c’est négatif, on doit simplement en prendre compte et satisfaire la demande», conseille le président de Varibase.

Cette «cocréation» dont il est question dans le rapport, en impliquant «la clientèle dans la création et la distribution du contenu numérique pour faire grandir la marque», vous permettra ainsi d’éviter d’ajouter une publicité de plus au Web qui semble déjà trop rempli aux yeux des consommateurs, souligne la présidente de MixoWeb.

 

Conseil no 3: bouleversez vos mesures

La disparition des témoins tiers, ces outils de suivi du comportement des consommateurs sur les sites web, comme Facebook ou Google, créera une onde de choc dans les stratégies marketing des PME en 2022.

Flairant la tendance, elles seront seulement 21 % à encore s’appuyer là-dessus l’an prochain. Et ce sont surtout les grandes entreprises, moins agiles, qui composeront ces rangs.

Certaines amélioreront leurs outils de gestion de la relation client (customer relationship management), communément appelés CRM, alors que d’autres deviendront propriétaires de leurs propres témoins. Ils suivront ainsi les visiteurs, peu importe le canal choisi.

Sophie Girouard croit qu’à long terme, ce bouleversement sera plus rentable pour les PME qui devront par elles-mêmes récolter des informations plus précises et qualifiées, qui nécessitent un temps de traitement moins long et génèrent des résultats conséquents, pour fidéliser leurs acheteurs et adopter des stratégies marketing plus avancées.

Si elle voit aussi d’un bon œil les bases de données mieux garnies, Émilie Poirier recommande tout de même de miser sur des technologies de CRM plus développées. «Ça permettra d’outiller l’équipe des ventes de A à Z, d’automatiser un paquet d’action marketing, de faire le suivi de tout le pipeline de développement à l’interne pour comprendre où se trouve quel client», énumère-t-elle.

Il est donc urgent, selon les spécialistes qui ont contribué à ce rapport, que les PME du Québec usent d’outils plus récents pour faire rayonner leur marketing numérique. Bien qu’elles soient ambitieuses, ces dernières ne semblent pas anticiper l’ampleur de la tâche qui les attend afin d’adopter des techniques dignes de 2022.

D’autant qu’«elles devront rapidement trouver l’expertise et l’expérience nécessaires à la mise en œuvre de leurs chantiers numériques afin d’assurer leur place future sur l’échiquier québécois», met-on en garde. Tout un défi pour une industrie confrontée à un manque de personnel, souligne Émilie Poirier.

 

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Les 10 commandements de la maturité numérique

1. Recueillir toutes les interactions de l’internaute avec votre marque.
2. Rendre accessibles vos données collectées à tous vos départements.
3. Segmenter vos clients en fonction du comportement que vous prévoyez qu’ils auront.
4. Personnaliser en temps réel vos communications selon l’internaute.
5. Intégrer l’ensemble de vos canaux de communications.
6. Activer votre communication avec un client en fonction de ses interactions.
7. Automatiser vos communications.
8. Communiquer grâce à du contenu de marque.
9. Cocréer votre contenu promotionnel avec vos consommateurs.
10. Utiliser vos propres témoins pour mieux mesurer votre performance.