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La peur de l’échec décourage l’entrepreneuriat, selon le rapport du GEM

Emmanuel Martinez|Mis à jour le 15 novembre 2024

La peur de l’échec décourage l’entrepreneuriat, selon le rapport du GEM

Les auteurs jugent que le repreneuriat pourrait constituer une porte d’entrée intéressante pour les femmes qui souhaitent se lancer en affaires. (Photo: 123RF)

La peur de l’échec gagne du terrain au Québec pour ceux qui souhaitent lancer leur entreprise, d’après le rapport annuel du Global Entrepreneurship Monitor (GEM) dévoilé vendredi.

Le volet québécois produit par l’Institut de recherche sur les PME de l’Université du Québec à Trois-Rivières montre que 55,7% des Québécois interrogés en 2023 considèrent que la peur de l’échec constitue un frein. Il s’agit d’un bond significatif par rapport aux 46,9% qui avaient répondu de la même façon en 2022. «Ceci marque un retour à des niveaux plus élevés que ceux observés avant la pandémie», note le GEM par communiqué.

Combiné à cela, les occasions perçues sont en chute libre, passant de 81,7% en 2021 à 68% en 2023. Toutefois, cette diminution est moins abrupte que dans le reste du Canada.

Paradoxalement, ces deux indicateurs n’ont pas eu d’effet immédiat sur les intentions de démarrer une entreprise au Québec, qui ont connu une légère hausse par rapport à 2022 pour s’établir à 21,1% en 2023.

D’ailleurs, les Québécois sont ceux qui valorisent le plus au monde l’entrepreneuriat. Ici, 79,5% des répondants estiment que cela constitue un bon choix de carrière. Il s’agit d’une proportion plus élevée qu’aux États-Unis, en deuxième place à 79,2%, et que dans le reste du Canada (67,4%). Par comparaison, seulement 38,4% des Suisses croient que l’entrepreneuriat est une voie de choix, le pourcentage le plus faible parmi les pays analysés.

entrepreneuriat
Les professeurs de l’UQTR Marc Duhamel et Étienne St-Jean sont les coauteurs du rapport annuel québécois du Global Entrepreneurship Monitor. (Photo: courtoisie)

Inquiétudes sur la survie des PME

Un autre phénomène inquiétant concerne la pérennité des PME. La proportion de sorties entrepreneuriales (avec ou sans continuité des activités) a atteint un sommet l’an dernier avec un taux de 9,1%. La proportion d’entrepreneurs établis demeure en deçà de ce qui existait avant la pandémie, malgré une légère amélioration par rapport à 2022.

«Ce déclin relatif des entrepreneurs établis peut être attribué à plusieurs facteurs, dont le vieillissement des dirigeants d’entreprises, les défis économiques persistants et une concurrence accrue sur le marché du travail, peut-on lire dans le rapport. Le phénomène observé en 2022, où les soutiens gouvernementaux post-pandémie n’ont fait que retarder des sorties entrepreneuriales inévitables, semble se confirmer en 2023.»

Le taux de nouveaux entrepreneurs reste insuffisant pour compenser l’augmentation des sorties entrepreneuriales, en particulier pour celles qui cessent définitivement leurs activités. «La pérennité des entreprises demeure un enjeu économique central au Québec», conclut l’étude.

Dans ce contexte, l’appui de l’État à l’écosystème entrepreneurial semble crucial. «Démarrer une entreprise et la rendre pérenne représente un parcours semé d’embûches pour lequel une bonne préparation et un accompagnement demeurent des éléments clés importants pour la réussite», affirme le professeur de l’UQTR Étienne St-Jean, coauteur du volet québécois du rapport.

Le repreneuriat progresse

Avec le départ à la retraite de baby-boomers, le repreneuriat a le vent dans les voiles au Québec. Le taux de repreneuriat au Québec a grimpé pour atteindre 36,5% pour la période 2021-2023, un taux très supérieur à celui dénoté dans le reste du Canada (23,4%) où ce phénomène est stable.

«Au Québec, une vague sans précédent de transferts de PME s’opère actuellement, offrant plusieurs bonnes opportunités pour des repreneurs potentiels de se lancer en affaires, estime le professeur de l’UQTR Marc Duhamel, coauteur de l’étude. Il devient important de développer un écosystème pour soutenir le repreneuriat afin de maintenir la vitalité économique des régions.»

Les auteurs jugent que le repreneuriat pourrait constituer une porte d’entrée intéressante pour les femmes qui souhaitent se lancer en affaires. Malgré des progrès, ces dernières boudent davantage l’entrepreneuriat que les hommes. Leur élan à créer des entreprises est plombé par un plus grand manque de confiance en leurs compétences entrepreneuriales. En outre, les Québécoises sont moins susceptibles que leurs vis-à-vis masculins à vouloir entreprendre (23,1% pour les hommes contre 18,9% pour les femmes). Des disparités dans les activités entrepreneuriales émergentes et établies sont également relevées par les auteurs.

«Encore aujourd’hui, l’entrepreneuriat peut être perçu comme un monde davantage fait pour les hommes, croit Étienne St-Jean. Les femmes doivent être en contact avec des modèles variés d’entrepreneures et pouvoir prendre conscience de leur potentiel en tant que créatrices d’entreprise.»

Par conséquent, les chercheurs soutiennent que des formations et des initiatives pour inciter les femmes à se lancer sont toujours nécessaires au Québec.