En janvier 2024, EXP a entamé un mandat de deux ans au Sénégal afin d’aider le gouvernement à régulariser les droits fonciers. (Photo: 123RF)
Ingénieur: rayonner à l’étranger. Si les projets d’ingénierie se déroulant dans des pays en voie de développement ne sont pas les plus lucratifs pour EXP, ils sont toutefois très mobilisateurs pour les employés, affirme Julie Beauséjour, première vice-présidente du secteur international de la firme
de génie basée à Brampton, en Ontario. Gros plan sur l’engagement d’EXP envers les populations défavorisées.
« Selon moi, nous sommes dans une nouvelle ère de collaboration internationale dans
les pays en développement », annonce Julie Beauséjour, dès le début de l’entrevue. La
VP à l’international place un moment charnière en 2012, l’année où le gouvernement
Harper a dissolue l’Agence canadienne de développement, qui finançait chaque année
des projets visant à sécuriser des populations défavorisées. « Plusieurs gros joueurs
québécois sont se sont alors retirés de ce marché », note Julie Beauséjour.
EXP, elle, a fait le chemin inverse. Il y a dix ans, la firme qui a 90 bureaux et laboratoires
à l’échelle de l’Amérique du Nord s’est engagée dans un premier projet phare au
Vietnam. « Nous y avons développé un programme de génie de l’eau. Nous avons
construit une quinzaine d’usines de traitement d’eau potable et d’eau usée, et donc,
nous avons fourni de l’eau traitée à plus de deux millions de Vietnamiens », dit fièrement
la VP, qui a remporté pour son projet le prix Honoris Genius de l’OIQ dans la catégorie
« Rayonnement international » en 2020.
Plus récemment, en janvier 2024, EXP a entamé un mandat de deux ans au Sénégal
afin d’aider le gouvernement à régulariser les droits fonciers. La firme participe à la
création d’un registre de plans et de cartes pour établir les titres de propriété officiels
pour 100 000 familles. « Les agriculteurs auront un actif pour accéder à du crédit. Les
femmes pourront devenir propriétaires. C’est un très gros progrès social, qui ouvre la
voie à du développement économique », fait valoir Julie Beauséjour.
Des partenariats plus « équitables »
En regardant dans le rétroviseur, la VP à l’international d’EXP constate que les manières
de faire ont beaucoup changé au fil des ans. « Il y a 30 ans, les firmes débarquaient
avec leur expertise, leurs gros sabots, faisaient tout le travail et repartaient. Aujourd’hui,
les projets se font en partenariat avec des consortiums locaux, à travers des mandats
équitables. Selon nous, c’est beaucoup plus efficace pour la collaboration et le transfert
des connaissances. » Dans le cas du projet sénégalais, EXP fait équipe avec des
enquêteurs et des cartographes locaux pour collecter et traiter les données.
Depuis la dissolution de l’Agence canadienne de développement, les projets se
déroulant dans les pays en développement se financent différemment. Les firmes d’ici
doivent dorénavant participer à des appels d’offres lancés par des agences financières
internationales, comme la Banque mondiale, la Banque asiatique de développement, la
Banque africaine de développement et la Banque interaméricaine de développement.
« Pris à la pièce, ces contrats sont plus gros pour nous que ceux que nous faisons au
Canada, note-t-elle. Toutefois, dans l’ensemble, ça demeure une petite part de nos
projets. » Julie Beauséjour juge de la valeur de ces projets par les répercussions
globales qu’ils ont sur les populations desservies, mais aussi, sur les employés qui y
participent. « Nos employés adorent ces projets parce qu’ils sortent de l’ordinaire et
qu’ils ont aussi beaucoup plus de bénéfices pour la communauté. »
À bien des égards, ces projets sont aussi beaucoup plus « complexes » et « risqués »,
convient la VP d’EXP. Diriger un projet à distance, dans un pays où l’électricité ou la
connexion Internet est intermittente, demande un certain degré d’agilité. « En Afrique,
les secteurs ruraux ont généralement une connexion Internet intermittente. En faisant
des sauvegardes quotidiennes dans le nuage, nous parvenons à travailler avec nos
partenaires locaux presque en temps réel. »
De plus, EXP doit considérer des risques « géopolitiques ». La VP note que le climat
politique ou social de certains pays est plus instable depuis la pandémie. Dans certains
projets, EXP a dû faire une large partie de la conception à distance, alors que la firme
avait prévu des visites de terrain. Certains pays ont aussi eu des manques de liquidité.
« Nous devons faire une analyse de risques très avancée », reconnaît-elle.
Loin de renoncer à ce créneau, EXP a cependant décidé de concentrer ses énergies
dans trois secteurs : le génie de l’eau, le transport et la géomatique (gestion des
données géographiques). Elle compte aussi rentabiliser ses investissements dans le
développement d’une plateforme de gestion des données foncières. « Nous pouvons
vendre cette technologie à d’autres pays qui s’engagent dans une réforme des droits
fonciers. »