Logo - Les Affaires
Logo - Les Affaires
Le courrier des lecteurs

Votre opinion

Le courrier des lecteurs

Expert(e) invité(e)

Innover en matière d’innovation… Notes d’un carnet de voyage d’affaires en Corée du Sud

Le courrier des lecteurs|Mis à jour le 14 novembre 2024

Innover en matière d’innovation… Notes d’un carnet de voyage d’affaires en Corée du Sud

Guillaume Côté (Photo: courtoisie)

Un texte de Guillaume Côté, PDG du Consortium de recherche et d’innovation en aérospatiale au Québec (CRIAQ)

COURRIER DES LECTEURS. Au retour d’une mission en aérospatiale en Corée — organisée par notre Délégation générale à Séoul —  un regard renouvelé sur l’écosystème d’innovation du Québec s’impose.

Une comparaison entre deux juridictions peut offrir des perspectives intéressantes sur les forces et les faiblesses de chaque système, ouvrant la voie à des réflexions sur de possibles ajustements.

En Corée, on envie les talents et le savoir-faire du Québec en aérospatiale, notamment au niveau du design, de la collaboration et de l’intégration des différents maillons des chaînes de valeur.

L’expertise québécoise, qui s’étend de la formation jusqu’à la certification est particulièrement admirée, tout comme la créativité générale de la communauté aérospatiale.

Faut-il le rappeler, l’aérospatiale, demeure au premier rang des exportations au Québec. Que nos forces soient connues à l’autre bout de la planète est un gage de la richesse de notre écosystème d’innovation.

Cette reconnaissance internationale rappelle toutefois l’importance de demeurer dans une posture d’amélioration continue.

La prégnance des technologies digitales en Corée, notamment la robotique et l’automatisation, fascine. Partout, les talents et les automates cohabitent, créant un environnement où l’innovation technologique est omniprésente. Le niveau élevé d’investissement public dans les infrastructures de recherche, les laboratoires et les équipements spécialisés est particulièrement surprenant.

Cependant, le caractère dirigiste des interventions publiques en Corée semble souvent procéder d’une lecture du marché assez étroite ou à très long terme, ce qui se traduit par un niveau de prise de risque public assez élevé.

Au Québec, l’outillage dont disposent les acteurs de l’innovation est somme toute plus modeste, mais plus flexible, permettant une agilité dans les arrangements selon les opportunités et les moyens en présence. Cette flexibilité est un atout majeur dans un monde en constante évolution.

Une question se pose alors: serait-il possible de conjuguer les avantages des deux systèmes d’innovation ? Cette possibilité mérite d’être explorée, car elle pourrait potentiellement conduire à un modèle d’innovation plus robuste et efficace.

Les entreprises québécoises manufacturières en aérospatiale accusent généralement un retard au niveau de l’adoption des technologies digitales face à leurs concurrents, partenaires, clients ou maisons-mères à l’étranger.

Ce retard peut se traduire, aujourd’hui ou dans le futur, par un déficit de productivité et de compétitivité, exacerbant au passage les enjeux de formation et d’accès à une main-d’œuvre spécialisée.

Paradoxalement, plusieurs solutions digitales développées au Québec, porteuses de valeur ajoutée, rencontrent une résistance importante au niveau de leur adoption malgré leur potentiel d’impact sur les modèles d’affaires.

Cette réticence s’explique en partie par le fait que, dans le contexte manufacturier, changer une façon de faire qui fonctionne, même si elle est sous-optimale, comporte de grands risques dans un univers ultra-compétitif aux ressources toujours limitées.

Pour répondre à cette situation, il serait judicieux d’inciter les entreprises manufacturières à adopter ces technologies digitales (logiciels, robotique, intelligence artificielle, optique, et autres) tout en les accompagnant dans leur effort de transformation.

Cette approche pourrait en outre permette d’établir des cas d’affaires solides pour les fournisseurs de solutions technologies, soutenant ainsi leurs objectifs de croissance et d’exportations.

En somme, il serait bénéfique de joindre les expertises québécoises en matière de génie, de technologie avec celles en gestion en ayant pour principe premier l’augmentation du potentiel de chaque travailleur en aérospatiale. On imagine ici niveau inédit de collaboration.

Le renouvellement du cadre de politiques en innovation au Québec offre une occasion propice à la mise en œuvre de cette idée. 

L’excellence en recherche, la création d’un environnement favorable à l’innovation, le soutien aux investissements en entreprise et la commercialisation des innovations sont tous des objectifs louables et pertinents.

En s’inspirant des meilleures pratiques observées en Corée tout en exploitant les forces existantes du Québec, il est possible d’envisager un nouvel arrangement des outils et expertises disponibles pour renforcer l’écosystème d’innovation québécois.

Cette approche pourrait non seulement aider à combler un certain retard sur le plan de l’intégration des technologies numériques, mais aussi de renforcer le positionnement du Québec comme un leader mondial en matière d’innovation, particulièrement dans le domaine aérospatial.

Osons l’innovation en innovation!