Rien ne doit freiner la transition

Offert par Les Affaires


Édition du 25 Novembre 2020

Rien ne doit freiner la transition

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Édition du 25 Novembre 2020

Par Katia Tobar

(Photo: 123RF)

TRANSITION ÉCOLOGIE. Une grave récession mondiale a beau nous menacer depuis le début de la pandémie, verdir l’économie semble demeurer une priorité, à ­Québec comme à ­Ottawa. La ministre des ­Finances du ­Canada, ­Chrystia ­Freeland, a d’ailleurs défendu, lors d’allocutions au ­Forum mondial de ­Toronto et à la ­Chambre de commerce du ­Montréal métropolitain, la nécessité pour son gouvernement d’entreprendre des « investissements significatifs » et d’« établir les fondements d’une économie verte ».

Chrystia ­Freeland soutient qu’en dépit d’un déficit budgétaire de plus de 343 milliards de dollars (G$) pour l’année fiscale 2020‑2021, la « solidité financière relative » du ­Canada lui laisse une certaine marge de manœuvre.

Une vision que partage Éric ­Pineault, professeur de sociologie et membre de l’Institut des sciences de l’environnement de l’Université du ­Québec à ­Montréal (UQAM). « ­Le ­Canada peut tolérer un endettement plus élevé », ­assure-t-il en précisant que « la relance doit passer par un investissement public significatif, et c’est là que le ­Canada pourra agir pour la transition ».

Et il y a urgence. Si l’on s’attarde aux engagements pris dans le cadre de l’Accord de ­Paris, le ­Canada fait piètre figure. Ainsi, selon un rapport d’Environnement et changement climatique ­Canada (ECCC), le pays émettait quasiment autant de gaz à effet de serre (GES) en 2005 qu’en 2018, soit 730 mégatonnes (Mt) d’équivalent ­CO2 en 2005 contre 729 mégatonnes en 2018. Nous sommes loin de l’objectif de réduire nos émissions de ­GES de 30 % d’ici 2030.

Recommandations

Le ­Groupe de travail pour une reprise économique résiliente a présenté, en septembre dernier, cinq recommandations au gouvernement fédéral. Les mettre en œuvre nécessiterait un investissement de 55,4 G$ sur cinq ans.

« ­La question, c’est où ­doit-on investir, et non ­est-ce qu’on doit investir. Je crois fermement que ce serait une occasion perdue que de faire des investissements importants qui pourraient empirer la crise climatique », explique l’un de ses membres, ­Philippe ­Dunsky, président de ­Dunsky ­Energy ­Consulting, une ­firme-conseil en énergie renouvelable basée à ­Montréal.

Piloté par ­Richard ­Florizone, président de l’International ­Institute for ­Sustainable ­Development, le ­Groupe de travail pour une reprise économique résiliente est composé de 15 ­Canadiens évoluant dans les milieux des affaires et de la politique. Parmi eux, ­Gerald ­Butts, ancien conseiller principal du premier ministre ­Justin ­Trudeau, et ­Michael ­Horgan, mentor au sein de la ­Fondation ­Pierre ­Elliott ­Trudeau et ancien ­sous-ministre sous les gouvernements de ­Paul ­Martin (Affaires autochtones) et de ­Stephen ­Harper (Environnement et ­Finances).

Le ­Groupe de travail propose à ­Ottawa d’« investir dans des bâtiments résilients au climat et écoénergétiques » à hauteur de 49 % de l’investissement total, d’« augmenter la production et l’adoption de véhicules zéro émission (VZE) », « d’accélérer la croissance des secteurs de l’énergie propre », d’« investir dans la nature » et d’« accroître la compétitivité et les emplois propres ».

La ­porte-parole d’ECCC, ­Chelsea ­Steacy, a affirmé à Les ­Affaires que le ministère examinait ce rapport, qualifié d’« opportun ». De grandes lignes se retrouvent par ailleurs dans le dernier discours du ­Trône, prononcé le 23 septembre. En matière de bâtiment, entre autres, où le gouvernement fédéral a affirmé prévoir « créer des milliers d’emplois dans la rénovation de maisons et d’immeubles, ce qui permettra de réduire la facture énergétique des familles et des entreprises canadiennes ».

En 2018, le bâtiment était le troisième plus important secteur émetteur de ­GES, avec 92,5 Mt d’équivalent ­CO2, après le secteur des transports (185,9 Mt d’équivalent ­CO2) et l’exploitation pétrolière et gazière (193,2 Mt d’équivalent ­CO2).

De l’électricité dans l’air

Le rapport du ­Groupe de travail pour une reprise économique résiliente cite entre autres l’agence spécialisée dans l’étude des marchés financiers ­Bloomberg ­New ­Energy ­Finance, qui estime que « le véhicule à moteur à combustion interne a atteint son pic de ventes en 2015 et sera dépassé par les ventes de ­VZE dans le monde entier d’ici 2035 ».

Pour ­Marc ­Bédard, président et fondateur de l’entreprise de ­VZE ­Lion Électrique, à ­Saint-Jérôme, l’électrification des transports « devrait être à la base du plan de relance du gouvernement fédéral ». Afin de développer l’industrie au pays, il pense qu’il est essentiel qu’Ottawa légifère. En s’inspirant notamment des règlements novateurs adoptés en ­Californie. 

Le dernier en date : l’Advanced ­Clean ­Truck, qui incite à l’acquisition de camions électriques, forçant ainsi les constructeurs à s’adapter.

Quant à l’arrêt de l’exploitation des hydrocarbures, Éric ­Pineault assure que « c’est ce qu’un gouvernement responsable devrait faire ». Une décision qui pourrait bien créer des tensions avec les provinces dépendantes du pétrole et du gaz.

En ­Alberta, l’avenir économique pourrait ­peut-être reposer sur l’hydrogène. « ­Avec leur industrie de pétrochimie, ils ont le ­savoir-faire pour relever ce défi », souligne ­Philippe ­Dunsky. En effet, si l’hydrogène du ­Québec est qualifié de « vert », car il est produit avec une énergie zéro émission – l’hydroélectricité –, celui d’Alberta est produit à partir de combustibles fossiles. Pour qu’il puisse se qualifier de « bleu », donc de sobre en carbone, il faut réussir à capter et à séquestrer le carbone issu de la transformation. « C’est une étape importante à franchir, admet le président de ­Dunsky ­Energy ­Consulting, mais si l’Alberta veut faire partie de la solution, elle le peut. »

Rappelons que la ­France, l’Allemagne, l’Australie, le ­Japon et la ­Corée du ­Sud ont aussi annoncé des plans de relance économique verte. Même la ­Chine a annoncé vouloir atteindre la neutralité carbone d’ici 2060.

Comme l’a rappelé la secrétaire exécutive de la ­Convention-cadre des ­Nations unies sur les changements climatiques, ­Patricia ­Espinosa, lors d’une conférence organisée par le ­Conseil des relations internationales de ­Montréal, « le changement climatique est là et affecte déjà de nombreuses communautés […] ­Si on n’agit pas maintenant, il sera trop tard ».

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