Recherche investissements désespérément

Publié le 04/11/2016 à 17:55

Recherche investissements désespérément

Publié le 04/11/2016 à 17:55

Le Québec ne comble pas son retard de compétitivité avec ses concurrents dans le secteur manufacturier. Au contraire, il le creuse, en raison d’investissements anémiques en équipements et dans le numérique. Le réveil pourrait être brutal.

Lorsque DICI Industries est racheté par Trinity Aerospace et Altitude Aerospace, en 2013, elle accède à de nouveaux segments de marché. L’entreprise montréalaise spécialisée en machinage et assemblage de précision fournissait surtout le secteur des télécommunications et un peu la défense. Voilà que s’ajoutent ceux de l’aérospatiale et du médical.

« Nous avions besoin d’équipements plus sophistiqués pour réaliser les pièces complexes demandées par nos clients en aérospatiale », explique le président Kofi Bannerman-Maxwell. Depuis 2014, l’entreprise a notamment acquis deux machines 5 axes, en plus d’implanter un progiciel de gestion intégrée (ERP). Au total, elle a investi plus de 1,5 M$ en équipement.

« C’est un défi de le faire en maintenant la cadence de production, admet le président. Il y a une courbe d’apprentissage avant de tirer tous les avantages de ces changements. Il faut former les employés. Il faut aussi les convaincre des bénéfices que peut nous apporter le ERP, et leur montrer à bien l’utiliser. L’ERP change notre manière de travailler. Tout le monde comprend que son travail affecte celui des autres, donc on travaille moins en silos. »

Il n’a pas hésité à s’appuyer sur des consultants, lesquels ont organisé des « change labs » pour l’entreprise. Ses efforts ont notamment été récompensés par l’obtention du label MACH 3 d’Aéro Montréal. Ce label constitue une excellente carte de visite auprès des donneurs d’ordre, et a grandement aidé à augmenter la productivité de l’entreprise, selon M. Bannerman-Maxwell.

Un fossé se creuse

L’exemple de DICI Industries demeure malheureusement trop rare dans le secteur manufacturier québécois. Selon Manufacturiers et Exportateurs du Québec (MEQ), les PME québécoises investissent annuellement 5 500 $ par travailleur en machinerie, contre 7 600 $ en Ontario. En 2014, elles ont dépensé 2,5 M$ en modernisation et équipements, contre 4,5 M$ en Ontario.

Et rien ne laisse prévoir une nouvelle vigueur. Le baromètre industriel 2016 de Sous-traitance industrielle Québec (STIQ) démontre que seulement 26 % des entreprises ont investi plus de 5 % de leur chiffres d’affaires en achat d’équipement en 2015, et seulement 13 % ont investi plus de 2 % de leur chiffres d’affaires en TIC.

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La productivité est à l’avenant. Au Québec, elle augmente annuellement de 1 %, deux fois moins qu’au Canada, quatre fois moins qu’aux États-Unis et plus de cinq fois moins que dans certains pays émergents ou scandinaves.

« Pourtant, le lien entre les investissements dans l’équipement et la performance n’est plus à faire », déplore Richard Blanchet, pdg du STIQ. Le baromètre du STIQ démontre qu’un investissement de plus de 5 % du chiffre d’affaires augmente ce dernier d’au moins 5 % dans 66 % des cas, et de plus de 20 % dans 22 % des cas. Pour un investissement dans les TIC, 70 % des entreprises voient leur chiffre d’affaires augmenter d’au moins 5 %.

Compétitivité menacée

Véronique Proulx, vice-présidente, affaires corporatives et stratégie à MEQ, est déçue que peu de manufacturiers d’ici aient profité de la force du dollar canadien pendant quelques années pour investir massivement dans leurs équipements.

« Ce sous-investissement menace la compétitivité de nos entreprises à l’échelle locale comme internationale, prévient-elle. Or, le Canada a présentement 51 ententes de libre-échange en vigueur ou en négociation. C’est ça le contexte. Si on exporte, il faut être concurrentiel pour s’imposer sur de nouveaux marchés. Même si on ne vend qu’au Québec, on doit affronter des concurrents très productifs venus de l’étranger. »

Selon François Gingras, directeur équipements et productivité au Centre industriel de recherche du Québec (CRIQ), les entrepreneurs voient souvent davantage les coûts et les freins liés aux investissements que les bénéfices.

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Les dirigeants s’inquiètent également du financement de cette modernisation ou des difficultés de l’implantation. Cependant, ils sous-estiment le prix de l’immobilisme.

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Confort illusoire

« Les industriels calculent aisément les coûts liés à la maintenance préventive, mais pas ceux provenant du manque de productivité des équipements désuets, souligne-t-il. Il ne faut pas juste calculer les pertes engendrées par les bris qui stoppent la production. Il faut aussi tenir compte des moments où une machine fonctionne, mais fait un piètre produit, lequel échouera les contrôles de qualité. Il faudra le remplacer, le recycler ou le retravailler. Il y a aussi des machines désuètes tournant au ralenti. Tout cela a un coût, que les entrepreneurs tendent à sous-estimer. »

Ce danger menace une catégorie bien précise d’entreprises, toujours selon lui. Une minorité de PME sont des enthousiastes de la technologie et adoptent les nouveautés très rapidement. D’autres n’ont simplement plus le choix, elles doivent investir, sinon elles devront soit fermer, soit se délocaliser. Entre les deux, il y a toute une tranche d’entreprises vivant confortablement dans le statu quo et ne ressentant pas le besoin d’investir.

« Ce confort est un piège dangereux, prévient François Gingras. C’est une illusion, qui peut placer une PME dans une position très désavantageuse par rapport aux concurrents, et éventuellement menacer sa survie. Il faut voir plus loin. »

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