L'art de donner pour donner


Édition du 11 Novembre 2020

L'art de donner pour donner


Édition du 11 Novembre 2020

Par Philippe Jean Poirier

(Photo: 123RF)

PHILANTHROPIE. La pandémie a forcé l’annulation d’un grand nombre d’événements caritatifs, incluant des bals, des tournois de golf, des ­spectacles-bénéfice et d’autres activités de réseautage visant à collecter des fonds pour une cause. Certains spécialistes de la philanthropie se demandent si ce n’est pas l’occasion de réévaluer l’importance que l’on accorde à ce genre d’événement qui, en fin de compte, crée peu d’attachement envers les causes.

« ­Les participants sont des acheteurs d’événement, fait remarquer ­Daniel H. Lanteigne, consultant en philanthropie et en ressources humaines chez ­BNP ­Performance philanthropique et ­CFRE (­Certified ­Fund ­Raising ­Executive). Les ­événements-bénéfice créent des moments plaisants, permettent de faire du réseautage et répondent à beaucoup de besoins. Toutefois, ils n’alimentent pas une relation à long terme. » ­Ainsi, poursuit le président désigné de l’Association des professionnels en philanthropie – section du ­Québec, ces événements « ne transforment pas les participants en donateurs récurrents ».

Wendy ­Reid, professeure agrégée au ­Département de management de ­HEC ­Montréal et auteure de l’étude Repenser la philanthropie culturelle à ­Montréal : les relations et la communauté, fait un constat similaire. « ­Dans ce genre d’événement, la connexion avec l’art est indirecte et, donc, n’est pas liée à la mission de l’organisme. Aussi, à part certains événements de grande envergure, il est difficile de faire de l’argent de cette façon, surtout si on comptabilise les salaires des employés qui travaillent à planifier ce type d’activité. »

 

Mettre en contact

Les organismes de bienfaisance ont donc de bonnes raisons de réduire leur dépendance envers ces événements. Comment y parvenir ? ­Daniel H. Lanteigne invite les organismes « à vivre de réelles collaborations et partenariats » avec leurs donateurs. « ­Une bonne pratique à cet égard est d’inviter les donateurs réguliers à visiter l’organisme, ­illustre-t-il. Ça ne coûte rien, et c’est aussi une forme de reddition de comptes : le donateur voit l’impact de sa contribution. » Maggie ­Borowiec, directrice du développement philanthropique et des communications à ­Moisson ­Montréal, acquiesce à ce conseil.

La banque alimentaire qu’elle représente va d’ailleurs un pas plus loin en invitant les entreprises qui cherchent un partenaire en responsabilité sociale à se porter volontaire pour trier les denrées dans son entrepôt. « C’est vraiment très beau de voir les gens en action. Des équipes se donnent des défis pour savoir qui remplira la palette le plus vite », souligne ­Maggie ­Borowiec.

Moisson ­Montréal fait partie des organismes qui ont pensé à développer des stratégies philanthropiques diversifiées. La part de dons provenant des événements et des campagnes représente 30 % de la somme totale, alors que les dons directs d’individus, d’organismes et de fondations représentent 53 %. « ­La meilleure façon de fidéliser les donateurs, c’est de leur faire prendre conscience de l’impact de leur don, explique la directrice. Dans notre cas, on leur explique que, pour un dollar donné, on distribue une valeur de 15 $ en denrées. »

 

Relation personnalisée

Danielle ­Champagne, directrice générale de la ­Fondation du ­Musée des ­beaux-arts de ­Montréal (MBAM), est la première à admettre que l’institution culturelle a déjà été très dépendante de ses ­événements-bénéfice. « ­Nous avons revu la stratégie philanthropique de la ­Fondation ; nous avons maximisé nos campagnes annuelles et créé des cercles philanthropiques, ­précise-t-elle. Aujourd’hui, je peux dire que nous sommes beaucoup moins vulnérables à cet égard qu’il y a cinq ans. »

Le ­MBAM a effectivement créé sept cercles philanthropiques pour atteindre différents profils de donateurs, que ce soit par groupes d’âge ou par sexe. « ­Les membres d’un cercle sont invités à des ­avant-premières, des conférences ou des activités de reconnaissance visant à nourrir leur intérêt pour l’art », explique ­Danielle ­Champagne.

Ainsi, les membres du cercle ­Forces ­Femmes ont récemment été invitées à une visite virtuelle de l’exposition « ­Paris au temps du postmodernisme ». La commissaire ­Mary-Dailey ­Desmarais a fait des liens entre les conditions de création des femmes artistes de l’époque de celles d’aujourd’hui, en mettant l’accent sur le rôle du ­Cercle pour appuyer la création féminine actuelle. « ­Quatre cents personnes se sont inscrites à l’événement, ce qui atteint notre fréquentation normale en personne », se félicite ­Danielle ­Champagne.

Plus largement, l’objectif des organismes culturels demeure de faire progresser les donateurs dans la « pyramide » de l’engagement, en les amenant toujours plus près de leur mission. « ­On veut amener une personne qui achète un billet pour la première fois à considérer l’achat d’un abonnement, puis la participation à un cercle philanthropique, puis l’octroi d’un don plus substantiel et ainsi de suite », explique ­Wendy ­Reid.

Pour y parvenir, les organismes doivent apprendre à connaître intimement leurs donateurs. Les responsables des institutions culturelles ne doivent donc pas hésiter à prendre le téléphone et à appeler leurs plus fidèles supporteurs pour les remercier d’un don, s’enquérir de leurs goûts culturels ou pour solliciter une contribution supplémentaire.

 

 

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