Le monopole sur la distribution des spiritueux limite-t-il la créativité derrière le bar?


Édition du 15 Juin 2022

Le monopole sur la distribution des spiritueux limite-t-il la créativité derrière le bar?


Édition du 15 Juin 2022

Les établissements doivent opérer malgré des problèmes d'approvisionnement de la SAQ. (Photo: 123RF)

INDUSTRIE DES ALCOOLS DU QUÉBEC. Vins orange et biodynamiques, saké ou liqueurs d’agave : l’engouement pour ces produits alcoolisés a été moussé tant par les agences de vins et de spiritueux que par les restaurateurs avant de séduire les acheteurs de la Société des alcools du Québec (SAQ). Le modèle monopolistique provincial impose-t-il des limites à la créativité derrière le bar ? Les Affaires en a discuté avec des gens qui font les tendances… ainsi que le pont avec la SAQ. 

Toutes les provinces canadiennes, exception faite de l’Alberta, exercent un monopole sur la distribution des spiritueux. Ce contexte, doublé des aléas du commerce interprovincial, fait en sorte que les spiritueux du rest of Canada (ROC) demeurent relativement peu accessibles au Québec. Et vice versa.  

«Il y a énormément de produits qui sont faits ailleurs au Canada qu’on ne verra jamais ici, à part s’ils sont représentés par une agence internationale », constate Kate Boushel, directrice des boissons et de l’éducation au sein du groupe Barroco, qui regroupe le Barroco, le Foiegwa, l’Atwater Cocktail Club, le Fugazzi et le Milky Way.

Celle qui est en lice pour le titre de « bartender de l’année » aux prestigieux Spirited Awards met tout de même un peu d’eau dans son vin : la même chose a lieu en Ontario ou à Vancouver, où les établissements ont « de la difficulté à avoir des produits du Québec ».

 

Disponibilité discontinue

Kate Boushel note que les stratégies de mise en marché déterminées par la SAQ — autant pour les produits du Québec, du ROC ou d’outre-mer — peuvent aussi être frustrantes. Elle cite les produits de Menaud, désormais uniquement disponibles à la distillerie de Charlevoix où elle ne peut s’approvisionner à titre de restauratrice. Ou le Xérès, vin d’Espagne muté à l’eau-de-vie, que « les bartenders et sommeliers du Québec s’arrachent ».

«Ça disparaît des tablettes en deux secondes ! J’ai cinq cartes cocktails que je dois continuellement changer parce qu’on a des produits qui disparaissent pour une période inconnue et totalement aléatoire. On dirait que les acheteurs [de la SAQ] ont de la difficulté à suivre ce que les Québécois veulent, parce qu’ils restent assis sur de vieux préceptes », souligne-t-elle, décriant leur manque d’audace.

Au-delà des casse-têtes de la gestion quotidienne des stocks — livraison incertaine, espace de stockage restreint, instabilité de l’approvisionnement, perte d’ingrédients périssables, multiplication des allers-retours à la SAQ pour compléter les commandes — la femme d’affaires se dit tout de même consciente des pénuries (le verre, notamment) et autres défis d’approvisionnement mondiaux occasionnés par la pandémie.

 

Agents à la rescousse

Kate Boushel souligne pouvoir compter sur l’aide la vingtaine d’agents avec qui elle collabore régulièrement pour élaborer ou modifier ses cartes, « incontournables et essentiels dans l’industrie ». « Ils nous permettent de rester à l’affut et de déguster avant d’acheter, précise-t-elle. Ils nous aident à établir des partenariats, par exemple pour imprimer des menus. C’est très important dans une industrie où la marge de profit est minime : dans les restaurants et les bars, si tu fais 8 % de profit annuel, tu es chanceux. »

«Découvreur, passionné, à l’affut des tendances. » Ce sont les mots qu’utilise la directrice générale d’A3 Québec, Catherine Lessard, pour décrire le rôle de l’agent, ultime représentant des producteurs auprès de la SAQ. Celle qui représente 78 des agences ayant pignon sur rue au Québec parle aussi « d’éducation et d’inspiration ».

 «Les agents deviennent des créateurs de contenus qui inspirent les consommateurs, avance-t-elle. Tout l’écosystème — SAQ, restauration, agents, sommeliers — est très effervescent au Québec et ça contribue vraiment à faire découvrir plein de trucs. » Elle qualifie toutefois le modèle de la SAQ de « gros labyrinthe » parfois « très compliqué ».  

«Plusieurs agences se développent pour assurer une présence partout au Canada. Il y a aussi les produits québécois qui veulent se faire connaître ailleurs au pays. Les agents sont également là pour les aider », fait valoir Catherine Lessard, en mentionnant que d’autres se concentrent sur les petits lots et les exclusivités que cherchent certains restaurateurs.

Elle parle d’ailleurs de la démocratisation du rôle de l’agent au cours de la dernière décennie. « Les gens vont chercher à savoir qui l’agent derrière une carte des vins. Je le vois aussi dans les succursales et en restauration : on voit les pastilles, le petit logo des agents qui sont collés dessus, ça devient un gage de valeur pour certains consommateurs, note-t-elle. C’est un monde qui était fermé sur lui-même avant, mais qu’on apprend à découvrir de plus en plus. »

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