La nouvelle routine des cabinets

Offert par Les Affaires


Édition du 11 Mai 2022

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Édition du 11 Mai 2022

La pandémie a marqué une nette baisse des activités de réseautage, qui permettaient autrefois de démarcher de nouveaux clients et d’approfondir des relations. (Photo: 123RF)

GRANDS DU DROIT. Après plus de deux ans et demi de télétravail plus ou moins forcé, de comparutions virtuelles et d’impossibilité d’organiser des rencontres en personne, les cabinets d’avocats continuent d’adapter leur organisation du travail. 

Le coup d’arrêt brutal de mars 2020 a poussé les firmes à se réorganiser dans l’urgence pour respecter les consignes sanitaires et protéger leurs employés et leurs clients. Aujourd’hui, elles naviguent dans une nouvelle normalité qui reste un peu floue. « Nos réflexions pour trouver une structure de travail optimale à la fois pour le cabinet, ses professionnels et ses clients se poursuivent et il n’y a pas encore de réponses claires et définitives », a reconnu ce printemps Me Gina Doucet, associée directrice nationale de Cain Lamarre.

La firme compte 15 établissements dans 8 régions administratives. Comme la pandémie n’a pas sévi partout de la même manière, le bouleversement des pratiques n’y a pas non plus été le même. « Nous n’avons pas tenté de dicter des solutions identiques dans tous nos bureaux », souligne l’avocate. 

Des habitudes se sont rapidement imposées, la flexibilité et le télétravail en premier lieu. Mais l’ancrage territorial reste important pour Cain Lamarre. D’ailleurs, le cabinet permet dorénavant à ses stagiaires étudiants d’expérimenter le travail dans différents bureaux, à condition qu’ils acceptent d’aller habiter dans ces régions pendant quelques semaines. « Les jeunes peuvent ainsi s’imprégner de notre culture de synergie interrégionale et découvrir de nouveaux milieux de vie, ce qui pourrait favoriser le recrutement dans les régions », explique Me Doucet. 

 

Coup dur au réseautage

Les derniers mois ont montré qu’il vaut mieux se garder d’espérer une résurrection du monde d’avant. « Nous avions mis en application notre politique officielle de rentrée partielle au bureau à l’automne 2021 et nous avons vécu quelque chose qui ressemblait à une après-pandémie, puis il y a eu l’éclosion d’Omicron en décembre et le retour du télétravail obligatoire », raconte Me Normand Therrien, président et chef de la direction de Therrien Couture Joli-Cœur (TCJ).

Avec la fin du télétravail imposé, TCJ a recommencé à exiger une présence au bureau au moins deux jours par semaine, ce qui pose certains défis. « La plupart des gens voudraient demeurer à la maison les lundis et les vendredis, donc les locaux seraient bondés les trois autres jours, illustre Me Therrien. Mais on ne peut pas garder des espaces de bureaux qui restent vides la moitié du temps, ça devient onéreux pour l’entreprise. » Les gestionnaires doivent aussi harmoniser les horaires de travail des avocats avec celui du personnel administratif.

La pandémie a par ailleurs marqué une nette baisse des activités de réseautage, qui permettaient autrefois de démarcher de nouveaux clients et d’approfondir des relations. « Quand les gens travaillent chez eux, ils ont moins envie de se rendre à un 5 à 7 à la fin de la journée ou de se lever le matin pour aller jouer au golf, note Me Therrien. C’est vraiment quelque chose qui reste à réinventer. »

 

Apprendre à reconnecter

Les cabinets cherchent donc à recréer des occasions de tisser des liens entre les professionnels. « Le télétravail ne pose pas d’enjeux de productivité ; le défi se trouve plutôt du côté de la connexion entre les employés et de l’intégration et de la formation des nouveaux », souligne Me Philippe Johnson, associé directeur du bureau de Montréal de Davies Ward Phillips & Vineberg. 

« Nous ne devons pas croire que ça se fera tout seul, renchérit Me Nanci Ship, cheffe des talents juridiques et de la culture du cabinet. Nous devons créer des occasions formelles et informelles pour que nos gens se côtoient. » Cela va de collations au bureau pour favoriser les échanges à l’organisation de repas au restaurant entre les jeunes et leurs mentors, en passant par des formations ou la remise en personne de matériel informatique qui aurait pu être livré à domicile. 

La plus grande différence se situe dans l’ampleur des évènements. « Pour rester prudents, nous essayons de garder les rencontres d’envergure modeste. Il n’est pas question de rassembler 40 professionnels dans une petite salle », reconnaît Me Ship. 

Davies a aussi modifié son programme d’intégration des nouveaux employés en ajoutant un parrain ou une marraine, en plus des mentors. « Avant, les gens travaillaient au bureau et apprenaient beaucoup en regardant les autres, précise Me Ship. Nous devons dorénavant communiquer nos attentes plus explicitement. Plutôt que de procéder à une évaluation semi-annuelle, les jeunes professionnels peuvent maintenant obtenir une rencontre de rétroaction aux six semaines. »  

Me Johnson soutient que le cabinet approche ces changements avec beaucoup d’humilité, en se donnant le droit à l’erreur. « La pandémie nous force à réfléchir à nos pratiques et à nous améliorer, et c’est ce que nous nous efforçons de faire », conclut-il.

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