Fusions et acquisitions: vers une année record

Offert par Les Affaires


Édition du 16 Septembre 2017

Fusions et acquisitions: vers une année record

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Édition du 16 Septembre 2017

Eddyfi a réalisé deux acquisitions en Angleterre «Nous sommes passés d'un chiffre d'affaires de 1 M$ en 2010 à 25 M$ en 2016, ce qui aurait été impossible en nous reposant uniquement sur la croissance interne», fait valoir son dirigeant, Martin Thériault.

DOSSIER FUSIONS ET ACQUISITIONS Après quelques années de stabilité, le secteur des fusions-acquisitions (F&A) est-il en recrudescence au pays? C'est ce que laissent penser les premières tendances, alors que le nombre de transactions a bondi depuis le début de l'année. Le marché des PME semble particulièrement dynamique dans différents secteurs d'activité.

Couche-Tard, Cogeco, SNC Lavalin, Camso... Les exemples d'acquisitions n'ont pas manqué au cours des derniers mois au pays. «Le marché est en recrudescence après deux années qui ont été plus tranquilles en raison de la baisse des cours du pétrole», constate Guillaume Lavoie, associé du bureau de Montréal chez Lavery.

Même tendance constatée chez PwC, où Nicolas Marcoux, associé directeur national, bureau de Montréal, grandes villes et conseils et transactions, juge que 2017 s'annonce «une année record», que ce soit sur le marché canadien ou sur le marché québécois.

Selon les données du cabinet Blakes, les opérations canadiennes annoncées depuis le début de l'année au Canada s'élèveraient déjà à 112 milliards de dollars(G$), comparativement à 179G$ pour l'ensemble de l'année 2016. Le Québec représenterait 5G$ sur la même période, par rapport à 20G$ l'année précédente.

«Les motivations pour faire des acquisitions sont là et il n'y a pas d'indication que cela va disparaître», affirme Louis Hébert, professeur de stratégie à HEC Montréal, qui note qu'en l'espace d'une génération «les fusions-acquisitions sont passées d'une option à un passage obligé pour les entrepreneurs».

«Même si la plupart des entreprises recherchent avant tout la croissance par la voie interne, beaucoup l'obtiennent aussi par l'entremise de F&A», dit Janie Béïque, vice-présidente principale aux Industries du Fonds de solidarité FTQ, qui remarque elle aussi une hausse du nombre des transactions sur les cinq dernières années, avec une augmentation du nombre d'acteurs canadiens qui envisagent les transactions à l'étranger.

Le tout grâce à une abondance de capitaux, avec la participation d'acteurs comme la FTQ, la Caisse de dépôt et placement du Québec, Investissement Québec ou le Fondaction, mais aussi de fonds de capital-investissement québécois et américains, couplés à des taux d'intérêt bas proposés par les banques.

Nicolas Marcoux signale aussi un phénomène très favorable: «On se trouve face à des baby-boomers qui arrivent à l'âge de la retraite et qui avaient retardé leur sortie en raison de la récession de 2008. Dans l'intervalle, ils ont mis le cap sur la croissance afin de léguer une entreprise plus rentable.»

Les PME montent en puissance

Si l'on parle souvent des grands groupes, «le secteur des PME s'avère particulièrement dynamique et attractif, ne serait-ce qu'en raison de leur nombre», estime Rios-Karim Mercier, associé de Cafa Financement Corporatif.

«On voit surtout des petites et moyennes entreprises dont la valeur est comprise entre 5 et 35 millions de dollars», analyse Eric Haggar, président d'Axxel, qui réalise en moyenne six transactions par an d'une valeur de 5 à 30 M$ pour le compte de ses clients. Des entrepreneurs en série chevronnés sont toujours présents : c'est le cas du Français Emmanuel Thieblin, qui a racheté en 2016 la chaîne de restaurants Sushi Taxi. Celle-ci compte aujourd'hui 18 succursales et 290 employés. «Je voulais trouver une entreprise à laquelle apporter de la valeur ajoutée et la faire grossir.»

Un exemple qui colle à une tendance de fond : «Les F&A sont l'un des moyens utilisés par les PME pour grandir», constate Louis Hébert. C'est le cas de l'entreprise québécoise Eddyfi, qui a réalisé cette année deux acquisitions en Angleterre. «Nous sommes passés d'un chiffre d'affaires de 1 M$ en 2010 à 25 M$ en 2016, ce qui aurait été impossible en nous reposant uniquement sur la croissance interne», fait valoir son dirigeant, Martin Thériault, qui souhaite poursuivre sur un rythme de deux acquisitions par année. «Cela nous permet de réaliser des synergies et d'atteindre une croissance et une taille qui nous apportent une crédibilité financière.» Quant à Premier Tech, c'est un acquéreur en série (30 acquisitions en 10 ans) qui utilise les acquisitions «pour entrer sur de nouveaux territoires et y vendre des produits ou pour acquérir des technologies complémentaires», explique Martin Noël, vice-président principal de Premier Tech, qui précise qu'un tiers de sa croissance est générée par les F&A.

Tous les secteurs touchés

D'après le consultant Brahm Elkin, président-fondateur du M&A Club Canada, l'ensemble des secteurs de l'économie est actif sur le marché. «On mentionne souvent l'agroalimentaire, où les activités de production sont très recherchées, en particulier dans le secteur des cleantechs et des greentechs.» On remarque aussi l'industrie, notamment le domaine manufacturier, où la concurrence accrue pousse les petits acteurs à se regrouper. Dans les transports, on observe également une consolidation, mais cette fois chez les acteurs de 100 M$ et plus. L'année a aussi été riche en transactions dans le domaine des nouvelles technologies, qui envahit tous les secteurs. «On voit des sociétés traditionnelles qui recherchent ces compétences», analyse Nicolas Marcoux. Selon lui, plusieurs lignes d'industrie seraient ainsi en passe de se croiser. Il en veut pour preuve le géant américain du numérique Amazon, qui vient de racheter le grossiste américain Whole Foods.

Ces transactions ont-elles en fin de compte un impact positif ou négatif sur l'emploi au sein de la province ? En l'absence de chiffres précis, les experts demeurent partagés. Pour Inès Gargouri, professeure de finance à l'ESG UQAM, il ne faut pas se cacher que «des licenciements sont souvent inéluctables afin d'éviter les redondances et de réduire les coûts». Toutefois, Karl Tabbakh, de McCarthy Tétrault, pense que c'est davantage à l'occasion des acquisitions stratégiques qu'on observe ces rationalisations. «Souvent, l'arrivée de capital-investisseurs ou de sponsors financiers n'a pas d'effet sur ce plan, car ils ont besoin de conserver les employés et le management pour assurer la gestion de l'entreprise», note-t-il.

«Un risque quant à l'emploi peut aussi exister lorsqu'une compagnie étrangère rachète une cible québécoise pour déménager sa technologie», ajoute Michel Magnan, professeur à l'École de gestion John-Molson de l'Université Concordia.

Cependant, il ne faut pas oublier qu'à l'inverse certaines transactions peuvent se révéler payantes à moyen terme... «C'est le cas des entreprises qui se développent et qui doublent de taille. Elles vont devoir engager des ressources à moyen terme», rappelle Yannick LeBel, du Groupe CFO Conseil.

Et si la réponse tenait aussi au contexte économique ? «Lorsque le PIB est en croissance, la plupart des sociétés cherchent à augmenter leurs parts de marché, à ouvrir des bureaux et à étendre leurs marques à de nouveaux créneaux», note Nicolas Marcoux. Au contraire, les périodes plus difficiles ouvriraient davantage la voie à des phénomènes de concentration et de fusions pour diminuer les coûts.

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