L'ADN entrepreneurial décortiqué


Édition du 05 Mai 2018

L'ADN entrepreneurial décortiqué


Édition du 05 Mai 2018

Par Matthieu Charest

Les traits qui ­sous-tendent l’intention d’entreprendre ne sont pas les mêmes que les qualités qui expliquent le succès en affaires. [Photo : 123RF]

Pour de nombreux investisseurs, la personnalité de l'entrepreneur est le plus grand facteur qui prédit son futur succès. Cependant, reconnaître ces traits de personnalité n'est pas toujours évident. Les Affaires présentent quelques trucs pour dénicher les perles rares.

Quiconque s'intéresse de près à l'entrepreneuriat l'a déjà entendu de la bouche des investisseurs : « Moi, j'investis d'abord dans l'entrepreneur. » La formule est plutôt jolie, quoique galvaudée. Parce que c'est bien beau d'investir dans l'humain plutôt que dans le produit ou le service, mais qu'est-ce que ça veut dire exactement ? Existe-t-il vraiment une spécificité, un « ADN entrepreneurial » qui qualifie des gens pour réussir en affaires et recevoir des investissements ?

Selon une recension exhaustive des recherches sur les traits de personnalité des entrepreneurs publiée par la Harvard Business School en 2017, les études sur le sujet ont commencé vers la moitié du 20e siècle. Résultat : les études se suivent, mais ne se ressemblent pas. « Ce qui n'est pas surprenant puisque les entrepreneurs sont un ensemble très hétérogène », remarquent les chercheurs. De plus, « la littérature sur le sujet ne montre pas clairement si les traits de personnalité attribués aux entrepreneurs se développent ou s'ils sont innés ». En fait, ce serait un heureux mélange des deux.

La partie innée

Selon Étienne St-Jean, professeur de management à l'UQTR et chercheur à l'Institut de recherche sur les PME, « de 40 % à 60 % de la vocation entrepreneuriale s'explique par la génétique ».

Il y aurait des traits de personnalité innés qui poussent certaines personnes à se lancer en affaires. « Le désir d'autonomie et d'indépendance, le besoin de se réaliser, le rapport au risque, l'orientation vers l'action, un bon degré de créativité, être "axé solutions", avoir confiance en soi », énumère Maripier Tremblay, professeure agrégée à l'Université Laval et titulaire de la Chaire de leadership en enseignement sur le développement de l'esprit d'entreprendre et l'entrepreneuriat, « sont des traits qui suggèrent qu'une personne va choisir l'entrepreneuriat ».

Mais attention, les traits qui sous-tendent l'intention d'entreprendre ne sont pas les mêmes que les qualités qui expliquent le succès en affaires. Là, c'est « la passion et l'engagement ainsi que le locus of control », c'est-à-dire croire que nous pouvons influencer notre environnement plutôt que l'inverse, « qui sont encore plus déterminants dans le succès », explique Mme Tremblay.

La partie acquise

À l'École d'entrepreneurship de Beauce, la directrice du centre de recherche Centre transfert et impact, Marie-Ève Proulx, vient de faire paraître un ouvrage qui analyse le parcours de 15 entrepreneurs de régions, de profils et d'industries différents, Intelligence et audace d'entrepreneurs : 15 parcours inspirants. Elle a remarqué que « peu importe leurs différences, ces entrepreneurs partagent des traits communs, notamment le courage, l'instinct, la persévérance et la résilience. Oui, il y a des traits de caractère innés, mais beaucoup de compétences s'acquièrent, dit-elle, en ajoutant que selon ses observations, les entrepreneurs apprennent beaucoup, et beaucoup mieux, au contact des expériences vécues par d'autres entrepreneurs ».

Les apprentissages, qui proviennent de la famille et de l'éducation, sont donc cruciaux dans le choix d'entreprendre et dans le taux de succès, suggère M. St-Jean. Évidemment, l'entrepreneur n'existe pas dans un vacuum; son environnement, son « degré de préparation et son talent de communicateur », est très important dans sa réussite, remarque Mme Tremblay.

« C'est étonnant à quel point nos entrepreneurs se connaissent mal, raconte Mme Proulx. Pourtant, quand ils déploient leurs forces et adoptent une vision claire, là, ils sont plus performants. »

L'exercice d'Anges Québec

Pour François Gilbert, PDG d'Anges Québec, « il n'y a aucun doute que c'est l'entrepreneur qui est le plus important quand vient le temps d'investir, surtout si l'entreprise est jeune. De bonnes idées, il y en a plein ! Cela dit, il n'y a pas vraiment d'outils afin de déterminer ce qu'est un bon entrepreneur. »

Afin de créer cet outil, Anges Québec travaille de concert avec l'Université Laval, notamment avec Mme Tremblay, afin de créer un projet-pilote. Ils ont d'abord sélectionné une soixantaine de critères, qu'ils ont ensuite réduit à une vingtaine, afin de comprendre ce que les investisseurs recherchaient chez un entrepreneur. Puis, ils ont réuni une vingtaine d'anges investisseurs pour classer ces critères en ordre d'importance. Résultat : les réponses différaient grandement d'une personne à l'autre. « Par exemple, l'aspect "capable d'être coaché" est primordial pour moi, raconte M. Gilbert, mais ce critère est arrivé en 8e position. »

Il ne faut pas non plus oublier que beaucoup d'entrepreneurs se présentent en équipe, dit le PDG d'Anges Québec. « Dans ce cas, il faut évaluer la capacité et les qualités de ceux qui se présentent devant toi, que ce soit un duo ou un trio. Par exemple, deux optimistes et un pessimiste, ça peut marcher. »

Comme quoi si les entrepreneurs sont des créatures hétérogènes aux traits innés et appris, les investisseurs le sont aussi. Il suffit dès lors de trouver la combinaison parfaite entre les deux. Mais là encore, en affaires comme en amour, un monde sépare les velléités de la réussite.

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