John Kay est professeur à la London School of Economics (LSE) et est chroniqueur au Financial Times. Il s’intéresse au phénomène de l’obliquité depuis plusieurs années et a résumé le fruit de ses réflexions dans le livre paru l’an dernier. Un ouvrage dans lequel on trouve quantité d’applications possibles en matière de management, à mon avis…
Ainsi, on nous a toujours appris que le chemin le plus court entre deux points, c’est la ligne droite, mais cet enseignement – vous l’avez sûrement remarqué – ne se vérifie pas dans notre quotidien, que ce soit pour se rendre quelque part ou pour prendre une décision. C’est même souvent commettre une erreur que d’agir de la sorte.
Dans Obliquity, M. Kay cite l’exemple d’un ami, Sir James Black, un prix Nobel de médecine, qui a fait fortune en agissant de façon oblique. Passionné de chimie, il a inventé deux médicaments, le propranolol et la cimétidine, qui ont permis aux compagnies pharmaceutiques qui les ont commercialisés d’engranger des profits faramineux, au milieu ddu XXe siècle. Idem, Henry Ford était passionné d’automobiles, et non pas obnubilé par l’argent : c’est en assouvissant sa passion qu’il a fait, obliquement, fortune. Sam Walton, le fondateur de Walmart, avait été marqué par la Grande Dépression, si bien qu’au sortir de la Seconde Guerre mondiale, il s’est dit qu’il fallait donner l’impression d’abondance, avec un grand choix de marchandises à bon prix, dans son petit magasin de Newport (Arkansas). Ou encore, Bill Gates ne pensait qu’ordinateur quand il s’est lancé dans l’aventure Microsoft, et n’avait pas pour objectif secret de devenir ainsi, un beau jour, l’homme le plus riche de la planète.
D’où un paradoxe des plus intéressants : les hommes les plus riches sont aujourd’hui ceux qui sont les moins matérialistes. Et les entreprises les plus profitables sont celles qui sont les moins orientées vers le profit.