Adoption d'Internet : pas juste une question d'accès aux TI

Publié le 24/05/2011 à 11:36, mis à jour le 10/09/2012 à 14:02

Adoption d'Internet : pas juste une question d'accès aux TI

Publié le 24/05/2011 à 11:36, mis à jour le 10/09/2012 à 14:02

Par lesaffaires.com

L’ouverture sur le monde favorise-t-elle l’adoption d’Internet ? Et ce plus spécifiquement, en Jordanie, un pays en profonde transformation tant sur le plan technologique que culturel. Voilà une question à laquelle une de mes étudiantes originaire du Moyen-Orient, Reem Ayouby, a répondu par une recherche portant sur le sujet.

Par Anne-Marie Croteau

Dans un premier temps, précisons que la censure jordanienne s’est amoindrie au cours des dernières années, ce qui permet à ce peuple de pouvoir entrer en contact avec d’autres cultures et de s’ouvrir davantage sur le monde. Le phénomène est tout de même assez récent. Notons également qu’au moment où l’étude a été réalisée à peine 10 % des Jordaniens utilisaient Internet. Des programmes sont toutefois en déploiement pour en favoriser l’adoption.

Imprégnée d’une nouvelle culture en tant qu’immigrante canadienne, Reem Ayouby a cherché à savoir si l’ouverture sur le monde pouvait avoir une influence sur l’adoption d’Internet dans une région relativement fermée sur le monde. Pour ce faire, elle s’est d’abord inspirée d’un concept développé à l’origine par Michel Laroche, professeur titulaire de la chaire Banque Royale à l’Université Concordia. Ce concept stipule que la culture d’un pays évolue en fonction du fait que ses habitants soient ou non exposés à d’autres cultures.

Premiers constats

Menée auprès de 307 participants, l’étude fait la preuve que plus un Jordanien est exposé à d’autres cultures plus il est susceptible d’adopter Internet. Cette recherche permet également de tracer un certain profil des individus les plus aptes à se brancher.

Ainsi, les résultats nous apprennent que les personnes ouvertes sur le monde – celles qui réunissent en tout ou en partie les conditions suivantes représentent un meilleur potentiel pour les fournisseurs de services Internet :

• Être capable de comprendre l’anglais;

• Avoir voyagé ou être entré en contact avec des étrangers;

• Avoir un esprit cosmopolite;

• Être exposé aux offensives en marketing des grandes marques internationales;

• Avoir accès aux médias de masse internationaux (ex. : magazines et séries télévisées provenant de l’étranger).

En parallèle, trois autres facteurs influencent aussi l’adoption des nouvelles technologies, et par conséquent d’Internet : la facilité d’utilisation; la perception que la technologie est utile et la pression sociale exercée par les pairs pour l’adopter ou la rejeter.

En croisant certains résultats, l’étude révèle également que la pression sociale joue un rôle bien moins important sur l’adoption d’Internet lorsque les utilisateurs potentiels témoignent d’une ouverture sur le monde. En d’autres mots, même si leur entourage discrédite Internet ou s’objecte à son utilisation, les candidats qui ont voyagé, qui parlent l’anglais et qui consomment d’autres cultures vont tout de même l’adopter.

D’autres croisements montrent aussi que plus un individu a de l’éducation et moins il est soumis aux pressions sociales. Ainsi, plus on est isolé dans une communauté fermée sur elle-même et rébarbative aux nouvelles technologies moins les conditions sont réunies pour nous amener à découvrir Internet.

Par extension, ces résultats signifient qu’ouvrir les frontières d’un pays peut influencer la culture d’un pays. À titre exemple, les étudiants jordaniens qui se sont exilés pour recevoir une éducation deviennent, à leur retour au pays, des agents qui peuvent influencer la population locale tant en matière d’utilisation des technologies que sur le plan culturel. Ils incitent leurs compatriotes à découvrir ces nouveaux outils.

Communiquer et se divertir d’abord

Ailleurs comme ici au Québec, certaines applications favorisent davantage l’adoption d’Internet. À ce chapitre, l’étude montre que les communications asynchrones (courriel, forums, réseaux sociaux, blogues, etc.); les communications synchrones (clavardage vidéo et texte, vidéoconférence, etc.) et le divertissement (jeux en ligne, YouTube, etc.) comptent parmi les activités qui stimulent le plus les Jordaniens à utiliser Internet. Les applications qui connaissent moins de popularité, à tout le moins pour effectuer ses premiers pas sur le Web, sont celles liées à l’éducation (eLearning) et au commerce en ligne. Une réalité que l’on a également observée en Amérique du Nord.

Autre phénomène intéressant : plus un individu est éduqué et plus il opte pour des applications complexes (commerce électronique, formation en ligne, etc.). Ce constat rappelle aussi les débuts d’Internet au Québec alors que l’offre francophone en matière d’achats en ligne était presque inexistante. Le fait de ne pouvoir acheter dans sa langue représentait à l’époque l’un des principaux freins à l’essor du commerce en ligne. À défaut de comprendre pleinement les conditions d’achat, bon nombre de Québécois préféraient s’abstenir.

Nouveaux savoirs pour décideurs québécois

En quoi, les conclusions de cette étude peuvent bénéficier aux décideurs québécois ? Primo, cette recherche fait la preuve qu’Internet permet aujourd’hui de rejoindre un nombre de plus en plus considérable d’internautes qui appartiennent à des cultures de plus en plus variées; d’entrer en communication avec des populations qui, pas plus tard qu’hier, étaient totalement fermées sur le monde et par ricochet, d’accéder à de nouveaux marchés. Ainsi, plus que jamais, posséder un site Web permet d’avoir une véritable vitrine sur le monde. Et ce monde, contrairement aux débuts d’Internet, dépasse aujourd’hui largement les frontières de l’Amérique.

Secundo, cette étude nous apprend également qu’un bassin de plus en grand de citoyens du monde s’intéressent à notre culture; ont envie d’en apprendre davantage; aspirent à la consommer; etc. En deux clics, ils peuvent regarder notre télévision; accéder à une information traitée selon notre point de vue; se divertir avec les jeux que l’on développe, etc.

Par extension, les résultats de cette recherche pourraient aussi être applicables à des phénomènes que l’on vit en région au Québec. À titre d’exemple, les jeunes qui vont étudier dans les grands centres deviennent souvent à leur retour des agents de changement. Ils ont envie de partager ce qu’ils ont appris, vu, goûter, etc.

En contrepartie, Internet nous donne de plus en plus accès à des cultures jadis réservées aux plus grands aventuriers. Dans le confort de leur foyer, les Québécois de partout en province peuvent désormais découvrir le monde; échanger sur de nouvelles pratiques; accéder à un nouveau savoir, etc. Ainsi, comme partout ailleurs sur la planète, le Québec subit les influences des autres cultures. Et ces nouvelles influences créeront indéniablement de nouvelles attentes auxquelles devront répondre les organisations québécoises.

*Anne-Marie Croteau est professeure agrégée à l'École de gestion John-Molson de l'Université Concordia. Elle est également membre du conseil d’administration et présidente du comité des technologies de l’information de la Société de l’assurance automobile du Québec (SAAQ).

La diffusion de ces résultats de recherche est rendue possible par une subvention octroyée par le Fonds de recherche sur la société et la culture (FQRSC) à Benoit Aubert (HEC Montréal), Bouchaib Bahli (Université de Rennes), François Bergeron (Télé-Université), Anne-Marie Croteau (Université Concordia) et Suzanne Rivard (HEC Montréal) dans le cadre d'un programme de recherche sur la Gestion stratégique des technologies de l'information.

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