Votre comptable peut vous empêcher de tomber involontairement dans l'écoblanchiment


Édition du 09 Novembre 2022

Votre comptable peut vous empêcher de tomber involontairement dans l'écoblanchiment


Édition du 09 Novembre 2022

Les entreprises veulent toutes se montrer sous leur visage le plus durable, mais plusieurs poussent la note jusqu’à tomber, volontairement ou non, dans l’écoblanchiment. (Photo: 123RF)

COMPTABILITÉ. Les entreprises veulent toutes se montrer sous leur visage le plus durable, mais plusieurs poussent la note jusqu’à tomber, volontairement ou non, dans l’écoblanchiment. Les CPA seront de plus en plus appelés à réduire les risques de sombrer dans ce piège.

Les scandales d’écoblanchiment n’ont pas manqué depuis dix ans. Des sociétés aussi prestigieuses que Volkswagen, IKEA, H&M et KLM s’y sont fait prendre. Plusieurs ont affronté des poursuites judiciaires et toutes ont vu leur réputation entachée. « Parfois, il s’agit de fraude, mais souvent, les problèmes provenaient d’un déficit de rigueur dans la collecte et la présentation d’informations ESG », souligne Vincent Cartier, associé aux services-conseils chez Raymond Chabot Grant Thornton (RCGT). 

Selon lui, les CPA sont bien placés pour amoindrir ces risques. « Ils peuvent à la fois s’assurer de la rigueur des processus de collecte et d’évaluation des données ESG et de la correspondance entre le discours ESG de l’entreprise et ce qu’elle fait réellement », poursuit-il.

 

Donner de la crédibilité

L’un des moyens d’éviter l’écoblanchiment consiste à soumettre ses données ESG à une vérification, comme on le fait avec les informations financières. On retrouve actuellement cette tendance surtout auprès des entreprises inscrites en Bourse, qui affrontent des exigences de plus en plus élevées de la part des actionnaires, des gestionnaires de portefeuille et des sociétés qui créent des indices boursiers. 

« Cela se fait sur une base volontaire et en suivant des normes très variables, mais d’ici quelques années, je crois que ça pourrait devenir obligatoire pour les entreprises cotées en Bourse », souligne Pierre Taillefer, associé et chef national des Services de consultation en développement durable de BDO Canada. Les CPA devront donc réaliser ces vérifications externes d’informations non financières. 

Pour l’instant, ils occupent surtout des fonctions de consultants pour appuyer la mise en place de programmes ESG qui couvrent plusieurs aspects, comme les émissions de gaz à effet de serre (GES), la gestion des déchets, l’utilisation de l’eau, la diversité, etc. « Le CPA aide à les instaurer, ainsi que les systèmes de gestion de données qui les accompagnent, résume Pierre Taillefer, et à contrôler la fiabilité de l’information. »

Pierre Taillefer, associé et chef national des Services de consultation en développement durable de BDO Canada (Photo: courtoisie)

Un regard externe 

Les CPA peuvent également appuyer les entreprises qui émettent des titres d’emprunt durable, comme des obligations vertes. Pour ces firmes, les conséquences d’un problème d’écoblanchiment peuvent être sévères aussi bien sur le plan financier que judiciaire et réputationnel. Les CPA peuvent notamment contribuer en offrant deux services d’examen externe : les « secondes opinions » et la certification par des tiers. 

Avant d’émettre un titre, l’entreprise peut demander à un CPA de s’assurer que son produit financier respecte les normes du marché, que ses cibles répondent aux attentes des acteurs du marché et que ses indicateurs de performance sont adéquats. C’est ce que l’on nomme la « seconde opinion ».

Quant à la certification externe — aussi appelée « mission d’assurance par un tiers » —, elle sert à évaluer l’affectation des fonds recueillis par ces emprunts à des projets verts ou sociétaux, ainsi que les effets prévus des instruments d’emprunt et la performance des projets financés par rapport aux objectifs et aux indicateurs de performance.

 

Des vérifications complexes 

La lutte contre l’écoblanchiment présente toutefois plusieurs défis aux CPA. Les normes de divulgation des données ESG, en grande partie non financières, sont moins bien établies que celles des données financières traditionnelles. Plusieurs cadres de divulgation et de normes coexistent. Heureusement, des efforts d’harmonisation se poursuivent, comme la création de l’International Sustainability Standards Board par la fondation américaine IFRS. 

Cet organisme, dont un des bureaux régionaux a pignon sur rue à Montréal, travaille à l’unification de deux cadres normatifs, soit le Climate Disclosure Standards Board et le Value Reporting Foundation, qui rassemble lui-même deux organismes travaillant à l’harmonisation des données extrafinancières. 

Pierre Taillefer rappelle que la divulgation ESG est très nouvelle et que les méthodes de vérification et la sélection des critères à vérifier restent en partie à établir. « Ces données demeurent beaucoup plus hétérogènes que les informations financières, souligne-t-il. Calculer les émissions de GES, évaluer le code d’éthique d’une entreprise, analyser les rapports de ses fournisseurs avec les communautés locales ou mesurer la diversité de sa gouvernance, c’est très différent. Il reste beaucoup d’ajustements à réaliser. »

L’Ordre des CPA du Québec appuie d’ailleurs la mise en place d’un conseil des normes internationales et d’un conseil des normes canadien, afin de démontrer de façon certifiée la fiabilité des informations fournies par les entreprises. « Un ensemble de normes comparables et cohérentes permettra aux entreprises de gagner la confiance du public, puisqu’on constatera plus de transparence concernant les initiatives liées à la durabilité », estime la PDG de l’Ordre, Geneviève Mottard.

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