Kilimanjaro Environnement : De l’huile alimentaire dans les moteurs

Publié le 18/11/2015 à 00:01

Kilimanjaro Environnement : De l’huile alimentaire dans les moteurs

Publié le 18/11/2015 à 00:01

Youssef Chaqor, fondateur et directeur général de Kilimanjaro rêve de faire rouler les bus casablancais avec du biocarburant.

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Par Aziza El Affas, L’Économiste (Maroc)

ÉCONOMIE CIRCULAIRE – Bien du chemin a été parcouru depuis la création de Kilimanjaro Environnement en 2008.

L’entreprise, spécialisée dans la collecte et la valorisation des huiles alimentaires usagées (HAU), ambitionne de traiter pas moins de 10 tonnes d’ici le 1er trimestre 2016 (contre 1,5 tonne aujourd’hui). Cette augmentation de la capacité de son unité établie à Casablanca, opérationnelle depuis trois ans, passe aussi par le doublement de ses effectifs (pour atteindre 150 salariés à la même échéance).

Le réseau de Kilimanjaro Environnement compte d’ores et déjà 2 500 points de collecte, ainsi que 8 bureaux régionaux dans plusieurs villes (Rabat, Marrakech, Fès, Agadir, Tanger, Oujda).

Ses agents sillonnent le pays pour collecter les huiles alimentaires usagées (qui seront valorisées en biocarburant) auprès des professionnels de la restauration, des collectivités locales et des industriels de l’agroalimentaire. Les huiles sont ensuite acheminées vers un centre de stockage régional puis transférées à l’unité de valorisation, pour intégrer la ligne de traitement et être valorisées en biodiesel.

Récupération porte-à-porte dans les foyers

L’entreprise cible essentiellement les CHR (cafés, hôtels restaurants) et compte parmi sa clientèle McDonald, Burger King, KFC, la Grillardière, Newrest, Accor, Afriquia, Total, etc. Mais elle veut aussi s’attaquer aux foyers. « Une opération pilote est aujourd’hui menée dans trois villes : Casablanca, Khouribga et Ben Guerir », assure Sheryn Ziani, responsable marketing et Grands Comptes auprès de Kilimanjaro Environnement. Avec une moyenne mensuelle de sept litres d’huile usée, les foyers recèlent un marché non négligeable dans une métropole comme Casablanca.

Maârif, 2 Mars et Sidi Maârouf sont les 3 quartiers casablancais ciblés dans un premier temps (55 000 foyers), avant de généraliser l’opération. Outre le porte-à-porte, des campagnes de sensibilisation sont menées aussi dans les rues, les écoles.

Le message se veut clair : la récupération des huiles usagées permet non seulement de réduire leurs effets néfastes sur l’environnement, mais aussi de préserver la santé des usagers. Sheryn Ziani rappelle qu’une part des huiles usagées est réinjectée dans le circuit informel pour finir dans des gargotes ou des snacks peu soucieux des risques encourus pour le consommateur.

« S’il est généralisé sur le Maroc, ce projet permettra de créer 2 000 postes d’emploi sur 5 ans, avec un revenu fixe mensuel de 3 500 à 6 500 DH (l’équivalent de 465 à 865 $ CA) », dit Sheryn Ziani. Les jeunes entrepreneurs seront encouragés à monter leur propre projet dans le cadre d’un système d’auto-entrepreneuriat. Pour sa part, Kilimanjaro assurera des actions de suivi, de formation ou encore de logistique.

Passer à l’échelle nationale

Mais l’entreprise vise plus gros. Elle vient de signer une convention de partenariat avec le ministère de l’Environnement du Maroc pour la mise en place de la filière de valorisation des huiles alimentaires usagées et corps gras au niveau national.

Des négociations sont également en cours avec la ville de Casablanca afin de conclure un partenariat public-privé (PPP) qui « devra contribuer à structurer et développer la filière, la collecte, la création de l’emploi, tout en réduisant les émissions de CO2 », souligne la responsable marketing.Avec une moyenne mensuelle de sept litres d’huile usée, les foyers recèlent un marché non négligeable dans une métropole comme Casablanca. À terme, ce PPP pourrait se traduire par une réduction des émissions de CO2 de 280 000 tonnes par an, soit 1 % de l’objectif exprimé dans le cadre des engagements pris par le Maroc pour la Cop 21. Autres avantages : éviter la pollution de la nappe phréatique et l’engorgement des réseaux d’assainissement de la ville.

La mise en place d’une unité de transformation (capable de traiter les rejets en huiles alimentaires usagées sur l’ensemble du territoire du Grand-Casablanca) nécessitera un investissement de l’ordre de 440 millions de DH (58,6 M$ CA). Quant au potentiel à l’exportation, il est de plus de 1 milliard de DH (130 M$ CA).

Outre la création de milliers d’emplois, ce partenariat est censé avoir un impact économique non négligeable. L’entreprise, qui exporte l’essentiel de sa production vers l’Europe, espère ainsi écouler une bonne partie sur le marché local.

Du carburant pour les bus

Youssef Chaqor, fondateur et directeur général de Kilimanjaro, rêve d’ailleurs de faire rouler les bus casablancais avec du biocarburant. Et les bienfaits écologiques de ces carburants ne sont plus à démontrer.

En effet, le biodiesel de deuxième génération est un carburant biodégradable, non toxique, produit à partir de ressources renouvelables comme les huiles de fritures usagées recyclées, ou de gras animal qui ne contient aucun produit pétrolier. Il peut servir à remplacer le pétro-diesel comme carburant alternatif, ou bien mélangé avec des concentrations allant de 2 % à 10 %, sans rien changer au bloc moteur.

Aux yeux du management de Kilimanjaro, le métier doit être réglementé, mais il faudra aussi instaurer une loi interdisant le déversement des huiles usagées, hautement polluantes, dans les égouts. Cette traçabilité du circuit de récupération des huiles permettra de lutter contre la fraude (notamment la revente à des fins alimentaires).

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