Implanter des espaces temporaires pour combler le vide


Édition du 27 Octobre 2021

Implanter des espaces temporaires pour combler le vide


Édition du 27 Octobre 2021

Courtepointe, projet transitoire de Philémon Gravel. (Photo: courtoisie)

ARCHITECTURE. La nature a horreur du vide. L’homme aussi. Pourtant, la ville de Montréal compte à elle seule 894 bâtiments abandonnés, dont 121 classés patrimoniaux. De quoi titiller l’imaginaire des architectes en aménagement transitoire.

Restaurant qui a fait faillite, ancien hôpital ou siège social relocalisé : les locaux vacants ne manquent pas. S’ils ne sont pas entretenus et chauffés, ils se dégraderont, et certains devront même être démolis. C’est là qu’entre en scène l’architecture transitoire. 

L’idée est d’occuper un espace vacant à court terme, après un minimum de travaux. Cela permet de protéger et d’entretenir les lieux tout en bâtissant un projet pérenne, soit à vocation permanente. Les nouveaux locataires deviennent en quelque sorte les gardiens des lieux.

« C’est une démarche complémentaire au développement immobilier conventionnel qui mise sur l’existant. Elle permet de résoudre certains problèmes, comme trouver des occupants, requalifier un bâtiment ou faire émerger des modèles d’affaires et des projets qui ont besoin d’un moment avant de voir le jour », explique Philémon Gravel, directeur général et cofondateur d’Entremise. La mission de cette entreprise d’économie sociale montréalaise est justement de transformer les espaces vacants et sous-utilisés en projets porteurs. 

 

Pas de solution unique

L’architecte engagé Jean Beaudoin, qui dirige l’atelier de conception d’espaces permanents et éphémères Intégral Jean Beaudoin, a beaucoup réfléchi à ce concept. « Les ateliers d’artistes étaient des précurseurs, même avant que le terme existe, rappelle-t-il. Ceux qui occupaient un quartier avant qu’il se développe, dans des locaux laissés-pour-compte, faisaient de l’aménagement transitoire. »

Si certains usages — comme des bureaux ou une salle d’exposition — se prêtent mieux à l’occupation temporaire, il se révèle primordial de concevoir une solution propre à chaque endroit utilisé de manière transitoire. « Chaque bâtiment est unique, rappelle Philémon Gravel. Une église en Gaspésie n’aura pas les mêmes fonctions que l’ancienne gare d’autocars de Montréal. »

Le cofondateur d’Entremise ajoute qu’en développement immobilier conventionnel, « on bâtit un programme, puis on construit une boîte pour l’accueillir, alors qu’en aménagement transitoire, la boîte est déjà là. Il faut donc y aller à l’inverse : regarder ce que la boîte propose, imaginer des programmes qui pourraient s’y insérer, puis trouver des occupants. »

 

Ouvrir la voie

Philémon Gravel a reçu la Bourse du collège des présidents de l’Ordre des architectes du Québec à la fin de sa maîtrise en architecture à l’Université de Montréal. Cela lui a permis de visiter plusieurs projets de requalification de bâtiments en Europe. « Les plus réussis sont nés de l’occupation transitoire, estime-t-il. À Entremise, on se demande toujours ce que sera la suite. On vise à travailler sur des projets collectifs, à se réapproprier le patrimoine et à repenser la ville en la construisant ensemble. »

L’architecture transitoire n’a pas nécessairement la finalité de le rester. Elle peut jeter les bases d’une utilisation pérenne. Le directeur général d’Entremise donne en exemple leur projet Courtepointe. « La Société de développement Angus a acheté sept bâtiments sur une artère commerciale de Pointe-aux-Trembles, en vue d’en faire un gros projet mixte résidentiel et commercial, explique-t-il. Pour tisser des liens avec le quartier et développer l’achat local, le promoteur a loué les locaux à des entrepreneurs et à des organismes, tout ça dans le but de les inclure dans le projet à long terme. »

 

Des exemples inspirants

Entremise planche aussi sur la Cité-des-Hospitalières, où se trouve l’Hôtel-Dieu de Montréal. En 2017, Montréal a acquis le site qui comprend aussi le couvent des Religieuses hospitalières de Saint-Joseph, bâti en 1861. « La Ville veut en faire un actif commun pour les Montréalais. Comment fait-on ça dans un bâtiment hautement patrimonial, c’est la grande question », note Philémon Gravel. 

Son entreprise a trois ans pour bâtir une communauté d’occupants qui pourra reprendre le flambeau des sœurs et s’installer dans le bâtiment actuel. Le mandat d’Entremise est d’alimenter ainsi le développement du projet pérenne.

De l’avis de Jean Beaudoin, un autre avantage de l’occupation transitoire est de préserver la vie de quartier. « On s’assure qu’on ne laisse pas mourir un morceau de ville pendant un chantier, fait-il valoir. Les travaux à la station de métro Mont-Royal sont par exemple une aberration ; ça fait quatre ans que cette place publique s’endort. »

Pour faire face à ce problème, l’architecte signe depuis quelques années des aménagements transitoires pensés pour leur communauté. « En 2015-2016, la grande terrasse rouge d’un kilomètre sur la rue Saint-Denis visait à maintenir un milieu de vie de qualité durant les travaux, illustre-t-il. Le Champ de pixels, qui a lancé les installations sur la place des Festivals, voulait nous permettre de nous réapproprier les places publiques l’hiver et d’assumer notre nordicité. » À Clermont-Ferrand, en France, Jean Beaudoin a imaginé un sentier des arts pendant le chantier de l’Hôtel-Dieu local. « C’est un parcours temporaire qui relie les espaces collectifs », résume-t-il.

Comme quoi il n’y a pas que les grands chantiers qui permettent de réinventer la ville. 

 

La nature a horreur du vide. L’homme aussi. Pourtant, la ville de Montréal compte à elle seule 894 bâtiments abandonnés, dont 121 classés patrimoniaux. De quoi titiller l’imaginaire des architectes en aménagement transitoire.
Restaurant qui a fait faillite, ancien hôpital ou siège social relocalisé : les locaux vacants ne manquent pas. S’ils ne sont pas entretenus et chauffés, ils se dégraderont, et certains devront même être démolis. C’est là qu’entre en scène l’architecture transitoire. 
L’idée est d’occuper un espace vacant à court terme, après un minimum de travaux. Cela permet de protéger et d’entretenir les lieux tout en bâtissant un projet pérenne, soit à vocation permanente. Les nouveaux locataires deviennent en quelque sorte les gardiens des lieux.
« C’est une démarche complémentaire au développement immobilier conventionnel qui mise sur l’existant. Elle permet de résoudre certains problèmes, comme trouver des occupants, requalifier un bâtiment ou faire émerger des modèles d’affaires et des projets qui ont besoin d’un moment avant de voir le jour », explique Philémon Gravel, directeur général et cofondateur d’Entremise. La mission de cette entreprise d’économie sociale montréalaise est justement de transformer les espaces vacants et sous-utilisés en projets porteurs. 
Pas de solution unique
L’architecte engagé Jean Beaudoin, qui dirige l’atelier de conception d’espaces permanents et éphémères Intégral Jean Beaudoin, a beaucoup réfléchi à ce concept. « Les ateliers d’artistes étaient des précurseurs, même avant que le terme existe, rappelle-t-il. Ceux qui occupaient un quartier avant qu’il se développe, dans des locaux laissés-pour-compte, faisaient de l’aménagement transitoire. »
Si certains usages — comme des bureaux ou une salle d’exposition — se prêtent mieux à l’occupation temporaire, il se révèle primordial de concevoir une solution propre à chaque endroit utilisé de manière transitoire. « Chaque bâtiment est unique, rappelle Philémon Gravel. Une église en Gaspésie n’aura pas les mêmes fonctions que l’ancienne gare d’autocars de Montréal. »
Le cofondateur d’Entremise ajoute qu’en développement immobilier conventionnel, « on bâtit un programme, puis on construit une boîte pour l’accueillir, alors qu’en aménagement transitoire, la boîte est déjà là. Il faut donc y aller à l’inverse : regarder ce que la boîte propose, imaginer des programmes qui pourraient s’y insérer, puis trouver des occupants. »
Ouvrir la voie
Philémon Gravel a reçu la Bourse du collège des présidents de l’Ordre des architectes du Québec à la fin de sa maîtrise en architecture à l’Université de Montréal. Cela lui a permis de visiter plusieurs projets de requalification de bâtiments en Europe. « Les plus réussis sont nés de l’occupation transitoire, estime-t-il. À Entremise, on se demande toujours ce que sera la suite. On vise à travailler sur des projets collectifs, à se réapproprier le patrimoine et à repenser la ville en la construisant ensemble. »
L’architecture transitoire n’a pas nécessairement la finalité de le rester. Elle peut jeter les bases d’une utilisation pérenne. Le directeur général d’Entremise donne en exemple leur projet Courtepointe. « La Société de développement Angus a acheté sept bâtiments sur une artère commerciale de Pointe-aux-Trembles, en vue d’en faire un gros projet mixte résidentiel et commercial, explique-t-il. Pour tisser des liens avec le quartier et développer l’achat local, le promoteur a loué les locaux à des entrepreneurs et à des organismes, tout ça dans le but de les inclure dans le projet à long terme. »
Des exemples inspirants
Entremise planche aussi sur la Cité-des-Hospitalières, où se trouve l’Hôtel-Dieu de Montréal. En 2017, Montréal a acquis le site qui comprend aussi le couvent des Religieuses hospitalières de Saint-Joseph, bâti en 1861. « La Ville veut en faire un actif commun pour les Montréalais. Comment fait-on ça dans un bâtiment hautement patrimonial, c’est la grande question », note Philémon Gravel. 
Son entreprise a trois ans pour bâtir une communauté d’occupants qui pourra reprendre le flambeau des sœurs et s’installer dans le bâtiment actuel. Le mandat d’Entremise est d’alimenter ainsi le développement du projet pérenne.
De l’avis de Jean Beaudoin, un autre avantage de l’occupation transitoire est de préserver la vie de quartier. « On s’assure qu’on ne laisse pas mourir un morceau de ville pendant un chantier, fait-il valoir. Les travaux à la station de métro Mont-Royal sont par exemple une aberration ; ça fait quatre ans que cette place publique s’endort. »
Pour faire face à ce problème, l’architecte signe depuis quelques années des aménagements transitoires pensés pour leur communauté. « En 2015-2016, la grande terrasse rouge d’un kilomètre sur la rue Saint-Denis visait à maintenir un milieu de vie de qualité durant les travaux, illustre-t-il. Le Champ de pixels, qui a lancé les installations sur la place des Festivals, voulait nous permettre de nous réapproprier les places publiques l’hiver et d’assumer notre nordicité. » À Clermont-Ferrand, en France, Jean Beaudoin a imaginé un sentier des arts pendant le chantier de l’Hôtel-Dieu local. « C’est un parcours temporaire qui relie les espaces collectifs », résume-t-il.
Comme quoi il n’y a pas que les grands chantiers qui permettent de réinventer la ville. 

 

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