L’humain au cœur d’une relève d’entreprise: le pont intergénérationnel comme solution à la pénurie de talents
BCF Avocats d'affaires|Mis à jour le 12 juin 2024En 2022, le défi premier auquel font face les chefs d’entreprises est sans aucun doute la rareté de la main d’œuvre, et ce, à tous les niveaux de l’entreprise. Ces ressources sont non seulement nécessaires à la continuité des affaires, mais surtout clés dans le support aux ambitions de croissance de leur organisation.
Bien qu’une planification opérationnelle des talents permette de combler les besoins à court et moyen termes, sous-estimer la valeur stratégique du capital humain à plus long terme peut devenir un facteur de risque pour la pérennité ou la croissance de l’organisation. Ainsi, une planification réussie doit accorder une place prépondérante à la main-d’œuvre, soit par une stratégie de recrutement classique, soit par une inclusion de la relève dans l’actionnariat, un scénario de plus en plus commun, ou soit par les opportunités qu’offre le marché des fusions et acquisitions. Ces deux derniers éléments s’avèrent un réel vent d’air frais pour une organisation inclusive et respectueuse de ses générations.
La valorisation de chacun devient alors un levier de croissance, au même titre que les différentes sources de financement et les stratégies d’investissements et de partenariats.
L’importance d’une destination commune
Pour combler ces perles rares que tout employeur souhaite dénicher, l’employeur doit non seulement avoir un plan de croissance déterminé, mais surtout savoir transmettre une culture et une vision claire afin de planifier, recruter et attirer des talents adéquatement. L’alignement entre la destination et les motivations individuelles a intrinsèquement un effet bénéfique sur la mobilisation des troupes et sur les opportunités qui s’offriront à l’organisation après avoir investi dans leur développement. « De nos jours, une organisation doit inévitablement faire valoir les avantages comparatifs, le plaisir et la satisfaction qu’elle peut générer et qui fait d’elle un employeur unique. Au final, les conditions théoriques de travail sont importantes, certes, mais beaucoup moins que le désir de se réaliser, de se sentir appuyé et respecté sur le plan personnel plutôt que sur le plan unique du savoir-faire », mentionne Jean-Christophe Imbeau, avocat en droit des affaires chez BCF Avocats d’affaires.
Or, au-delà d’une saine gestion du capital humain, la clé du succès pour la pérennité d’une organisation repose sur sa capacité d’adaptation et d’ouverture aux changements, qu’ils s’agissent d’innovations technologiques ou de ses fondements, par exemple lors d’une réorganisation importante du leadership, d’une fusion corporative ou encore de la passation des pouvoirs d’une génération à l’autre, l’enjeu est le même. « Cette culture du changement passe inévitablement par un abandon individuel pour le bien commun. Une sorte d’ouverture et de sérénité organisationnelle visant à ne pas percevoir l’autre comme une menace ou un frein, mais bien comme une plus-value pour bâtir ensemble une organisation solide et pérenne où il y a volonté de capitaliser sur les forces complémentaires qu’amènent les différentes générations et les personnalités variées, dans le respect de l’histoire et du futur », affirme Mario Charpentier, associé fondateur chez BCF Avocats d’affaires.
L’alignement des valeurs dans la réalisation d’une transaction
La voie la plus rapide parfois utilisée par les entrepreneurs pour combler cette rareté de talents est celle des fusions et acquisitions. Au-delà des éléments techniques importants, tels que les volets financier et juridique d’une acquisition, le succès de ces transactions repose sur l’identification des facteurs humains. Ce que nous appelons le « fit » entre ceux qui acquièrent et ceux qui se joignent à l’entreprise ne doit en aucun cas être sous-estimé.
De plus en plus d’entreprises et d’entrepreneurs se questionnent sur les individus qui seront aux commandes de leur entreprise suivant l’acquisition. « Lors d’une première rencontre, il est très important de ressentir la place que ceux-ci accordent aux valeurs établies par l’organisation, mais surtout de convenir du rôle que les leaders sortants auront à jouer. Au-delà du prix d’achat ou de l’intégration sur le plan opérationnel, le message souvent véhiculé par le vendeur est qu’il est prêt à aider suivant la vente, mais sans jouer un rôle de figurant », affirme Mario Charpentier. Ce contrat d’accompagnement dure typiquement d’un à deux ans.
On retrouve d’ailleurs de plus en plus de clauses d’ajustement de prix de vente de type « earnout » en vertu desquelles la qualité et la rétention des talents pour la période d’intégration après l’acquisition permet au vendeur d’obtenir un ajustement à la hausse ou à la baisse du prix de vente.
L’importance de la sélection des talents prend également tout son sens dans un contexte de rachat d’entreprise par les employés en place ou par la génération future dans le cas d’entreprises familiales, ce que l’on appelle communément un « management buyout ». Parmi les facteurs clés de réussite, la mise en place en amont d’un plan d’option d’achat d’actions bien dessiné, par exemple de 10 à 15 % est non seulement un facteur de motivation à participer à la croissance de la société, mais aussi une approche de transparence et d’écoute auprès des différentes générations.
De leur côté, les jeunes générations auront également intérêt à respecter cette preuve d’ouverture de la direction en place pour assurer une transition en douceur le temps venu. « Ceci dit, pour y arriver, il y a souvent un enjeu de disponibilité du capital pour les nouvelles générations. Nos grandes banques canadiennes et québécoises jouent un rôle important pour les soutenir, mais il y a aussi de nombreux fonds d’investissement très actifs et ouverts aux opportunités de repreneuriat au Québec », renchérit Mario Charpentier. En effet, il est alors possible de procéder à une acquisition en partenariat avec un fonds ou une banque et de prévoir les clauses usuelles de prise de décisions et de sortie dans une convention entre actionnaires entre les acquéreurs.
Actionnariat et financement alternatif
De plus en plus, des « family offices » ont structuré des véhicules d’investissement en se regroupant autour de gestionnaires professionnels pour investir et faciliter de telles transactions. Ces prises de participation privée peuvent même être majoritaires. L’avantage de tels scénarios de « private equity » avec des « family offices » consiste non seulement en l’apport des capitaux nécessaires, mais surtout en la connaissance du marché et des défis humains et psychologiques entourant la passation de pouvoir intergénérationnel afin d’éviter que des faux pas soient commis lors de ces étapes transitionnelles plus à risque.
Les fonds d’investissement seront également rassurés et portés à accepter des projets lorsque la direction et la relève en place est solide. En plus de laisser les commandes au partenaire avec lequel l’investisseur procède à l’acquisition, le groupe acquéreur voudra souvent inciter le vendeur à rester quelques années le temps d’opérer la transition, lui offrant une partie minoritaire des actions en paiement partiel du prix de vente. « Autrement dit, la grande qualité de la main-d’œuvre donnera une plus grande malléabilité à l’entreprise au gré des événements et des cycles économiques. C’est aussi vrai pour une société à plus petite capitalisation cotée en bourse. Elle sera moins frileuse à l’idée de procéder à une fermeture de son capital-actions avec des capitaux privés si elle sait qu’elle peut compter sur des gens solides à l’interne pour prendre la relève », conclut Jean-Christophe Imbeau.
Les avocats, comptables ou professionnels de l’accompagnement dans les transferts d’entreprises familiales, tels les psychologues industriels, doivent avoir une sensibilité aux différents enjeux qui motivent les humains, peu importe leur âge et leur niveau d’expérience au sein d’une organisation. La clé est de travailler vers une destination commune qui permet de se réaliser, de se dépasser et de voir plus loin.
Pour toutes questions concernant les enjeux humains, commerciaux et juridiques propres aux fusions et acquisitions dans un contexte de pénurie de main-d’œuvre, n’hésitez pas à communiquer avec Mario Charpentier ou Jean-Christophe Imbeau de BCF.