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Philippe Leblanc

Entre les lignes

Philippe Leblanc

Expert(e) invité(e)

Attention aux rendements mirobolants des 12 derniers mois

Philippe Leblanc|Publié le 07 mai 2021

Attention aux rendements mirobolants des 12 derniers mois

(Photo: 123RF)

BLOGUE INVITÉ. Les rendements obtenus par de nombreux fonds et gestionnaires de portefeuille au cours des 12 derniers mois sont tout simplement mirobolants. Qui ne serait pas attiré par un rendement de plus de 70% sur douze mois? Il me semble d’ailleurs que certains gestionnaires en profitent allègrement pour attirer de nouveaux investisseurs potentiels avec des chiffres semblables.

Il faut toutefois faire attention à de tels rendements. En effet, rappelez-vous qu’il y a un an, les marchés avaient été fortement corrigés pour atteindre un creux le 23 mars 2020. Cette journée-là, l’indice boursier nord-américain phare, le S&P 500, enregistrait une baisse de quelque 36% par rapport à son sommet historique du 20 février précédent. Depuis ce creux du 23 mars, l’indice a rebondi de 93,5%, en incluant les dividendes.

Au cours de la période de 12 mois allant du 1er avril 2020 au 31 mars 2021, l’indice S&P 500 s’est apprécié de 56,4%, toujours en incluant les dividendes. Pour la même période, l’indice Nasdaq, en grande partie composé de titres technologiques, a affiché un rendement de 68,9% (sans les dividendes).

Ainsi, ceux qui brandissent des rendements de 50% ou 60% au cours des 12 mois terminés le 30 mars 2021 ont essentiellement suivi les marchés boursiers; il n’y a pas de quoi se pavaner!

Le même phénomène s’est produit dans de nombreuses entreprises dont les bénéfices avaient été fortement malmenés pendant la période de lourdes restrictions sanitaires du printemps dernier. Nombre d’entre elles ont affiché des hausses de bénéfices extraordinaires à leur premier trimestre de 2021, mais ces derniers se comparent bien sûr aux chiffres déprimés d’il y a un an.

Prenons l’exemple de Starbucks, une société que nous détenons en portefeuille depuis quelques années. Pour le trimestre clos le 31 mars dernier et par rapport au même trimestre de 2020, la société affiche une augmentation de ses ventes par magasins comparables de 15% (dont une hausse de 91% en Chine), une augmentation de ses revenus totaux de 11,2% et une croissance de ses bénéfices nets ajustés de 91,3%.

Il faut évidemment prendre ces chiffres de croissance avec un gros grain de sel et surtout ne pas les extrapoler. Dans la majorité des cas, ce ne sont pas les bénéfices récents des sociétés qui sont excellents, mais plutôt ceux de l’an passé qui étaient anormalement bas. Une bonne manière de s’en faire une meilleure idée serait de comparer les bénéfices récents des sociétés à ceux des périodes comparables d’il y a deux ans, avant l’impact de la pandémie. Ainsi, on se rend compte que les bénéfices par action du plus récent trimestre de Starbucks affichent une progression plus normale de 3,3% par rapport au même trimestre d’il y a deux ans.

On peut faire dire bien des choses aux chiffres, aux taux de croissance et de rendement. Souvent, il suffit de changer un peu les dates d’une période étudiée pour altérer complètement l’allure de certaines statistiques.

Afin de tenir compte de la période exceptionnelle de la pandémie, en particulier des mois où l’économie mondiale a été littéralement stoppée, je vous suggère de comparer les résultats actuels de vos sociétés à ceux d’il y a deux ans. Quant aux rendements qu’affiche un portefeuille de placements (le vôtre ou celui d’un gestionnaire), ne vous fiez pas aux rendements sur un an, mais sur une période d’au moins cinq ans.

 

Philippe Le Blanc, CFA, MBA

Chef des placements, COTE 100