« La bonne conjoncture fait échec aux risques pour l'instant »

Publié le 07/02/2018 à 06:00

« La bonne conjoncture fait échec aux risques pour l'instant »

Publié le 07/02/2018 à 06:00

Par Dominique Beauchamp

Michael Ryan, de UBS, en pleine tournée mondiale pour son employeur

Les risques figurent toujours en tête des préoccupations du gestionnaire de fortunes privées UBS, mais les diverses menaces ne sont pas assez sévères pour contrer l'effet favorable d'une bonne conjoncture sur les marchés.

C'est ainsi que Michael P. Ryan, le chef des investissements pour les Amériques, de UBS Wealth Management, résume les perspectives de sa firme pour 2018. Au coeur d'une tournée mondiale, M. Ryan a récemment répondu à nos questions lors de son passage à Montréal.

Dominique Beauchamp - Les marchés connaissent leur meilleur début d'année depuis longtemps, ce qui rend bien des investisseurs nerveux. Quels risques surveillez-vous de plus près ?

Michael Ryan - Les facteurs de risque sont d'ordre conjoncturel, monétaire et géopolitique en plus du potentiel de chocs externes. À l'heure actuelle, aucun d'eux n'est assez menaçant pour faire dérailler le marché haussier. La croissance s'étend à tous les pays de l'OCDE et s'alimente par elle-même. Les États-Unis n'ont plus besoin de porter tout le fardeau. Une erreur de politique monétaire est évidemment possible au moment où les banques centrales retirent leurs liquidités. Les argentiers doivent éviter d'étrangler l'économie ou de raviver l'inflation. Pour l'instant, leur méthode graduelle rassure. Le commerce mondial est un risque plus présent si le protectionnisme américain gagne en force, mais nous ne prévoyons pas de guerre commerciale. Les États-Unis veulent un commerce aussi « juste » que « libre ». Ses partenaires devraient y voir leur intérêt aussi.

D.B. - L'inflation ne devient-elle pas un risque étant donné le plein emploi, la hausse des salaires et des dépenses des entreprises, ainsi que les tarifs commerciaux potentiels ?

M.R. - Il y a peu de temps, on s'inquiétait encore d'une déflation. Une inflation modérée de 2 % à 3 % nous apparaît saine. Il faudrait vraiment voir une escalade de représailles commerciales pour qu'un ressac du commerce mondial ait un impact sur les prix. Sur le plan des salaires, l'industrie des services est la plus propice à l'inflation, mais elle est en même temps la plus vulnérable à l'automatisation. Quant à la reprise actuelle des dépenses par les entreprises, elle représente surtout un rattrapage cyclique. La réforme des impôts a un avantage sous-estimé : les entreprises prendront leurs décisions pour des motifs d'affaires au lieu d'un arbitrage fiscal. Les dépenses des sociétés, tant dans leurs installations que dans les salaires, nourriront aussi la demande finale et la croissance. L'étau réglementaire se desserre aussi, facilitant la prise de décision par les entreprises pour l'embauche et les investissements. Nous l'appelons le dividende invisible. Il ne faut pas oublier non plus que les biens d'équipements sont aussi en bien piteux état.

JLA - Comment ce portrait se transpose-t-il en prévisions par rapport au marché américain ?

M.R. - L'année 2017 a vu de bons bénéfices donner de très bons rendements en Bourse, avec un gain de 19,4 % pour le S&P 500. Cette année s'annonce certainement plus volatile - et un repli de 5 % à 7 % est fort probable en cours de route, surtout si l'inflation surprend. La Bourse devrait s'appuyer sur la progression de 16 % des bénéfices, dont la moitié est attribuable à la réforme des impôts. D'ici six mois, le S&P 500 devrait atteindre 2950, puis finir l'année 2018 à 3050-3100. La Bourse sera moins généreuse qu'en 2017, car l'évaluation des actions pourra difficilement augmenter en raison de la hausse des taux et de l'avancée du cycle. L'évaluation de 18 fois les bénéfices du S&P 500 est supérieure à la moyenne, mais elle est encore appropriée si on la compare au taux combiné du chômage et de l'inflation (le Misery Index). Évidemment, si l'inflation s'emballait ou si l'économie trébuchait, ce multiple d'évaluation se comprimerait.

JLA - C'est pourquoi vous préférez les marchés émergents aux marchés industrialisés ?

M.R. - Les marchés émergents ont procuré de très bons rendements en 2017, soit 34,3 % en dollars américains, mais la reprise de ces marchés s'étale généralement sur deux ou trois ans. Les marchés émergents sont particulièrement bien placés pour profiter de la croissance mondiale synchronisée au moment où leur politique monétaire et leur bilan budgétaire sont encore favorables. Nous prévoyons une hausse de 10 % des bénéfices dans ces marchés, en partie grâce à la remontée des cours des matières premières. Environ 30 % de l'indice se compose de titres de technologie. Un dollar américain affaibli nuit à leur compétitivité, mais, parallèlement, le nouvel élan de l'économie américaine contribue à la vigueur de l'économie mondiale.

JLA - Quel est le risque auquel vous portez le plus d'attention ?

M.R. - Un conflit commercial pourrait exacerber les tensions entre les leaders mondiaux et nourrir le populisme. Un train de mesures protectionnistes ralentirait l'économie mondiale, accentuant encore plus les divisions entre les pays. Or, le commerce mondial est le facteur le plus corrélé à la croissance du produit intérieur brut (PIB) par habitant. Pour l'instant, nous croyons que la politique de l'administration Trump sera différente de la rhétorique de son chef. Tous comprennent à quel point les chaînes d'approvisionnement de tant d'industries sont devenues interdépendantes.

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