L'«economic moat» de Warren Buffett revisité


Édition du 27 Août 2016

L'«economic moat» de Warren Buffett revisité


Édition du 27 Août 2016

Par Carl Simard

Selon l’investisseur Warren Buffett, une entreprise qui a bâti une position commerciale difficilement attaquable par la concurrence générera beaucoup de bénéfices pendant plusieurs années et sera, en conséquence, créatrice de richesse durable pour ses act

Le légendaire investisseur Warren Buffett emploie depuis très longtemps l'expression anglaise «economic moat», que nous traduisons par «fossé économique», pour parler de ces entreprises contre qui il est difficile, voire impossible de concurrencer. Pour l'oracle d'Omaha, une entreprise doit chercher à creuser un fossé autour de ses activités comme on creusait une douve autour d'un château à l'époque médiévale. Ainsi, une entreprise qui a bâti une position commerciale difficilement attaquable par la concurrence générera beaucoup de bénéfices pendant plusieurs années et sera, en conséquence, créatrice de richesse durable pour ses actionnaires.

Lors de nos discussions de gestion de portefeuille avec nos clients, le concept de fossé économique refait surface la plupart du temps. Par exemple, on nous demande : «Pourquoi ne pas investir dans des sociétés de type "bon père de famille" comme Procter & Gamble ?» Malgré des marques de commerce connues mondialement, il nous semble évident que Procter & Gamble fait face au défi des rendements économiques décroissants. Pour ainsi dire, tous les avantages concurrentiels ne sont pas égaux sur le plan de l'investissement. Il est requis de les départager en deux catégories.

L'avantage concurrentiel de type «héritage»

Les entreprises telles que Procter & Gamble, Coca-Cola et Wal-Mart appartiennent à la catégorie d'avantages concurrentiels passés. Bien qu'elles enregistrent d'excellents bénéfices année après année, elles sont incapables de réinvestir tous ces profits dans leurs propres activités faute d'occasions de croissance. Il en résulte que la majorité des bénéfices est redistribuée aux actionnaires sous forme de dividendes et de rachats d'actions. En général, ces entreprises obtiennent un taux de rendement sur les nouveaux profits réinvestis inférieur au taux obtenu auparavant sur les anciens profits. Ces retours massifs de capital aux actionnaires sont néanmoins la bonne chose à faire afin d'éviter les risques de dilapidation de capital associés à des échecs de diversification et de croissance.

Le cas de Coca-Cola est probant à l'égard de l'avantage concurrentiel de type «héritage». Cette dernière a notamment distribué à ses actionnaires 57 % de ses bénéfices générés au cours des 10 dernières années. Le tout principalement sous forme de dividendes et de rachats d'actions. Le faible rendement marginal du capital investi a été de 6,5 % par année au cours de cette décennie. C'est bien inférieur au taux de 28 % que Coca-Cola générait il y a 10 ans. Dans ces circonstances et avec un ratio d'évaluation relativement élevé, le rendement boursier espéré sera normalement faible.

L'avantage concurrentiel de type «réinvestissement»

En plus d'avoir une superbe performance économique et de nombreuses occasions de croissance, les entreprises de type «réinvestissement» parviennent à améliorer la portée de leurs avantages concurrentiels à mesure qu'elles croissent. Alimentation Couche-Tard, Boyd Group et Geico (la division d'assurance automobile de Berkshire Hathaway) en sont des exemples.

Lorsque Alimentation Couche-Tard augmente sa taille, elle améliore son pouvoir d'achat par rapport aux fournisseurs de carburant et de marchandises. La quête continue d'efficacité opérationnelle et une gestion disciplinée du capital sont également des facteurs clés de sa réussite. Sachant qu'elle a réinvesti la quasi-totalité de ses bénéfices au cours de la dernière décennie, nul ne sera surpris d'apprendre que son rendement du capital investi a été supérieur à un niveau moyen de 15,5 % par année. Le cours de l'action a d'ailleurs été multiplié par 10 pendant la même période.

Gestion du capital

Irrémédiablement, il arrivera un moment où une splendide entreprise dotée d'avantages concurrentiels de type «héritage» génère plus d'argent qu'elle n'en a besoin pour financer ses occasions de croissance. Ce surplus d'argent doit ainsi être distribué aux actionnaires selon la méthode la plus optimale et non seulement en versant un dividende, comme c'est malheureusement souvent le cas. Un programme de rachat d'actions lorsqu'elle s'échange au rabais peut parfois être valable pour les actionnaires. Un investissement dans une telle entreprise rapportera un rendement raisonnable, sans plus.

Le nirvana pour l'investisseur est de découvrir l'entreprise qui est en mesure de réinvestir de façon disciplinée et à un taux avantageux tout le capital produit par ses opérations.

Carl Simard est président de Gestion de portefeuille stratégique Medici, une firme de Saint-Bruno.

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