Une conclusion différente
«Nous arrivons à des conclusions différentes avec les mêmes chiffres que M. Bender. En utilisant un modèle d'évaluation des actifs financiers (MEDAF) comprenant quatre facteurs, les fonds dégagent un alpha légèrement positif, qu'on peut juger ne pas être statistiquement significatif. De ce point de vue, on ne peut rien conclure de l'habileté des gestionnaires. Mais de dire ça ne fait pas un bon article», raille Christopher Davis, directeur de la recherche sur les gestionnaires chez Morningstar Canada, et à ce titre, ultimement responsable des cotes élevées accordées à ces fonds.
Cela dit, M. Davis admet que la plupart des gestionnaires d'actif ne parviennent pas à obtenir les résultats escomptés, et qu'il serait facile de répliquer la performance du fonds moyen avec un fonds négocié en Bourse (FNB), ce qui coûterait beaucoup moins cher. Il admet aussi que la recherche des facteurs expliquant le rendement des fonds a haussé la barre pour les gestionnaires d'actif, maintenant que certains FNB peuvent répliquer un facteur de rendement à moindres frais qu'un fonds géré activement. Mais selon lui, le fonds Mawer relève du cas d'école pour la gestion active.
L'importance du facteur qualité
M. Davis note que Justin Bender a étudié le fonds sur une longue période. Toutefois, sur de plus courtes périodes, l'exposition aux divers facteurs de rendement varie, ce dont un bon gestionnaire d'actif peut tirer parti, selon lui. Il pense que le fonds Mawer a surtout bénéficié de son accent sur un facteur, la qualité, qui a vraiment été le moteur de rendement le plus important du fonds, selon lui. Les titres de qualité sont ceux des sociétés rentables, en croissance et bien gérées.
«Or, en 2008, l'exposition du fonds au facteur "qualité" était deux fois plus importante que durant toute son existence. Ce serait un exploit dans l'extraction de données (data mining) de pouvoir déterminer quel facteur favoriser chaque mois pour ajuster le contenu d'un FNB créé pour mimer la stratégie Mawer. Sans compter tous les mécanismes à mettre en place pour en tirer parti. C'est pourquoi l'analyse de Justin Bender est un exercice théorique qui ne se rapproche pas vraiment de la réalité des décisions de placement», soutient-il.
Fellow CSI, Yves Bourget a fait carrière dans l’industrie des valeurs mobilières pendant une vingtaine d’années, en particulier à titre de vice-président pour le Québec de Placements Altamira, de 1990 à 1997. Il collabore depuis 2001 à la publication Finance et Investissement, notamment en matière de fonds communs.