Marché obligataire : l'élection de Donald Trump, un tournant ?


Édition du 13 Août 2016

Marché obligataire : l'élection de Donald Trump, un tournant ?


Édition du 13 Août 2016

[Photo : 123RF/François Penler]

Les rendements obligataires ont récemment atteint des creux historiques, alors que la proportion d'obligations gouvernementales affichant des rendements négatifs ne cesse d'augmenter depuis le référendum du 23 juin en faveur de la sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne.

Le rendement d'une obligation de 10 ans du Royaume-Uni est passé de 1,38 %, le 23 juin, à 0,73 %, le 1er août. Celui d'une obligation allemande de 10 ans est passé de 0,10 % à - 0,093 % pendant la même période. Ce qui fait désormais paraître le rendement de 1,5 % des obligations du Trésor américain de même échéance comme «attrayant». Lorsque les rendements baissent, la valeur des obligations augmente, et vice versa.

Cette ruée vers les titres jugés «sûrs» inquiète certains analystes, dont Peter Boockvar, analyste en chef de marché du Lindsey Group, qui déclarait dans une récente entrevue au réseau CNBC que le marché obligataire était désormais dans une bulle aux proportions colossales, mais dont l'éclatement demeurait imprévisible. Il croit que la dynamique baissière des prix des matières premières tire à sa fin et que, par conséquent, l'inflation aussi a atteint un creux. Une remontée de l'inflation au deuxième semestre pourrait contribuer à l'éclatement de la bulle obligataire, selon lui. Le taux sur les obligations du Trésor américain de 10 ans risque d'être beaucoup moins attrayant si l'inflation approche les 2 %, raisonne-t-il.

Économie au ralenti et inflation faible ?

On pourrait lui répondre que ces obligations sont dans un marché haussier depuis 35 ans et qu'on en prédit la fin depuis presque aussi longtemps. Même la hausse du taux directeur de la Réserve fédérale (Fed) en décembre dernier, un taux à court terme il est vrai, n'a pas eu un effet durable sur celui des obligations à long terme. On assiste plutôt à un aplatissement de la courbe des taux : les taux à court terme montent et ceux à long terme baissent, de sorte que l'écart (spread) entre le rendement des obligations du Trésor américain de 2 ans et de 10 ans est passé de 291 points de base (2,91%) le 4 février 2011 à 82 points de base le 1er août, alors que le taux des obligations de 2 ans oscillait autour de 0,68 %.

Par le passé, lorsque les taux à court terme étaient plus élevés que ceux à long terme, une récession a souvent suivi, mais pas immédiatement. Cela a été le cas pour les récessions de 1980, 1981-1982, 1990-1991, 2001 et 2008. Avant la récession de 2008, les taux à court terme ont dépassé ceux à long terme pour la première fois en décembre 2005 et sont restés plus élevés jusqu'en juin 2007. Alarmée, la Réserve fédérale a ensuite baissé les taux 10 fois jusqu'à 0 % à la fin de 2008, mais il était trop tard.

«La courbe aplatie des taux d'intérêt indique que le marché obligataire anticipe une économie qui ralentit et une inflation faible. Nous n'anticipons cependant pas de récession pour le moment», précise Kamyar Hazaveh, cogestionnaire du Fonds d'obligations mondiales Signature.

Des élections qui brouillent le portrait

Les élections américaines, où le thème du protectionnisme économique est bien présent, brouillent toutefois le portrait : «Nous croyons que les chances de Donald Trump sont plus grandes que ce qu'indiquent les sondages et que les deux candidats sont au coude à coude. Si, une fois élu, Donald Trump ne réussit à mettre en pratique que 25 % de sa rhétorique économique dénonçant les accords commerciaux, cela aura pour effet d'augmenter l'inflation. L'économie américaine sera moins efficiente et la croissance mondiale sera plus faible, mais la richesse à l'intérieur de l'économie américaine sera redistribuée de façon plus égale», raisonne-t-il.

Dans ce contexte, les taux sur les obligations à long terme remonteront et les prix de ces obligations baisseront. «Au fur et à mesure que les résultats de l'élection se préciseront, l'exécution de stratégies déjà en place dans le fonds s'accélérera, à savoir la vente d'obligations de 30 ans et leur remplacement par celles d'échéance allant de 5 à 10 ans, parce que ces échéances sont davantage influencées par la politique monétaire de la Fed. Or, nous ne croyons pas que la Réserve fédérale puisse augmenter son taux directeur dans une telle tourmente. En même temps, nous augmentons graduellement notre pondération en obligations à rendement réel, qui protègent contre l'inflation ; elles sont bon marché, car les politiques monétaires visant à stimuler l'inflation se sont révélées inefficaces», juge Kamyar Hazaveh.

Biographie

Fellow CSI, Yves Bourget a fait carrière dans l'industrie des valeurs mobilières pendant une vingtaine d'années, en particulier à titre de vice-président pour le Québec de Placements Altamira, de 1990 à 1997. Il collabore depuis 2001 à la publication Finance et Investissement, notamment en matière de fonds communs.

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