Table ronde 2017: quatre experts, douze titres


Édition du 09 Septembre 2017

Table ronde 2017: quatre experts, douze titres


Édition du 09 Septembre 2017

Par Stéphane Rolland

Pas facile de trouver des occasions dans un marché haussier qui s'étire. Quatre gestionnaires de portefeuille se prêtent au jeu et nous présentent leurs trois titres préférés dans le cadre de la 12e édition de notre table ronde Investir. De plus, vous pourrez lire le bilan de l'édition 2016 en page i-5.

 

[Journal Les Affaires]

LES CHOIX DE STEVE BÉLISLE

Gestionnaire de portefeuille chez Gestion d'actifs Manuvie

1. Boyd Group

Income Fund

Spécialiste de la réparation des voitures accidentées, Boyd Group Income Fund (BYD.UN, 93,18 $) est une entreprise bien gérée, qui domine son marché, génère d'importants flux de trésorerie et peut croître par acquisition, résume Steve Bélisle, portefeuilliste chez Gestion d'actifs Manuvie.

Son marché fragmenté offre des occasions de croissance par acquisitions, juge celui qui gère des fonds de dividendes canadiens. Pour la croissance interne, les exigences des compagnies d'assurance lui permettent d'accroître ses parts de marché. «Les assureurs veulent traiter avec de moins en moins de fournisseurs, explique-t-il. Boyd peut répondre à leurs standards.»

Avec le développement de technologies pour éviter les collisions (comme les caméras à l'arrière des véhicules ou d'éventuelles voitures autonomes), certains se demandent si le nombre de collisions pourrait reculer. M. Bélisle ne s'en inquiète pas. Les accidents continueront de se produire, malgré les nouvelles technologies, croit-il. Avec les conducteurs qui envoient des textos au volant, le nombre d'accidents n'est malheureusement - ou heureusement pour les actionnaires - pas près de diminuer, intervient François Rochon, de Giverny Capital, qui admet avoir étudié l'entreprise de Winnipeg il y a quelques années et regrette de ne pas avoir saisi l'occasion.

Dans une note consultée après la rencontre, Steve Arthur, de RBC Marchés des Capitaux, affirme pour sa part que les technologies anticollision représentent un vent contraire pour l'industrie, mais que les gains de parts de marché par Boyd tempèrent ce risque. Il aime la société, lui aussi, mais il juge que le titre est cher à 26 fois les bénéfices de l'an prochain. «Il y a un risque de compression du multiple à mesure que le marché s'habitue à une croissance plus lente, bien que toujours impressionnante», prévient-il.

M. Bélisle admet que le titre est plus cher qu'avant, mais il note que le rendement des flux de trésorerie, à 6 %, est meilleur que celui du secteur industriel.

2. Enbridge

La direction d'Enbridge (ENB, 49,84 $) prévoit augmenter son dividende annuellement de 10 % à 12 % au cours des cinq prochaines années. Rares sont les entreprises qui prédisent aussi clairement une progression soutenue de leur dividende, s'enthousiasme Steve Bélisle.

Des inquiétudes pèsent sur le titre, mais le directeur général de l'équipe des actions fondamentales canadiennes chez Gestion d'actifs Manuvie ne partage pas ces craintes. Enbridge peine à obtenir un permis au Minnesota pour le remplacement de la Ligne 3, un pipeline de 1 660 km qui relie l'Alberta au Wisconsin. Ces complications ne feront pas dérailler le projet, selon lui. Dans le pire des cas, Enbridge pourra toujours rénover le pipeline par tronçons. L'opération sera plus longue et plus coûteuse, mais la facture sera refilée au client. Le financement de l'entreprise soulève également des questions. M. Bélisle ne pense pas que l'actionnariat sera dilué par une émission. La vente d'actifs moins essentiels est le scénario qu'il envisage.

Le titre est cher, à 24 fois les bénéfices de l'an prochain, intervient Christine Décarie, de Groupe Investors. Elle se demande comment les titres de dividendes, comme Enbridge, réagiront à une hausse des taux d'intérêt, qui diminuerait leur attrait par rapport aux obligations. M. Bélisle répond que le titre est moins cher qu'il en a l'air si on l'évalue selon le rendement de ses flux de trésorerie à 8 %. Le bénéfice tient compte d'un amortissement de 25 ans sur les pipelines de l'entreprise de Calgary. Or, leur durée de vie est beaucoup plus longue, ce qui a pour effet de sous-estimer la rentabilité réelle.

Guillaume Maurice, de Gestion de patrimoine Banque Scotia, ajoute qu'Enbridge est l'une de ses plus grosses positions. L'acquisition de Spectra en février, qui a propulsé Enbridge au rang du plus important exploitant de pipeline en Amérique du Nord, est une bonne chose, selon lui. Il demande à M. Bélisle ce qu'il en pense. «Le potentiel de croissance dans les sables bitumineux est moins élevé. L'achat ouvre de nouvelles voies dans d'autres secteurs, comme le gaz naturel», répond-il.

3. Oracle

Le vent est en train de tourner pour Oracle (ORCL, 49,80 $ US), croit Steve Bélisle. La migration tardive des produits de l'éditeur de logiciels vers l'infonuagique commence à porter ses fruits, après une période de déclin du rendement du capital.

«Lorsqu'une société informatique migre vers l'infonuagique, on voit en général baisser les revenus tirés des licences, explique le gestionnaire de portefeuille. Maintenant, la décroissance ralentit et les revenus de l'infonuagique s'accélèrent. On est à un point d'inflexion.»

L'avantage de l'infonuagique est que les marges sont plus élevées, dit Christine Décarie. M. Bélisle opine : «Tu perds des revenus de licence à court terme, mais tu te rattrapes à long terme avec les marges.» C'est ce qu'a fait Microsoft avec un certain succès, ajoute Guillaume Maurice.

L'analyste Richard Nguyen, de la Société Générale, croit lui aussi qu'Oracle est sur une bonne lancée, selon une note consultée après la table ronde. Il reste toutefois prudent au sujet de la migration des activités de base de données vers l'infonuagique. L'offre étant encore à ses débuts, il y a un risque que la progression des revenus et des marges se tempère. Il émet donc une recommandation «conserver».

M. Bélisle est plus optimiste. Dans le secteur technologique, il aime bien les vétérans comme Microsoft et Oracle, contrairement aux acteurs plus nouveaux comme Amazon, qui ont une évaluation riche et une rentabilité encore faible. «On aime les entreprises qui sont plus matures, qui génèrent de bons flux de trésorerie et dont l'évaluation est plus raisonnable», résume-t-il.

 

[Journal Les Affaires]

LES CHOIX DE CHRISTINE DÉCARIE

Vice-présidente principale, gestionnaire de portefeuille et directrice de la recherche, Groupe Investors

1. SNC-Lavalin

Choisir trois titres a été difficile, admet Christine Décarie, vice-présidente chez Groupe Investors. Au moment où le cycle économique est avancé, les entreprises qui performent bien sont chères. Il reste celles qui éprouvent des difficultés, mais le défi est de savoir si on a confiance en un redressement. De ces trois choix, SNC-Lavalin (SNC, 54,32 $) a été le plus facile à faire. Elle nous explique pourquoi.

Entachée par des affaires de corruption, la firme de génie-conseil montréalaise est maintenant mieux dirigée, croit celle qui gère un fonds de sociétés québécoises. «Ça fait quand même quatre ans que cela s'est déroulé. Neil Bruce est là depuis 2015. Il a mis une nouvelle équipe en place. Il fait les pas dans la bonne direction et sa stratégie est claire.»

Outre les questions éthiques, la société a révisé son modèle d'entreprise. Elle se tourne davantage vers les services que vers les forfaits, ce qui limite les risques. «Quand tu t'es trompé dans le prix d'un forfait, tu vis longtemps avec les conséquences.»

Mme Décarie trouve que le thème des investissements publics dans les infrastructures est porteur. Les espoirs s'estompent quant aux investissements promis par l'administration Trump, mais les évaluations du secteur se sont ajustées. De toute manière, SNC est davantage exposée au Canada, où les investissements vont bon train, précise-t-elle. Un redressement des prix des combustibles fossiles pourrait également être favorable à la division énergie.

Des risques demeurent. La possibilité d'être exclue des contrats fédéraux n'est pas écartée. Le remplacement du pont Champlain pourrait également susciter des inquiétudes s'il fait les manchettes pour des dépassements de coûts. La gestionnaire de portefeuille souligne que SNC continue d'avoir des contrats du fédéral et elle croit que cela durera. Pour le pont Champlain, de mauvaises nouvelles pourraient offrir l'occasion d'acheter sur faiblesse. Au moment où le titre s'échange à 10 fois les bénéfices de la division d'ingénierie et construction et où le portefeuille de concession vaut environ 30 $ par action, le risque est tempéré par un multiple bas, juge-t-elle.

2. Kroger

En choisissant Kroger (KR, 22,20 $ US), Christine Décarie fait un pari «anti-Amazon». La valeur du titre de l'épicier américain a grandement souffert de l'acquisition de Whole Foods par Amazon, mais la réaction est exagérée, croit celle qui a obtenu le meilleur rendement de notre table ronde 2013.

«Amazon ne va pas accaparer 100 % du marché, prédit-elle. Aujourd'hui, c'est comme si on pensait que tout le monde allait faire son épicerie là.»

Résultat, le titre de Kroger s'échange à 11 fois les bénéfices de l'an prochain, ce qui diminue le risque, selon elle. Pourtant, malgré la forte concurrence et les marges sous pression dans l'industrie, l'épicier n'est pas déclassé. «Kroger a une bonne équipe de direction qui a su s'adapter au fil des années. L'entreprise l'a fait par le passé quand Wal-Mart et Costco sont entrées dans le marché de l'alimentation.»

John Brick, de Morningstar, croit lui aussi que Kroger dispose d'un avantage concurrentiel. La direction gère bien ses coûts, elle fait un suivi rigoureux des habitudes des consommateurs, et sa marque est reconnue, énumère-t-il dans une note consultée en marge de la rencontre. Kroger a des armes solides pour lutter contre la concurrence. Par contre, l'arrivée d'Aldi et de Lidl aux États-Unis, ainsi que la concurrence d'Amazon, de Wal-Mart et de Costco, grugeront le rendement du capital investi au cours des 20 prochaines années, prévient-il.

L'industrie vit des bouleversements. Le commerce en ligne, la popularité des mets préparés et les livraisons par drone modifieront la façon dont on fait son épicerie dans les prochaines années, concède Mme Décarie. Kroger sera en mesure de suivre les tendances. Dans ce marché difficile, les meilleurs survivront, et Kroger fait partie du lot, selon elle.

3. Canadian Natural Resources

Canadian Natural Resources (CNQ, 38,36 $) est un choix prudent pour ceux qui veulent profiter d'une remontée du secteur énergétique canadien, croit Christine Décarie. Elle aime la direction, qui gère efficacement les coûts.

La pétrolière s'est bâti un portefeuille diversifié en réalisant des acquisitions au moment où certains créneaux étaient moins populaires. «Il y a sept ou huit ans, un coût de production inférieur à 40 $ US le baril aurait été perçu comme pas mal audacieux, se souvient-elle. Aujourd'hui, le coût de production s'établit à 22 ou 23 $ US.»

Mme Décarie croit que le prix du pétrole s'établira dans une fourchette de 50 à 60 $ US. «Les gens se concentrent sur l'excédent d'offre, mais il faut garder en tête que la demande continue de progresser. Avec un prix faible, on verra moins de projets. Ça permettra d'atteindre un certain équilibre.»

Elle émet toutefois «quelques bémols». Royal Dutch Shell chercherait à se départir d'une participation de près de 8 % dans l'entreprise. Certains investisseurs pourraient vouloir attendre que la transaction soit réalisée et que cette incertitude soit dissipée. Mme Décarie reconnaît que l'endettement de la société est plus élevé que ce qu'elle aimerait, à 0,75 fois la dette sur les capitaux propres, mais elle note que la pétrolière parvient à réduire son endettement.

CNQ est le titre préféré de Steve Bélisle, de Manuvie, dans le secteur du pétrole et du gaz. Même si le prix du pétrole est faible, il pense que le dividende n'est pas à risque. «Paradoxalement, le prix faible fait en sorte que CNQ ne lancera pas de nouveaux projets, ce qui libère des liquidités pour racheter des actions et augmenter le dividende», dit-il.

 

LES CHOIX DE GUILLAUME MAURICE

Gestionnaire de portefeuille chez Gestion de patrimoine Banque Scotia

1. Manuvie

La progression des taux d'intérêt profitera à Manuvie (MFC, 24,60 $), croit Guillaume Maurice, de Gestion de patrimoine Banque Scotia. Le gestionnaire de portefeuille juge qu'à 1,2 fois la valeur comptable et à 11 fois le ratio cours-bénéfice de l'an prochain, le titre de l'assureur se trouve à un point d'entrée attrayant.

Cette fois pourrait être la bonne. Attendue depuis des années par les économistes, «l'inévitable» remontée des taux d'intérêt semble enfin poindre le bout de son nez. «La Réserve fédérale devrait augmenter son taux directeur une ou deux fois l'année prochaine, note M. Maurice. Le Canada devrait suivre. La distribution des obligations 5 ans du gouvernement du Canada a déjà presque doublé depuis son creux.»

Ce contexte économique est également favorable aux autres grands assureurs canadiens, Sun Life et Great West. Pourquoi avoir choisi Manuvie ? En raison de sa «très forte» présence internationale, répond-il. Les perspectives de sa division en Asie sont favorables, poursuit-il. La division américaine John Hancock, pour sa part, connaît des difficultés pour l'instant. Des rumeurs de vente circulent, mais les commentaires de la direction laissent entendre qu'aucune liquidation n'est imminente.

Christine Décarie, de Groupe Investors, se dit «dans le camp de ceux qui croient que les taux vont continuer de monter». D'ailleurs, Manuvie est plus sensible que ses concurrentes aux variations des taux, souligne-t-elle.

La gestionnaire de portefeuille se demande toutefois comment la société va arrimer son actif et son passif en Asie. «Ce n'est pas une chose facile à faire partout. Ces pays ont-ils des obligations à long terme pour arrimer leur passif ? S'ils choisissent des obligations d'un autre pays, on ajoute un risque de devise à l'équation et cela peut parfois engendrer de mauvaises surprises.»

2. Le Canadien National

Le Canadien National (CNR, 100,64 $) est «l'une des sociétés canadiennes les mieux gérées», juge Guillaume Maurice. Si l'économie nord-américaine continue de bien se tenir, le titre fera de même, prédit-il.

Et si l'économie ou la Bourse vont moins bien que prévu, l'investisseur ne regrettera pas pour autant d'avoir misé sur le transporteur montréalais, ajoute le gestionnaire de portefeuille. «S'il y a une correction, le CN ne tombera pas autant que le marché. Dès qu'il y aura une baisse, les investisseurs institutionnels s'intéresseront à cette entreprise de qualité. C'est le genre de titre qui te fait bien dormir la nuit.»

L'appui d'actionnaires réputés montre également l'attrait de cette compagnie, selon lui. Il donne l'exemple de Bill Gates, le fondateur de Microsoft, dont la firme Cascade Investment est le plus important actionnaire avec une participation de plus de 13,34 %. La Caisse de dépôt et placement du Québec, pour sa part, arrive au cinquième rang avec 2,39 %.

Steve Bélisle, de Manuvie, trouve aussi que le transporteur est bien géré. Il est «impressionné» par le pouvoir qu'a la société d'augmenter ses prix «sans susciter la grogne de ses clients». Par contre, le rendement des flux de trésorerie (entre 2,5 et 3 %) le «refroidit». «C'est très faible comparativement à la moyenne de 5 % dans le secteur industriel, qui elle aussi est faible par rapport à la moyenne historique. Bref, on paie beaucoup pour la qualité exceptionnelle de cette entreprise.»

M. Maurice admet que le titre est plus cher que celui de son concurrent, le Canadien Pacifique, mais l'évaluation se justifie selon lui, car le CN est le transporteur ferroviaire le plus rentable d'Amérique du Nord.

3. Bristol-Myers Squibb

Des médicaments lucratifs potentiels sont en développement dans les laboratoires de Bristol-Myers Squibb (BMY, 59,83 $ US), anticipe M. Maurice. Le titre de la pharmaceutique new-yorkaise est une bonne façon de miser sur le secteur de la santé, qu'il juge attrayant. Même si l'action s'échange à 20 fois le bénéfice prévu l'an prochain, la valeur du pipeline de médicaments étudiés par la pharmaceutique n'est pas prise en compte par le marché, croit-il. Il y aurait une grande valeur dans la recherche, qui n'est pas encore au stade de faire l'objet d'une divulgation. M. Maurice pense que le pipeline non dévoilé de BMY est l'un des meilleurs de l'industrie.

Dans une note, Damien Conover, de Morningstar, décrit lui aussi le pipeline de nouveaux médicaments comme un enjeu crucial pour l'entreprise. «C'est un filet de sûreté pour elle au moment où de nombreux brevets arrivent à échéance», écrit-il.

Il y a un risque à parier sur les médicaments à venir, toutefois. Les revers connus par l'Opvido en sont un bel exemple. La société veut que ce traitement contre le cancer de la peau soit utilisé pour d'autres formes de cancer. La troisième phase de recherche pour le cancer du poumon a échoué en octobre 2016. En janvier, la société a aussi reporté la demande de certains permis concernant l'Opvido. Le titre a reculé de près de 20 % après cette annonce, mais a repris le terrain perdu depuis. Steve Bélisle a étudié l'entreprise par le passé, mais il n'aimait pas qu'une part trop importante de sa valeur soit associée à des événements binaires (un concept qui se résume par l'expression «ça passe ou ça casse»).

La diversification du portefeuille de Bristol-Myers Squibb réduit le risque lié aux résultats des études cliniques pour un seul médicament, répond Guillaume Maurice. «L'Opvido est un médicament parmi d'autres», nuance-t-il.

 

 

LES CHOIX DE FRANÇOIS ROCHON

Président et gestionnaire de portefeuille chez Giverny Capital

1. MTY

François Rochon, président de Giverny Capital, réitère son vote de confiance envers Stanley Ma, le PDG de Groupe MTY (MTY, 46,99 $). Le gestionnaire de portefeuille qui a obtenu le meilleur rendement lors de la table ronde 2012 remet le franchiseur montréalais dans sa sélection. «Le secret de la sauce, c'est Stanley Ma, dit M. Rochon. Il gère bien l'entreprise et est économe. Malgré les acquisitions, il a très peu dilué l'actionnariat en émettant des actions. Sa participation est de 20 %. Je suis peut-être vieux jeu, mais j'aime ça quand le propriétaire a une grande part dans l'entreprise.»

L'absence de plan de relève pour Stanley Ma, âgé de 67 ans, représente tout de même un risque, intervient Guillaume Maurice, de Gestion de patrimoine Banque Scotia, qui aime le modèle d'entreprise de MTY. François Rochon répond que M. Ma n'est pas «si âgé». S'il quitte l'entreprise, M. Rochon révisera sa thèse, mais pour l'instant, il ne s'inquiète pas de la succession.

Si MTY a connu une forte croissance grâce aux acquisitions, l'absence d'augmentation des ventes des restaurants existants a toujours soulevé des questions chez les analystes. Le gestionnaire de portefeuille ne s'en formalise pas. «On disait ça quand il y avait 2 500 restaurants. Il y en a maintenant 5 000. Il reste de la place pour la croissance. Ça n'a jamais été l'histoire de MTY : j'ai l'action depuis une dizaine d'années et l'entreprise n'a presque jamais augmenté ses ventes comparables. Ça a toujours été une histoire de croissance par acquisitions.»

2. Bank of the Ozarks

Le scepticisme «exagéré» de Wall Street à l'endroit de Bank of the Ozarks (OZRK, 42,47 $ US) permet de mettre la main sur une banque de bonne qualité à un prix attrayant, pense François Rochon, qui met ses collègues au défi de trouver «une banque qui a aussi bien performé depuis 20 ans».

Les activités de la division de financement immobilier à court terme soulèvent des questions. Ces prêts financent le constructeur d'un projet immobilier en attendant que l'acquéreur en prenne possession. Comme il s'agit d'emprunts à court terme, la banque doit renouveler régulièrement son portefeuille de prêts. «Cette division a généré une bonne part de la croissance, explique M. Rochon. Wall Street craint qu'un ralentissement du marché immobilier vienne réduire la croissance.» Résultat : la banque régionale de l'Arkansas s'échange à 12 fois les bénéfices de l'an prochain comparativement à une moyenne de 16 à 17 fois les bénéfices.

L'analyste Timur Braziler, de Wells Fargo, fait partie des sceptiques à Wall Street. Maintenant que Bank of the Ozarks a franchi le seuil de 10 milliards de dollars américains d'actifs sous gestion, l'institution financière doit composer avec un fardeau réglementaire plus grand. Au même moment, Dan Thomas, le dirigeant de cette division, a quitté ses fonctions, insatisfait de devoir s'occuper de la réglementation plutôt que des activités quotidiennes, ajoute l'analyste. Il pense que l'équipe de remplacement demeure bonne, mais tout cela ajoute une couche d'incertitude aux craintes sur l'immobilier. Il émet une recommandation «performance de marché».

Tous à Wall Street ne sont pas pessimistes. Ken A. Zerbe, de Morgan Stanley, qui a commencé à suivre l'institution financière au début du mois d'août, voit les choses de la même manière que M. Rochon. Toutes les inquiétudes offrent l'occasion d'acheter «au rabais un emprunteur premier de classe avec des activités uniques qui ont une forte rentabilité et une croissance rapide».

3. CarMax

Avec 3 % des parts de marché, CarMax (KMX, 65,99 $ US) a encore le potentiel de consolider son industrie, croit François Rochon. Le gestionnaire de portefeuille avait présenté le détaillant de voitures usagées à notre tribune l'an dernier et en 2012.

La société, qui domine un marché fragmenté, a les atouts pour étendre son empreinte, selon lui. «Sa marque est forte, constate-t-il. La convivialité de ses services est difficile à battre. Les clients qui veulent vendre ou acheter une voiture usagée savent à quoi s'attendre. CarMax a vraiment révolutionné le monde de la voiture usagée et je crois qu'on est juste au début.»

CarMax dispose aussi d'une division de financement. Celle-ci représente-t-elle un risque au moment où des économistes s'inquiètent de la dette des ménages américains liée à l'automobile ? «Les prêts à haut risque sont assurés par une tierce partie, répond M. Rochon. Il n'y aurait donc pas de pertes si ces clients ne parvenaient pas à honorer leurs dettes. C'est sûr que les ventes diminueraient si un segment de la clientèle ne parvenait plus à se financer. Cependant, les prêts à haut risque ne représentent que 5 % des ventes de voitures de CarMax. Ce n'est pas une grande partie de sa business.»

L'analyste Ali Faghri, de Susquehanna, croit pour sa part que la progression des ventes comparables pourra difficilement se poursuivre au même rythme. Le multiple s'en trouvera sous pression, estime-t-il dans un rapport consulté en marge de la rencontre. Il a fait passer sa recommandation de «positif» à «neutre».

M. Rochon trouve, quant à lui, que l'évaluation du titre à 15 fois les bénéfices de 2018 ne reflète pas la juste valeur de l'entreprise. «Tout ce qui touche aux voitures est perçu un peu négativement ces temps-ci», souligne-t-il.

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