Les secteurs et les titres favoris de quatre analystes


Édition du 17 Septembre 2016

Les secteurs et les titres favoris de quatre analystes


Édition du 17 Septembre 2016

Par François Normand

[Photo : Nonwarit Pruetisirirot/123RF]

La Bourse américaine vit le plus long cycle haussier de son histoire après celui de 1987 à 2000, alors que les indices trônent à des sommets. Au Canada, le S&P/TSX est aussi à la hausse, même s'il n'a pas encore regagné le terrain perdu en 2015. Est-il encore temps d'investir en Bourse ? Oui, répondent les quatre stratèges que nous avons interviewés. Et pour savoir où investir dans ce contexte, nous leur avons demandé quels sont leurs secteurs préférés et, surtout, quels titres ils aiment le plus en Amérique du Nord.

Stéfane Marion, Économiste et stratège en chef à la Banque Nationale

La Réserve fédérale des États-Unis (Fed) est susceptible de relever son taux directeur. Stéfane Marion choisit deux secteurs qui peuvent très bien performer, peu importe ce que fera la banque centrale américaine : les infrastructures et les sociétés financières.

Pourquoi aime-t-il les infrastructures ?

Dans son dernier budget, le gouvernement fédéral a promis d'investir 120 milliards de dollars sur 10 ans pour entretenir ou construire de nouvelles infrastructures au Canada. Ces fonds serviront notamment à protéger les infrastructures existantes contre l'impact des changements climatiques.

Ses titres préférés

SNC-Lavalin (SNC, 56,25 $) : la firme d'ingénierie est bien positionnée au Canada, selon Stéfane Marion. «Actuellement, 20 % des revenus de Lavalin proviennent de l'infrastructure, dont 9 % du Canada», précise-t-il.

Par exemple, SNC-Lavalin fait partie du consortium qui construit le nouveau pont Champlain, à Montréal. Les deux tiers des analystes recommandent d'acheter le titre. La cible est à 62,15 $.

WSP Global (WSP, 43,62 $) : la firme d'ingénierie est également bien exposée aux dépenses d'infrastructures au Canada. À ce jour, 11 % de ses revenus totaux tirés du secteur des infrastructures proviennent du Canada, selon Maxim Sytchev, analyste à la Financière Banque Nationale. WSP a réalisé plusieurs projets au pays, entre autres à l'échelon municipal, avec l'accroissement de la capacité d'évacuation du barrage Sartigan, à Saint-Georges, au Québec. Des 11 analystes qui suivent le titre, huit recommandent de l'acheter et trois de le conserver. La cible est à 45,95 $.

Pourquoi aime-t-il les sociétés financières ?

Parce que, si la Fed augmente son taux directeur, il y aura une hausse des taux d'intérêt à long terme. «Cette situation profitera notamment aux banques canadiennes», dit Stéfane Marion. Autre facteur favorable : les sociétés financières versent actuellement un dividende avoisinant les 4 %, explique-t-il.

Ses titres préférés

FINB BMO équipondéré S&P/TSX banques (ZEB, 24,26 $) : au lieu de recommander un titre en particulier, Stéfane Marion préfère suggérer l'achat d'un fonds négocié en Bourse (FNB). Celui qu'il propose comprend les cinq grandes banques canadiennes : la Banque Nationale, la Banque Royale, la Banque de Montréal, la Banque Scotia et la Banque TD. Depuis cinq ans, la valeur du fonds a bondi de 45 % pour s'établir à 24,34 $.

Quels sont les risques associés à ce marché haussier ?

Une possible hausse du taux directeur de la Fed est sur l'écran radar de Stéfane Marion. Selon lui, le principal risque est plutôt d'ordre politique. Au cours des 12 prochains mois, il y aura des élections (présentielles et législatives) aux États-Unis, en France et en Allemagne. Sa crainte ? Qu'une éventuelle «remise en cause» de la mondialisation au profit du protectionnisme nuise à la croissance. Selon lui, pour favoriser la Bourse, il faut des gouvernements qui ne désavantagent pas la croissance économique.

Luc Vallée, Stratège en chef chez Valeurs mobilières Banque Laurentienne

Luc Vallée (et son collègue Éric Corbeil, économiste principal chez VMBL) fixe son choix sur les secteurs des sociétés de placement immobilier et des services de télécommunications. Le premier permet de se protéger de l'inflation, tandis que le second offre des dividendes intéressants, selon lui.

Pourquoi aime-t-il les sociétés de placement immobilier ?

Il les aime parce que leurs taux de dividende sont supérieurs à la moyenne du marché. «Si la tendance des dernières années se poursuit, ces dividendes devraient augmenter lentement, mais de façon régulière et prévisible.» À ses yeux, l'occasion d'investir dans ce secteur «est excellente» à l'heure actuelle. D'une part, parce que les perspectives de hausses de taux d'intérêt demeurent limitées et, d'autre part, parce que l'immobilier permet aussi de se protéger contre les risques d'inflation.

Ses titres préférés

Life Storage (LSI, 91,91 $ US) : cette entreprise d'entreposage était connue sous le nom de Sovran Self Storage jusqu'en juillet. La société verse aussi un dividende de 4,30 % - et il augmente rapidement depuis plusieurs années. Autre point positif : «les bénéfices de l'entreprise sont stables et prévisibles», dit Luc Vallée. Cinq analystes recommandent l'achat du titre, tandis que huit suggèrent de le conserver et un recommande de le vendre. La cible est à 102,67 $ US.

Allied Properties Real Estate (AP.UN, 37,20 $) : la société gère des immeubles dans les grands centres urbains du Canada. Elle verse un dividende de 3,9 %. Selon Luc Vallée, Allied Properties Real Estate est toujours en croissance et son taux d'endettement est raisonnable. Le consensus le voit grimper à 40,65 $. La majorité des 10 analystes qui suivent le titre recommandent de l'acheter. Ils sont six à en conseiller l'achat, alors que quatre suggèrent de le conserver.

Pourquoi aime-t-il les services de télécommunications ?

Le secteur se distingue par son taux de dividende, qui est le plus élevé parmi les différents secteurs au Canada, selon Luc Vallée. «Le taux de dividende estimé des titres du secteur des télécommunications au cours des 12 prochains mois est de 4,2 %, ce qui se compare avantageusement aux 3 % estimés pour l'indice S&P/TSX.» Dans l'éventualité d'un repli des marchés, le créneau des télécoms est considéré comme un secteur défensif, dit Luc Vallée.

Ses titres préférés

AT&T (T, 40,95 $ US) : une amélioration de l'efficacité opérationnelle de la société devrait profiter au titre, alors qu'on prévoit une augmentation des marges bénéficiaires d'ici deux ans. Luc Vallée souligne que le titre possède un taux de dividende élevé à 4,7 %. La cible du consensus est de 43,54 $ US. Par contre, les analystes sont divisés : 16 recommandent de l'acheter, 16 de le conserver et 3 de le vendre.

BCE (BCE, 61,86 $) : une saine gestion des coûts devrait entraîner une amélioration des marges bénéficiaires pour chacune des divisions du géant canadien des communications d'ici deux ans, selon Luc Vallée. Ces gains de profitabilité susciteront une croissance des flux de trésorerie ainsi que du dividende (4,4 %) versé par l'entreprise. La cible du consensus s'établit à 63,22 $. Une minorité des 19 analystes formulent une recommandation d'achat, soit 6 par rapport à 13 qui suggèrent de conserver le titre.

Quels sont les risques associés à ce marché haussier ?

Les entreprises ont trop de stocks, affirme Luc Vallée. «Par exemple, le ratio des stocks par rapport aux ventes des entreprises aux États-Unis est au même niveau que lors de la dernière récession.» Ensuite, un resserrement des conditions de crédit aux États-Unis pourrait être néfaste au marché haussier actuel. Enfin, l'élection présidentielle de novembre aux États-Unis pourrait nuire aux perspectives de croissance mondiale et toucher l'économie canadienne, et ce, en raison des positions protectionnistes des candidats Donald Trump et Hillary Clinton.

Martin Roberge, Directeur général, stratégie du portefeuille, Amérique du Nord, chez Canaccord Genuity

Martin Roberge recommande d'investir dans le secteur des équipements de communication et dans celui des producteurs d'or, car ils ont tous les deux un fort potentiel de croissance.

Pourquoi aime-t-il les équipementiers en communication ?

«Ce secteur affichera une croissance supérieure à l'économie au cours des prochaines années», dit-il. L'augmentation du nombre d'utilisateurs d'Internet dans le monde et des services s'y rattachant crée une demande constante d'équipements liés aux transmissions de données sur la bande passante. L'infonuagique nécessite l'achat d'équipements qui se rapportent à la réseautique, à l'entreposage et au traitement de données informatiques. Enfin, l'Internet des objets et la voiture requièrent des équipements de transmission pour le sans-fil et un plus large déploiement des réseaux 4G et 5G.

Ses titres préférés

Sandvine (SVC, 3,70 $) : l'entreprise développe et commercialise des solutions de contrôle pour les fournisseurs de services en télécommunications. La valeur de l'action représente une aubaine par rapport aux autres acteurs de l'industrie, notamment au chapitre des ratios clés, comme la valeur totale par rapport aux ventes ou le cours/bénéfice, selon Robert Young, analyste chez Canaccord Genuity. Le titre vaut 3,64 $. Le consensus entrevoit un mince potentiel de croissance avec une cible de 3,93 $. Par contre, les trois quarts des huit analystes qui suivent le titre en recommandent l'achat (six), tandis que les deux autres suggèrent de le conserver.

Celestica (CLS, 14,06 $) : la société fabrique des composants électroniques. La priorité de Celestica est d'accroître ses ventes et sa marge bénéficiaire, et ce, en augmentant ses investissements dans le développement et la commercialisation de ses produits, souligne Robert Young, de Canaccord Genuity. Le consensus a une cible de 15,41 $. Des 12 analystes qui suivent le titre, la majorité préconise de le conserver. Quatre recommandent de l'acheter, sept de le conserver et un seul de le vendre.

Pourquoi aime-t-il les aurifères ?

La «correction du secteur» offre un point d'entrée intéressant aux investisseurs qui ont manqué la phase haussière au début de 2016 relativement à la dépréciation du dollar américain, dit Martin Roberge. Depuis cinq ans, le prix de l'or a dégringolé de 31 %, à 1 310 $ US l'once. Toutefois, à partir de son creux du 17 décembre 2015, le cours du métal jaune a crû de 25 %. Malgré tout, les investisseurs peuvent encore faire des gains, affirme Martin Roberge. «Même si la volatilité restera élevée au cours des prochains mois, en raison de la possibilité que la Réserve fédérale annonce une deuxième hausse de son taux directeur, le secteur devrait éventuellement rebondir et amorcer un nouveau cycle haussier.»

Ses titres préférés

B2Gold (BTO, 3,81 $) : ce producteur d'or de Vancouver exploite des mines en Namibie (dans le sud de l'Afrique), au Nicaragua et aux Philippines. Depuis cinq ans, le titre a perdu près de 12 % de sa valeur. Toutefois, le cours a plus que doublé durant la dernière année. Le potentiel de croissance de l'entreprise et sa performance du deuxième trimestre - supérieure aux attentes - rendent le titre attrayant, selon Rahul Paul, analyste chez Canaccord Genuity. Le consensus a une cible de 5,24 $. Quatorze des seize analystes qui suivent le titre recommandent de l'acheter. Les deux autres émettent la recommandation «conserver».

Agnico Eagle (AEM, 71,80 $) : le producteur d'or de Toronto exploite sept mines (quatre au Canada, deux au Mexique et une en Finlande). L'action stagne depuis cinq ans, mais sa valeur a plus que doublé au cours de la dernière année. Les «excellentes nouvelles» concernant les résultats d'exploration au deuxième trimestre rendent le titre attrayant, selon Tony Lesiak, analyste chez Canaccord Genuity. Selon le consensus, le titre grimpera à 75,76 $. Les 23 analystes qui suivent l'entreprise sont toutefois divisés : 10 recommandent d'acheter, 10 de conserver et 3 de vendre.

Quels sont les risques associés à ce marché haussier ?

L'appréciation du dollar américain représente un risque, car 75 % de la croissance économique mondiale provient des pays émergents, dont la politique monétaire est étroitement tributaire du billet vert, souligne Martin Roberge. «Une forte poussée du dollar américain et une dépréciation simultanée des devises émergentes pourraient mettre fin au cycle d'assouplissement monétaire des banques centrales dans ces pays.» Une dépréciation supplémentaire de la monnaie chinoise constitue aussi un risque aux yeux du stratège. «Par ricochet, cela pourrait entraîner une vague de dévaluation compétitive des monnaies asiatiques.»

Stéphane Rochon, Directeur général, responsable de la gestion privée chez BMO Marchés des capitaux

Stéphane Rochon apprécie les secteurs cycliques, car ils affichent historiquement une meilleure performance quand les conditions économiques s'améliorent. C'est pourquoi il mise notamment sur l'énergie et les entreprises industrielles.

Pourquoi aime-t-il l'énergie ?

Il rappelle qu'il a été «extrêmement négatif» à l'égard des perspectives de ce secteur jusqu'à la fin de 2015, et ce, en raison de la chute du prix du pétrole. «Mais là, nous sommes redevenus positifs», dit-il. Un meilleur équilibre entre l'offre et la demande l'a convaincu de changer d'idée. Au tournant de 2016, il y avait un surplus d'offres d'environ 2,5 millions de barils par jour dans le monde. Or, en ce moment, le marché est «à peu près balancé», précise le stratège. Résultat ? Les prix du pétrole sont repartis à la hausse. Depuis le creux du 11 février, le West Texas Intermediate a bondi de près de 70 %.

Ses titres préférés

Canadian Natural Resources (CNQ, 41,35 $) : l'entreprise de Calgary produit du pétrole et du gaz naturel. «Cette société est très bien gérée, avec une structure de coût qui n'est pas élevée», dit Stéphane Rochon. De plus, l'entreprise verse un dividende de 2,22 %, «raisonnable et soutenable», souligne le stratège. Le consensus a une cible de 45,70 $. Des 26 analystes qui suivent le titre, 20 recommandent de l'acheter et 6 de le conserver.

Raging River Exploration (RRX, 10,93 $) : la société de Calgary se spécialise dans l'exploration pétrolière et gazière. «C'est l'un des rares titres qui combinent des actifs de qualité à des coûts d'exploration très bas», soutient Stéphane Rochon. Selon lui, l'entreprise augmente sa production, mais sans trop dépenser. Quinze des dix-sept analystes formulent une recommandation d'achat, tandis que deux suggèrent de le conserver. La cible est à 13,03 $.

Pourquoi aime-t-il les industriels ?

Dans une perspective de reprise économique, les entreprises qui offrent des services aux autres entreprises (B2B) sont bien positionnées, selon Stéphane Rochon. Par exemple, l'économie américaine devrait croître de 2,2 %, en 2016, et de 2,5 %, en 2017, selon le Fonds monétaire international. Au Canada, le PIB devrait augmenter respectivement de 1,4 % et de 2,1 %.

Ses titres préférés

Le Canadien National (CNR, 83,53 $) et le Canadien Paficique (CP, 199,78 $) : leurs résultats se sont récemment améliorés, ce qui crée un climat favorable pour ces entreprises. «On pense qu'on aura un point d'inflexion en 2017 en ce qui a trait aux volumes de transport», dit Stéphane Rochon. Depuis deux ans, les volumes de transport des ressources naturelles ont diminué en Amérique du Nord. Cela avait nui au CN et au CP. Le consensus estime que le titre du Canadien National grimpera à 85,23 $ et celui du Canadien Pacifique à 212,95 $. La majorité des analystes recommandent de conserver le CN. Par ailleurs, du côté du CP, une majorité suggèrent d'acheter le titre.

Emerson Electric (EMR, 52,56 $ US) : l'entreprise du Missouri offre des produits essentiels pour les entreprises, car elle fabrique des systèmes qui aident les entreprises manufacturières et les producteurs d'hydrocarbures à être plus productifs, explique Stéphane Rochon. «Par exemple, l'industrie pétrolière utilise ses logiciels pour contrôler la production dans les puits de pétrole et les raffineries.» Le consensus entrevoit que le titre reculera légèrement à 51,28 $. Les 25 analystes qui suivent l'entreprise sont divisés : 4 recommandent d'acheter le titre, 16 de le conserver et 5 de le vendre.

Quels sont les risques associés à ce marché haussier ?

Le principal risque est une poussée de l'inflation, non pas en 2017, mais à plus long terme, explique Stéphane Rochon. «On le voit déjà avec la pression à la hausse sur les salaires aux États-Unis.» Si l'inflation augmente, cela pourrait provoquer une «certaine débandade» dans le marché obligataire et pousser les taux d'intérêt à la hausse. «À long terme, cela pourrait devenir un risque pour les actions, dit-il. Mais il s'agit ici d'un risque dans 2 à 3 ans plutôt qu'au courant des prochains trimestres.»

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