Cinq titres québécois qui misent sur l'international


Édition du 26 Mars 2016

Cinq titres québécois qui misent sur l'international


Édition du 26 Mars 2016

[Photo : Shutterstock]

Dans la foulée de notre édition spéciale sur l'exportation, des analystes et des gestionnaires de portefeuille font le point sur cinq titres de sociétés canadiennes qui misent sur l'international pour promouvoir les ventes de leurs produits et services.

1. CAE : le plan est clair, mais les attentes sont élevées

Le fabricant de simulateurs de vol et fournisseur de services de formation est l'exemple parfait du fleuron québécois qui s'appuie sur une présence mondiale pour développer ses affaires. La société montréalaise, qui oeuvre dans les secteurs civil, de la défense et de la santé, compte plus de 8 000 employés répartis dans 160 emplacements et 35 pays. Ses revenus se divisent essentiellement entre l'industrie civile (58 %) et l'industrie militaire (38 %). Le carnet de commandes demeure robuste, à 6,36 milliards de dollars, en hausse de 28 % sur un an. Le 10 février, la société a cependant présenté des résultats financiers modestes qui n'ont pas impressionné les investisseurs.

Une meilleure rentabilité exigée

À la suite de la publication des résultats du troisième trimestre, Tim James, analyste chez Valeurs mobilières TD, maintient une recommandation d'achat. Son cours cible de 17 $ s'appuie sur un multiple de 17 fois le bénéfice par action prévu pour l'exercice 2017. Cible similaire de 16,25 $ pour Turan Quettawala, de la Banque Scotia, qui est cependant neutre sur le titre en raison des inquiétudes qui persistent dans le secteur aéronautique. «Nous reconnaissons que CAE est désormais une entreprise moins cyclique qu'auparavant, mais elle n'est pas immunisée contre les aléas économiques», résume l'analyste. Les turbulences des économies mondiales pourraient nuire à l'achalandage des lignes aériennes, et conséquemment, aux commandes d'avions et aux services de simulation de vol.

Ben Cherniavsky, de Raymond James, diminue sa cible de 16 à 15 $. «Le cours du titre tient déjà compte d'une amélioration significative et éventuelle de la performance opérationnelle de l'entreprise, malgré les progrès limités enregistrés dans les dernières années», résume-t-il. La direction de l'entreprise montréalaise s'est engagée à augmenter les marges pour le quatrième trimestre de 2016, particulièrement dans le secteur de l'aviation civile. Pourtant, des objectifs similaires ont été fixés - et manqués - par le passé. «Cette tendance persistante à présenter des marges et des bénéfices décevants explique la raison pour laquelle nous adoptons une approche de style "montrez-moi" relativement à ce titre», explique M. Cherniavsky.

Plusieurs analystes rappellent cependant qu'un dollar canadien faible avantage CAE, qui génère la majorité de ses revenus en dollars américains, tandis que plusieurs de ses centres de coût sont au Canada. Son solide bilan et sa capacité à générer des flux de trésorerie importants sont deux facteurs susceptibles de faciliter l'acquisition de plus petites sociétés. «CAE est bien gérée et tire bien son épingle du jeu malgré le contexte actuel», dit François Têtu, vice-président et gestionnaire de portefeuille chez Valeurs mobilières Desjardins.

CAE

Revenus (2015)

› 36 % Amérique centrale, Amérique du Sud, Asie, Australie, Canada

› 33 % États-Unis

› 31 % Europe

Recommandations des analystes

› 5 Surperformance

› 5 Conserver

› 1 Achat

› 1 Sous-performance

Cible moyenne : 16,50 $

Source : Bloomberg

2. CGI: à la recherche de la prochaine proie

La stratégie de la multinationale montréalaise CGI pour faire croître son bénéfice par action repose fortement sur l'acquisition disciplinée de sociétés oeuvrant dans des créneaux ciblés et à fortes marges bénéficiaires.

«À l'image d'Alimentation Couche-Tard, CGI est passée maître dans l'intégration des sociétés qu'elle acquiert. Les dirigeants ont entre autres réalisé un travail exceptionnel pour améliorer la rentabilité de Logica à la suite de son intégration», illustre Marc L'Écuyer, gestionnaire de portefeuille à la firme Cote 100. Des propos qui trouvent écho auprès de Steve Bélisle, gestionnaire de portefeuille principal chez Gestion d'actifs Manuvie. «La direction veut doubler la taille de l'entreprise au cours des sept prochaines années», dit-il.

Des vents arrière pour soutenir le titre

Si tout le monde s'entend pour dire que la prochaine acquisition reste le catalyseur le plus important pour propulser le titre, plusieurs facteurs militent aussi en faveur du titre de l'entreprise indépendante de services de technologie de l'information, la cinquième en importance dans le monde. Le carnet de commandes est bien rempli (à 21,5 milliards de dollars), le taux de change, favorable (187,1 millions de dollars au seul premier trimestre de 2016), et elle rachète de ses actions. À ce chapitre, elle a notamment conclu le 3 mars une entente privée avec la Caisse de dépôt et placement du Québec pour racheter 7,11 millions d'actions au prix de 56,24 $. La CDPQ demeure toujours actionnaire de CGI à hauteur de 16,4 %.

«J'apprécie la capacité des dirigeants à bien gérer les capitaux : Cote 100 est actionnaire de CGI depuis une dizaine d'années», explique Marc L'Écuyer, qui juge néanmoins le titre bien évalué au cours actuel. Alors que la majorité des entreprises du secteur s'échangent à un ratio cours/bénéfice de 15,9 fois pour l'exercice 2016, CGI et Accenture (ACN, 108,56 $ US) bénéficient d'une évaluation rehaussée, à 16,5 et à 19,6 fois les bénéfices prévus, respectivement.

Steve Bélisle considère qu'un bon point d'entrée pour le titre se situe entre 55 et 60 $. Une donnée l'intéresse particulièrement. «Lorsque CGI développe une solution pour un client, elle conserve la propriété intellectuelle qui lui est associée dans l'objectif de la déployer auprès de clients supplémentaires. Ces solutions représentent désormais environ 16 % de ses revenus», dit-il.

CGI

Revenus (au premier trimestre de 2016)

› 28 % États-Unis

› 15 % Royaume-Uni

› 14 % Canada

› 13 % France

› 30 % Autres

Recommandations des analystes

› 12 Surperformance

› 1 Achat

› 1 Vendre

› 4 Conserver

Cours cible : 61,70 $

Cours actuel (GIB.A) : 58,76 $

Source : Bloomberg

3. Magna International : le marché automobile tiendra-t-il ?

Le fabricant canadien de pièces automobiles Magna International fait figure d'aubaine ces temps-ci. «Le titre le plus sous-évalué du lot à seulement huit fois les bénéfices», estime François Têtu, de Valeurs mobilières Desjardins. De 2005 à 2015, Magna s'est en moyenne négocié à 11 fois le bénéfice. Qu'est-ce qui explique actuellement un tel désaveu des investisseurs ?

La faute revient au scandale Volkswagen qui, par malheur, arrive à un moment où l'économie mondiale est incertaine. «Un ralentissement des ventes de Volkswagen pourrait survenir en Europe et entraîner une diminution des revenus ou des marges de Magna», soutient Todd Coupland, de Marchés mondiaux CIBC. Et ce n'est pas sa seule inquiétude. Il rappelle que, dans l'histoire, des taux d'intérêt en hausse ont généralement pesé sur les ventes de véhicules.

Les investisseurs semblent craindre une diminution éventuelle des unités vendues, surtout aux États-Unis, là où un fort rebond a été enregistré depuis la crise financière de 2008-2009. Steve Bélisle, de Gestion d'actifs Manuvie, n'entrevoit pas de catastrophe, mais reste prudent. «Le consommateur américain est en excellente santé financière. Le titre est-il attrayant au niveau actuel ? Oui, mais il demeure à risque si le cycle de l'industrie automobile se détériore», dit-il.

Les astres devront être bien alignés

En s'appuyant sur un bilan sans dette à long terme, Magna s'est lancée dans l'acquisition judicieuse de l'équipementier spécialisé dans les transmissions manuelles, automatiques et hybrides Getrag, avec pour objectif de développer sa division consacrée aux transmissions. Les acquisitions ne sont pas son seul relais de croissance. «Grâce à des lancements de nouvelles plateformes automobiles, les ventes de Magna devraient croître de plus de 10 % annuellement au cours des trois prochaines années, un chiffre nettement supérieur à la moyenne de l'industrie», remarque Steve Bélisle.

Pour l'année en cours (2016), Magna espère dégager un bénéfice de 4,95 à 5,25 $ US par action.

Selon M. Coupland, plusieurs conditions devront être réunies pour espérer atteindre l'objectif. Magna doit notamment racheter à des fins d'annulation 20 millions d'actions et améliorer ses marges bénéficiaires en Europe. Le prix cible de CIBC est à 45 $ US et repose sur un multiple de 9 fois le bénéfice par action prévu. L'analyste considère que le titre pourrait baisser jusqu'à 32 $ US si le bénéfice par action chutait tout près de la barre des 4 $ US.

Peter Sklar, de BMO Marchés des capitaux, est plus optimiste. Sa recommandation «surperformance» et sa cible à 50 $ US laissent entrevoir un rendement potentiel de 20 %. Alors que les prévisions de la direction sont conformes à ses attentes, il se dit néanmoins agacé par le ralentissement économique observé à l'échelle mondiale. La présentation des résultats du quatrième trimestre est d'ailleurs teintée du déclin de son bénéfice et de ses ventes.

Magna International

Revenus (troisième trimestre de 2015)

› 56 % Amérique du Nord

› 29 % Europe

› 6% Autres

Recommandations des analystes

› 2 Achat

› 8 Surperformance

› 5 Conserver

Cours cible : 58,30 $ US

Cours actuel (NY, MGA) : 42,78 $ US

Source : Bloomberg

4. Stella-Jones : sur la bonne voie, mais avec beaucoup d'espoir

La progression du titre du fabricant de traverses de chemin de fer et de poteaux de bois Stella-Jones semble freinée par des craintes concernant le niveau d'investissements en capital que comptent faire les sociétés nord-américaines de chemin de fer en 2016.

Des craintes qui n'inquiètent cependant pas outre mesure les analystes associés au dossier : le CN, un important client, vient plutôt d'augmenter l'enveloppe prévue à cette fin. De plus, les investissements initialement pressentis dans l'entretien des voies ferrées risquent d'être la dernière catégorie de dépenses à écoper dans le grand tout.

À l'autre bout du spectre, les optimistes disent qu'une série d'acquisitions bien ciblées, la vigueur de l'économie américaine, la chute du huard et la hausse des prix de vente contribueront à fouetter la rentabilité de Stella-Jones. Le moment serait-il venu de prendre le train ?

Le titre s'échange actuellement à un multiple assez haut d'environ 21 fois le bénéfice de l'exercice 2015. «L'évaluation est riche. Les investisseurs semblent disposés à payer une prime pour une croissance potentiellement plus élevée», remarque François Têtu, de Valeurs mobilières Desjardins.

Une émission d'actions en vue ?

Bien dirigée par son président Brian McManus, la société montréalaise consolide son industrie avec l'objectif de percer de nouveaux marchés, s'adonnant à une stratégie systématique d'acquisitions effectuées à bon prix. Stella-Jones a annoncé au début de février des ententes de principe pour l'acquisition de deux entreprises de fabrication de poteaux chez nos voisins du Sud. L'achat de Kisatchie, en Louisiane, et de Lufkin Creosoting, au Texas, vient ainsi renforcer ses activités dans le sud des États-Unis.

Leon Aghazarian, de la Financière Banque Nationale, rappelle cependant que ces deux acquisitions, effectuées à un prix combiné d'environ 120 M$ US, rehaussent le ratio d'endettement au maximum de la zone de confort de la direction. Puisque Stella-Jones souhaite conserver des munitions pour d'éventuelles acquisitions bien ciblées - la liste de candidats potentiels est bien fournie -, M. Aghazarian considère qu'une émission d'actions est possible. «En fonction des acquisitions historiques, nous estimons que ces transactions seront financées à 65 % par de la dette et à 35 % par une émission de titres, ramenant ainsi le ratio de la dette nette sur le bénéfice avant intérêts, impôts, et amortissement à moins de 2,5 fois, impliquant ainsi une dilution de 1,5 %», explique-t-il.

Benoit Poirier, de Desjardins Marché des capitaux, a récemment fait passer sa recommandation de «conserver» à «achat» en raison de l'impact positif des acquisitions précédemment mentionnées. Sa cible de 51 $ ne tient pas compte, cependant, d'une éventuelle émission d'actions. Sara O'Brien, de RBC Marchés des capitaux, est plus optimiste. Sa cible de 57 $ laisse entrevoir un potentiel de gain de 20 %. Les investisseurs à la recherche de croissance, qui désirent miser sur un secteur défensif et espèrent voir le dividende prendre du tonus avec le temps, peuvent sans doute faire fi d'une éventuelle émission d'actions.

Stella-Jones

Revenus (au 31 décembre 2014)

› 81,6 % États-Unis

› 18,4 % Canada

Recommandations des analystes

› 6 Surperformance

› 1 Conserver

Cours cible : 53,45 $

Cours actuel (SJ) : 46,00 $

Source : Bloomberg

5. WSP Global : titre déprimé au potentiel attrayant

Malgré l'atteinte d'un creux annuel récemment, le titre de l'ingénieur-conseil WSP Global - anciennement Genivar - reste l'une des coqueluches du secteur. La société dirigée par Pierre Shoiry est bien positionnée pour bénéficier du programme d'infrastructures promis par le nouveau gouvernement libéral au Canada. Elle pourrait également profiter du rebond durable de la construction non résidentielle aux États-Unis.

Une situation qui n'échappe pas à l'oeil de Steve Bélisle, gestionnaire de portefeuille principal chez Gestion d'actifs Manuvie. «Les États-Unis en sont présentement à adopter le projet de loi "FAST", qui prévoit 300 G$ US en dépenses d'infrastructures sur une période de cinq ans. En Europe, les gouvernements ont largement sous-investi en infrastructures au cours des 10 dernières années et devront éventuellement faire du rattrapage», explique-t-il.

Le meilleur à venir ?

Il n'y a pas que les caractéristiques défensives du secteur qui expliquent le potentiel de rebond du titre. François Têtu, vice-président et gestionnaire de portefeuille chez Valeurs mobilières Desjardins, estime qu'un solide bilan, un dividende de 3,9% et d'importants flux de trésorerie militent également en faveur de WSP. «Ce titre est moins exposé au secteur des ressources naturelles que celui de SNC-Lavalin», ajoute-t-il. Steve Bélisle considère lui aussi le titre comme attrayant. «Les investisseurs éprouvent des craintes quant aux revenus générés dans le secteur de l'énergie, mais ceux-ci ne représentent pourtant que 5 % des recettes», nuance-t-il. Autre élément positif susceptible de propulser le chiffre d'affaires : l'impact de la devise, qui pourrait à elle seule faire grimper les bénéfices de 7 % en 2016, par rapport à 2015.

Canaccord Genuity a récemment renouvelé une recommandation d'achat pour le titre, tout en ajustant sa cible de 50 à 45 $. Yuri Lynk indique qu'il a en haute estime la société d'ingénierie, mais préfère réduire ses prévisions de croissance et de marge en raison de la faiblesse actuelle du prix des ressources naturelles. Les analystes de Raymond James, de leur côté, trouvent depuis plusieurs mois que le titre est l'une des meilleures idées d'investissement de leur univers de couverture. Ils lui accolent une recommandation «surperformance» et une cible à 50 $, pour un rendement potentiel de 25 %.

WSP souhaite consolider le marché très fragmenté des services d'ingénierie à l'échelle globale, pour réaliser d'importantes synergies de coûts. Dans une note de recherche, Benoit Poirier, de Desjardins Marché des capitaux, rappelle d'ailleurs que la direction a confiance d'ajouter 1,3 G$ en revenus par l'intermédiaire d'acquisitions éventuelles d'ici 2018. Ses revenus actuels sont de 4,4 G$.

WSP Global

Revenus (9 premiers mois de 2015)

› 17,2 % Canada

› 82,8 % International

Recommandations des analystes

› 2 Achat

› 3 Conserver

› 7 Surperformance

Cours cible : 50 $

Cours actuel (WSP) : 36,53 $

Source : Bloomberg

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