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Washington lance une enquête sur la taxe française sur les GAFA

AFP|Publié le 11 juillet 2019

«La France cible injustement certaines entreprises technologiques basées aux États-Unis.»

Les États-Unis ont annoncé mercredi avoir lancé une enquête sur les effets de la taxe visant les géants du numérique qui est sur le point d’être adoptée par la France.

L’enquête –ouverte sous l’article de la loi du commerce dit «Section 301»– pourrait, en fonction des conclusions auxquelles elle aboutit, entraîner des mesures de représailles américaines.

«Les États-Unis sont très préoccupés par le fait que la taxe sur les services numériques, qui devrait être adoptée par le Sénat français demain (jeudi), vise injustement les entreprises américaines», a déclaré Robert Lighthizer, le représentant américain du Commerce (USTR) dans un communiqué.

«Le président (Donald Trump) a ordonné que nous examinions les effets de cette législation et déterminions si elle est discriminatoire ou déraisonnable et si elle constitue un poids ou une restriction du commerce des États-Unis», a-t-il expliqué.

L’un des lobbies de la Silicon Valley, CCIA (The Computer & Communications Industry Association), s’est immédiatement félicité de cette initiative.

«La taxe française obligerait rétroactivement les services américains exportant vers la France à reverser un pourcentage de leurs revenus depuis le début de cette année aux autorités fiscales françaises», déplore CCIA dans un communiqué.

«La proposition française est similaire à celle que les États membres de l’UE ont abandonné plus tôt cette année après que les conflits avec le droit commercial international soient devenus évidents», estime-t-il.

En France, l’Assemblée nationale avait donné jeudi dernier son ultime feu vert au projet de loi, qui doit faire de la France un des pays pionniers en la matière. Le texte sera soumis au Sénat jeudi pour être adopté définitivement par le Parlement.

Dite «taxe Gafa» (Google, Amazon, Facebook et Apple), cette mesure s’inspire largement d’un projet européen qui n’a pas abouti en raison des réticences de plusieurs pays de l’Union européenne. Elle vise, selon le gouvernement français, à «rétablir la justice fiscale» face aux géants du numérique.

Concrètement, la taxe ciblerait les entreprises qui réalisent un chiffre d’affaires sur leurs activités numériques de plus de 750 millions d’euros dans le monde, dont 25 millions d’euros pouvant être rattachés à des utilisateurs localisés en France.

L’idée est de les imposer à hauteur de 3% du chiffre d’affaires réalisé en France notamment sur la publicité ciblée en ligne, la vente de données à des fins publicitaires et la mise en relation des internautes par les plateformes.

«Justice fiscale»

Cette taxe, qui devrait rapporter quelque 400 millions d’euros cette année et 650 millions en 2020, devrait s’appliquer à une trentaine de groupes, nombre d’entre eux américains mais pas exclusivement. Des groupes tels que Meetic, Airbnb, Instagram ou encore le français Criteo seraient ainsi concernés.

«La structure de la nouvelle taxe proposée ainsi que les déclarations de responsables donnent à penser que la France cible injustement certaines entreprises technologiques basées aux États-Unis», explique l’administration Trump.

Les services de l’USTR rappellent par ailleurs que la Section 301 confère au représentant au commerce «le pouvoir général d’enquêter sur les pratiques commerciales déloyales d’un pays étranger et d’y répondre».

Dans le cadre de cette enquête, l’administration Trump va procéder comme il est d’usage à une période de consultations et d’audiences publiques.

«Les États-Unis poursuivront leurs efforts avec les autres pays de l’OCDE (Organisation de coopération et de développement économiques) pour parvenir à un accord multilatéral afin de relever les défis du système fiscal international posés par une économie mondiale de plus en plus numérisée», ajoute l’USTR.

Pour le ministre français de l’Économie Bruno Le Maire, il s’agit de «rétablir la justice fiscale face aux géants du numérique». Et cette solution unilatérale doit servir de «levier» dans les négociations internationales, dans l’attente d’un aboutissement des travaux de l’OCDE.

Le ministre a souhaité une validation du projet de loi par le Conseil constitutionnel pour «renforcer» la «position politique» de la France «dans les instances du G7, du G20 et de l’OCDE pour mener ce combat sur la taxation du numérique».