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Productivité: la SAQ a fait un pas dans la bonne direction

La Presse Canadienne|Publié le 29 janvier 2020

«Tout indique que le virage technologique a produit les résultats escomptés.»

Si la Société des alcools du Québec (SAQ) a été en mesure de réaliser des gains d’efficacité depuis 2015, c’est surtout grâce à une diminution de la taille son effectif, souligne une nouvelle étude du Centre sur la productivité et la prospérité (CPP) de HEC Montréal, qui prévient que l’on ne pourra compter indéfiniment sur cette stratégie.

Publié mercredi, le document invite également la SAQ à accélérer le déploiement d’initiatives technologiques contribuant à améliorer son fonctionnement, comme le programme de fidélisation «Inspire» et le service «Cliquez, achetez, ramassez» permettant de magasiner en ligne avant de récupérer sa commande en magasin ou de la faire livrer à domicile.

«C’est un premier pas dans la bonne direction parce que la productivité s’améliore, a expliqué l’économiste Robert Gagné, qui a participé à la rédaction de l’étude. La société d’État s’est tournée vers la rationalisation, qui est la façon la plus évidente au départ quand on veut (améliorer l’efficacité). Mais on va finir par atteindre un plateau.»

En 2016, le CPP avait publié une étude soulignant que la SAQ, qui dispose d’un monopole presque complet sur la vente de vins et spiritueux, n’avait pas amélioré son efficacité depuis environ trois décennies. Ainsi, la croissance du dividende versé au gouvernement _ son actionnaire _ était attribuable à la hausse des ventes plutôt qu’une amélioration des façons de faire.

Trois ans plus tard, l’équipe de M. Gagné a décidé de brosser un portrait mis à jour.

Moins de personnel

Ainsi, au terme de l’exercice 2018-2019, le niveau de productivité de la SAQ était plus élevé de 5,43 points de pourcentage comparativement au sommet atteint en 1989. Au cours des trois dernières années financières complètes, le rythme annuel de productivité au travail a en moyenne progressé de 1,9 %.

Cette progression serait essentiellement attribuable à la diminution du nombre d’employés en équivalent à temps complet, qui a fléchi de 7,6 pour cent depuis 2015 pour s’établir à 5044 postes à la fin de l’exercice 2018-2019.

Grâce aux gains de productivité, l’étude souligne que la société d’État a simultanément pu continuer à faire croître son bénéfice net, qui s’est chiffré à 1,15 milliard $ l’an dernier, en plus de financer des baisses de prix offertes aux consommateurs, comme cela avait été le cas en 2017, lorsque le prix moyen du litre vendu par la SAQ avait reculé à 15,46 $.

Le «virage technologique» entamé en 2015 a aussi contribué, soulignent les chercheurs de l’étude, qui ont calculé que 16 % de l’augmentation des ventes enregistrées au cours de l’exercice 2018-2019 était attribuable au commerce en ligne. Près de 90 % des transactions en ligne seraient liées au programme «Cliquez, achetez, ramassez».

«Bref, tout indique que le virage technologique a produit les résultats escomptés», écrivent les chercheurs.

Sans formuler de recommandations définitives en ce qui a trait aux prochaines étapes à suivre pour la société d’État, M. Gagné affirme que celle-ci devra continuer à miser sur l’innovation pour améliorer ses pratiques.

«Est-ce que le modèle traditionnel est un modèle qui a de l’avenir quand on constate que dans d’autres secteurs du commerce de détail, il y a des modèles qui émergent et qui mettent même, dans certains cas, en péril les façons de faire traditionnelles?», s’est demandé l’économiste.

M. Gagné a également suggéré qu’il pourrait «peut-être aussi y avoir des gains à faire dans les entrepôts» de la SAQ grâce à la technologie.

Sous la loupe

Sans remettre en question le modèle de la SAQ, celui-ci a cependant estimé qu’il était pertinent de «surveiller de près» les entreprises en situation de monopole ou de quasi-monopole, puisque leur premier réflexe n’est pas de dégager des gains de productivité.

«Curieusement, à partir du moment où l’on commence à s’intéresser au monopole, la performance commence à s’améliorer, a expliqué M. Gagné, en faisant référence à l’étude du CPP publiée en 2016. On revient au niveau d’il y a 30 ans. Il y a probablement encore beaucoup de gains importants à réaliser.»

Cela permettrait de financer de nouvelles baisses de prix ou de bonifier le dividende versé dans les coffres de l’État, selon l’économiste.