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Meng Wanzhou comparait pour éviter son extradition

AFP|Publié le 20 janvier 2020

Elle est accusée par les autorités américaines d'avoir contourné les sanctions américaines contre l'Iran.

La première audience d’une dirigeante du géant chinois Huawei, dont l’arrestation a provoqué une grave crise entre la Chine et le Canada, a commencé lundi au tribunal de Vancouver où ses avocats ont immédiatement contesté son éventuelle extradition vers les États-Unis.

Meng Wanzhou, directrice financière de Huawei et fille de son fondateur Ren Zhengfei, est accusée par les autorités américaines de fraude et d’avoir contourné les sanctions de Washington contre l’Iran.

Dès lundi matin, les avocats de Mme Meng sont entrés dans le vif du sujet de la « double incrimination » qui dominera les débats, prévus pour durer quatre ou cinq jours : pour pouvoir être extradée aux États-Unis, Mme Meng doit y être poursuivie pour un délit également punissable au Canada.

Les avocats de la défense estiment que les faits reprochés à Mme Meng aux États-Unis n’ont pas d’équivalent au Canada, qui n’avait pas pris les mêmes sanctions contre l’Iran à l’époque des faits. 

« Serions-nous ici en l’absence de sanctions américaines ? », a demandé l’un des avocats de la défense Richard Peck, avant d’estimer : « la réponse est non ». 

« Les États-Unis ont lancé (contre Mme Meng) des allégations de fraude contre une banque. C’est un artifice », a-t-il souligné, notant qu’on demande de fait au Canada de « faire appliquer les sanctions américaines ».

L’audience à la Cour suprême de Colombie-Britannique a commencé peu après 10h00 à Vancouver sous la direction de la juge Heather Holmes, après l’arrivée de Mme Meng, tout sourire et boîtier électronique à la cheville.

« Libérez Mme Meng », « justice équitable », pouvait-on lire sur les pancartes brandies par quelques manifestants, qui ont refusé de parler à la presse. 

« Utilisée comme un pion » ?

Arrêtée le 1er décembre 2018 lors d’une escale à Vancouver, Meng Wanzhou, 47 ans, est en liberté surveillée et vit dans une luxueuse résidence lui appartenant dans la métropole pacifique canadienne.

Pour échapper à son renvoi devant la justice américaine, la dirigeante de Huawei et ses avocats doivent convaincre que les accusations — fondées sur les sanctions américaines contre Téhéran — ne seraient pas passibles de poursuites au Canada et sont essentiellement motivées par des considérations politiques.

Une ligne de défense appuyée par le ministère chinois des Affaires étrangères, qui a maintenu lundi que ce processus d’extradition était un « grave incident politique », et a exhorté Ottawa à la libérer.

Le fondateur de Huawei avait estimé dans une interview au quotidien canadien The Globe and Mail que sa fille « était utilisée comme un pion » par Washington dans son bras de fer avec le géant des télécoms. Les États-Unis soupçonnent le groupe de liens avec le gouvernement chinois et éventuellement d’espionnage.

Washington accuse Meng Wanzhou d’avoir menti à la Banque HSBC sur la relation entre Huawei et Skycom, une filiale qui vendait des équipements de télécoms à l’Iran, ce qui exposait la banque au risque de violer les sanctions américaines contre Téhéran.

L’intéressée a toujours démenti ces allégations.

La semaine d’audiences doit être consacrée à la question de la « double incrimination » : pour pouvoir être extradée aux États-Unis, Mme Meng doit y être poursuivie pour un délit également punissable au Canada.

Pour le ministère public, c’est bien le cas et cela justifie le processus d’extradition.

Arrestations arbitraires

L’arrestation de Mme Meng, lors d’une escale d’un vol de Hong Kong à Mexico, avait provoqué la colère de Pékin et aussitôt ouvert une crise diplomatique.

Quelques jours plus tard, deux Canadiens, l’ex-diplomate Michael Kovrig et l’homme d’affaires Michael Spavor, étaient arrêtés par la Chine et accusés d’espionnage. Les autorités chinoises ont ensuite gelé des milliards de dollars d’importations de produits agricoles canadiens.

Ces mesures ont généralement été considérées en Occident comme des représailles visant à pousser Ottawa à libérer Mme Meng. Les autorités canadiennes ont dénoncé des « arrestations arbitraires », assurant respecter, pour leur part, l’indépendance de la justice.

Si, lors des audiences de cette semaine, la justice canadienne décide que l’infraction qui lui est reprochée n’a pas d’équivalent au Canada, Meng Wanzhou pourrait recouvrer sa liberté rapidement. Sinon, le processus d’extradition passera à une nouvelle étape et, avec de nombreuses possibilités d’appel, pourrait durer encore plusieurs années.