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Dax Dasilva: le retour du Jedi

Denis Lalonde|Édition de la mi‑juin 2024

Dax Dasilva: le retour du Jedi

Dax Dasilva (Photo: Martin Flamand)

Dax Dasilva est de retour au poste de chef de la direction de Lightspeed (LSPD, 20,27 $), fournisseur de plateformes intégrées de points de vente et de paiements. Qu’est-ce qui l’a motivé à effectuer un retour ? Nommé à titre intérimaire le 15 février, il a été confirmé dans ses fonctions lors de la publication des résultats financiers de l’entreprise à la mi-mai. 

Quelle était votre motivation, comme ex-PDG, de revenir à la barre de l’entreprise? 

C’est une période excitante pour l’entreprise. Nous avons besoin d’un certain équilibre pour réussir la poursuite de notre phase de croissance rentable. J’ai voulu revenir pour recentrer l’entreprise sur l’efficacité opérationnelle. 

En seulement trois mois, et vous avez pu le constater dans nos résultats financiers du quatrième trimestre, Lightspeed a progressé dans cette voie. 

Cela nécessite parfois de prendre des décisions difficiles (la société a annoncé le 3 avril la suppression de 280 emplois, soit environ 10 % de sa main-d’œuvre). Toutefois, comme fondateur, c’est bien de pouvoir revenir et de changer les choses en demandant aux employés de le suivre à travers une restructuration. 

Il s’agit donc d’une décision de type «suivez le leader»? 

Oui, parce que je connais très bien l’entreprise. De plus, ayant été président du conseil pendant deux ans, je me suis éloigné de la gestion quotidienne, ce qui m’a permis d’acquérir une certaine perspective en ce qui concerne la valeur des produits que nous offrons à notre clientèle. Je peux regarder Lightspeed de l’intérieur avec un regard neuf. 

Diriez-vous que le fait d’être resté à l’écart de la gestion quotidienne de Lightspeed pendant deux ans fait de vous un meilleur dirigeant aujourd’hui? 

Oui, parce que j’ai été capable de rester connecté à l’entreprise d’un point de vue stratégique. Comme fondateur, j’étais là où je voulais être afin de continuer de guider la société, mais j’ai aussi effectué des activités de conservation environnementale à travers le monde pendant deux ans avec Age of Union, dont la mission est de protéger des espèces et des écosystèmes menacés et de financer des courts métrages et des documentaires sur l’environnement. 

Ces activités m’ont permis d’occuper mon cerveau à effectuer des tâches totalement différentes de celles que j’effectuais lorsque je dirigeais Lightspeed. Ces deux années m’ont permis de me ressourcer. 

Vous savez, j’ai dirigé Lightspeed pendant 17 ans avant de prendre un pas de recul en février 2022. Pendant ces années, on est passé d’une entreprise en démarrage à une cotation aux Bourses de Toronto et de New York, en passant par divers financements en capital de risque. Chacune des étapes comporte une énorme dose de stress et de pression. 

«Je n’ai pas quitté mon poste de PDG il y a deux ans en ayant le sentiment que j’étais proche de l’épuisement professionnel. J’ai voulu aller chercher une certaine perspective et je considère que cette expérience fait de moi un meilleur dirigeant aujourd’hui.»

En quittant l’entreprise il y a deux ans, je m’étais dit que je ne travaillerais plus jamais dans un bureau. Malgré tout, je me surprends à développer une dépendance à l’énergie qui circule à travers le bureau depuis mon retour. 

Quelle a été la réaction du personnel lorsque vous avez annoncé votre retour? 

Globalement très positive. Il y a beaucoup de nouveaux visages, et pour eux, je pense que c’est intéressant de voir le retour du fondateur. 

De revenir aux commandes et de tout de suite parler d’efficacité opérationnelle peut créer une certaine appréhension. Nous avons toutefois effectué une restructuration que je qualifierais d’« empathique ». Nous voulons qu’elle soit la plus humaine possible et qu’elle nous permette de bâtir une croissance à long terme qui bénéficiera à tout le personnel. 

Est-ce que la restructuration amorcée peu après votre retour au poste de chef de la direction est terminée? 

L’exercice se poursuit, mais ne devrait plus provoquer de pertes d’emplois. Nous avons acquis neuf entreprises depuis notre entrée en Bourse (survenue en mars 2019, NDLR). Nous allons donc analyser tous nos systèmes et nos contrats de services TI pour tenter de trouver des redondances. Il y a aussi quelques bureaux avec des baux de durées variables. 

Tout cela nécessite un peu plus de planification et nous devrions être en mesure de faire le point sur la situation lors de la journée des marchés financiers que nous tiendrons cet automne. Il y a beaucoup de travail à effectuer d’ici là. 

Cela dit, même si nous avons effectué des coupures d’effectifs en avril, cela ne nous empêche pas de toujours avoir de nombreux postes à pourvoir, entre autres du côté des ventes, du service à la clientèle et des services technologiques. 

Quelle culture d’entreprise voulez-vous bâtir? 

Alors que beaucoup de nos concurrentes ont opté pour le télétravail à temps plein, j’estime que Lightspeed possède un avantage concurrentiel en favorisant le travail en présentiel. 

Les employés ont la possibilité de faire du télétravail les lundis et les vendredis, mais nous encourageons la présence au bureau. 

Il est bien sûr possible d’innover en faisant des réunions sur Zoom ou sur d’autres plateformes du genre, mais les idées qui émergent des rencontres au bureau sont beaucoup plus efficaces. Je crois que c’est une des choses que j’apprécie le plus depuis mon retour. 

Le siège social de Montréal en est le parfait exemple, puisque c’est ici que nous comptons le plus d’employés. C’est aussi d’ici qu’émergent les meilleures idées pour continuer de faire progresser nos produits. 

Du côté du développement des produits, où concentrerez-vous votre énergie? 

Avec Lightspeed Payments, nous voulons continuer de bâtir une suite logicielle qui cible notre client au profil idéal, soit toute entreprise de taille moyenne avec un chiffre d’affaires annuel de 500 000 $ ou plus et qui a des stocks complexes à gérer dans les industries du commerce de détail, de la restauration, de l’hôtellerie et des clubs de golf. 

Nous avons fait un bon travail pour faire migrer nos clients sur la solution Lightspeed Payments, qui comptait pour 32 % de notre volume de transactions brut total au quatrième trimestre de notre exercice 2024, terminé le 31 mars. 

Notre objectif est de dépasser 40 % d’ici la fin de l’exercice 2025 et de poursuivre cette augmentation par la suite. 

Qu’en est-il de vos travaux en intelligence artificielle (IA)? 

L’IA est un match parfait pour la clientèle de Lightspeed, car elle permet d’effectuer un grand nombre de tâches répétitives. Nous avons des tonnes de données provenant de tous nos clients et nous pouvons produire de nombreux types de rapports. 

Nous intégrons déjà plusieurs fonctions d’IA à nos produits, pour entre autres permettre à notre clientèle de créer des menus, de configurer des magasins, de générer des analyses prédictives ou d’offrir des recommandations d’achats à leurs clients. 

Nous pouvons toutefois aller beaucoup plus loin et c’est pourquoi nous consacrons beaucoup d’efforts au développement de l’IA dans tous nos produits. 

Au cours des derniers mois, il était question de possiblement doter Lightspeed Payments de nouvelles fonctionnalités qui permettraient à vos clients de gérer leurs horaires et les services de la paie. Est-ce toujours le cas? 

Il n’y a rien de nouveau à annoncer en ce qui concerne l’ajout de nouveaux produits à notre plateforme. Nous avons des partenaires dont les produits sont intégrés aux nôtres pour certains composants. 

Nous ne prévoyons pas faire de grandes acquisitions à court terme. Nous pourrions décider de réaliser de petites acquisitions, mais nous n’y portons pas trop d’attention. 

Nous préférons rester concentrés sur notre stratégie de croissance rentable, alors les fusions et acquisitions ne doivent pas constituer une distraction. 

Certaines rumeurs laissent entendre que Lightspeed pourrait imiter une autre société montréalaise, Nuvei (NVEI, 44,25 $), et quitter la Bourse. Est-ce que ces rumeurs sont fondées? 

L’équipe de direction et le conseil d’administration ont un devoir de fiduciaire envers les actionnaires de toujours évaluer toutes les options qui s’offrent à l’entreprise. 

Cela dit, je continue de penser que Lightspeed peut poursuivre sa croissance tout en restant présente en Bourse.