Logo - Les Affaires
Logo - Les Affaires

Le S&P/TSX décomplexé

Dominique Beauchamp|Édition de la mi‑mars 2019

ANALYSE. L'indice composé S&P/TSX de la Bourse de Toronto est souvent l'objet de critiques du fait qu'il est ...

ANALYSE — L’indice composé S&P/TSX de la Bourse de Toronto est souvent l’objet de critiques du fait qu’il est concentré dans quelques industries comme celles des ressources et des services financiers, et qu’il est pauvre dans les secteurs vedettes.

C’est pourquoi les investisseurs se font répéter depuis des lunes qu’il leur faut diversifier leur portefeuille à l’étranger afin de pallier ces lacunes canadiennes.

À force d’entendre ce refrain, les investisseurs en sont venus à croire que la Bourse canadienne est déficiente et devrait être évitée, avance Ian de Verteuil, de Marchés mondiaux CIBC.

Le stratège tente de déboulonner certains mythes et de changer la perception des investisseurs en présentant l’indice sous un nouveau jour.

S’il reste essentiel de diversifier son portefeuille aux États-Unis pour participer aux industries phares de la technologie et de la santé, M. de Verteuil croit que le S&P/TSX n’a rien à envier aux indices d’autres marchés développés.

Pas plus vert ailleurs

Le quart de l’indice FTSE 100 britannique, par exemple, se compose de sociétés pétrolières. Trois secteurs, soit la consommation de base (16,9 %), l’énergie (22,4 %) et la finance (17,2 %), constituent 57 % de sa valeur.

«Les investisseurs ne devraient pas conclure que la meilleure stratégie de placement consiste à fuir le S&P/TSX. Investir au Japon ou en Europe parce qu’ils sont non canadiens ne garantit pas de bénéfices économiques», fait-il valoir.

Depuis 1990, le rendement annuel composé de 7,4 % (incluant les dividendes) du S&P/TSX se compare avantageusement à celui de 6,9 % de l’indice FTSE 100 ou à celui de 5,0 % de l’indice mondial MSCI sans les États-Unis. Le rendement japonais a été d’à peine 0,4 % pendant cette période.

Quatre oligopoles performants

Les Canadiens bénéficient aussi de quatre industries performantes qui sont d’aussi bons, sinon de meilleurs placements que leurs équivalents d’autres pays, soutient aussi le spécialiste.

Les banques, les sociétés de chemin de fer, les fournisseurs de télécommunications et les épiciers composent le tiers de l’indice torontois. En plus d’être élevés, leurs rendements boursiers et financiers se sont révélés moins volatils à long terme que l’indice au complet. La situation d’oligopole, dont ces entreprises profitent, en leur procurant un avantage concurrentiel, compose une partie de l’explication.

Les banques s’approprient 68 % du marché des hypothèques ; les épiciers ont 57 % du marché de l’alimentation et de la pharmacie ; les chemins de fer ont l’emprise sur 90 % du transport ferroviaire tandis que les fournisseurs de télécommunications comptent 98 % des abonnés sans fil.

Cela se reflète d’ailleurs dans les rendements élevés du capital propre des banques (15 % depuis 1990) ou le rendement sur le capital investi élevé des chemins de fer (8 % depuis 1995), précise-t-il.

Ces rendements sont supérieurs aux industries comparables du S&P 500, sauf pour les épiciers qui font moins bonne figure que leurs cousines américaines.

Le passé n’est jamais garant de l’avenir, reconnaît toutefois M. de Verteuil. Il faut se rappeler que les 25 dernières années ont vu une chute historique des taux d’intérêt, ce qui s’est révélé très favorable à la croissance des activités de prêts des banques et à la valeur des dividendes versée par les fournisseurs de services de télécommunications.

Le développement technologique, l’arrivée de nouveaux concurrents ou la déréglementation sont des risques qui pourraient éroder leur avantage compétitif, mais le stratège ne pressent pas une détérioration majeure de leur position de tête dans un avenir rapproché.

Depuis dix ans, les banques et les épiciers ont soutenu le rendement élevé de leurs capitaux propres, tandis que les chemins de fer et les fournisseurs de télécommunications ont accru les leurs.

Malgré leur performance supérieure à l’indice S&P/TSX à long terme, l’évaluation de ces secteurs ne dépasse pas les bornes non plus.

Même si la Bourse de Toronto sera toujours associée aux ressources, qui composent 29 % de l’indice, les investisseurs devraient se réjouir d’avoir accès à quatre secteurs performants, sans aller voir ailleurs, conclut-il.

Des nouveautés

L’indice S&P/TSX composé a accueilli, le 18 mars, deux nouveaux producteurs de cannabis, l’ontarienne CannTrust Holdings (TRST, 11,66 $) et la gatinoise Hexo (HEXO, 7,39 $).

Ces recrues portent à six le nombre de producteurs de marijuana dans le petit secteur de la santé de l’indice, cinq mois à peine après la légalisation du cannabis à usage récréatif au pays.

Echelon Partners estime que les six sociétés cumulent une valeur boursière de 63,4 milliards de dollars si on inclut les options, les bons de souscription, les actions spéciales et les dettes convertibles en actions qu’elles ont émis.

Ce total ressemble à la valeur boursière pleinement diluée de 65,7 G$ de la Banque de Montréal (BMO, 101,95 $)