ANALYSE. Dollarama (DOL, 35,39 $) a perdu de son lustre après trois trimestres décevants, mais le détaillant...
ANALYSE – Dollarama (DOL, 35,39 $) a perdu de son lustre après trois trimestres décevants, mais le détaillant chouchou reste premier de classe à plusieurs égards dans son industrie.
Le titre a donc gagné 1 % malgré le dévoilement d’un quatrième trimestre et d’un aperçu mitigés parce que les investisseurs affectionnent les sociétés résilientes au moment où la conjoncture économique inquiète.
Il faut dire que les investisseurs ont eu amplement le temps de s’ajuster aux perspectives plus modérées du détaillant, comme en témoigne le dégonflement spectaculaire du multiple d’évaluation de 33 à 18,7 fois les bénéfices prévus dans les 12 prochains mois, depuis janvier 2018.
«Nous reconnaissons que Dollarama n’est plus le détaillant à forte croissance qu’il était, mais l’évaluation est aussi beaucoup plus basse qu’avant», résume bien Vishal Shreedhar, de Financière Banque Nationale.
Moins cher que Metro et Loblaw
Dollarama renonce pour l’instant à dépasser les prix des articles à plus de 4$. Cela modère la croissance des ventes par magasins comparables et affaiblit un peu les marges élevées du détaillant, mais ses rendements restent en tête de son industrie.
Après avoir abaissé son cours cible à deux reprises depuis septembre de 55 $ à 46 $, Irene Nattel, de RBC Marchés des Capitaux, maintient sa recommandation d’achat. Au cours actuel, son action est moins chèrement évaluée que celle de Dollar General (DG, 119,15 $ US), dont la croissance des ventes et les marges sont inférieures, dit-elle.
Metro (MRU, 49,11 $) et Loblaw (L, 65,82 $) sont aussi plus chèrement évaluées que Dollarama en fonction de leur croissance, même si leurs marges sont presque la moitié de celles de Dollarama, ajoute l’analyste. Le titre peut s’apprécier à nouveau si le détaillant répond ou, encore mieux, dépasse les nouvelles orientations, estime Mme Nattel.
Patricia Baker, de Banque Scotia, enjoint ses clients d’être patients et d’apprécier le fait que la société prend des décisions «à long terme», pas pour mousser ses résultats à court terme.
Après tout, la marge d’exploitation de 24,8 % prévue en 2020 sera plus élevée que celle de 23,7 % en 2017, dit-elle pour mettre la performance de Dollarama en contexte. «Avec ses 1 225 magasins, ses revenus de 3,5 milliards de dollars et ses prix jusqu’à 4 $, Dollarama se bute davantage qu’avant aux autres détaillants. Il lui faut donc élever ses pratiques à l’aide d’outils analytiques afin d’optimiser la gestion de l’assortiment et des prix», affirme M. Howlett.
La stratégie multiprix de Dollarama semble avoir frappé un mur parce que ses rivaux augmentent peu le prix d’articles similaires. Par contre, l’agilité du marchand devrait lui permettre de s’adapter rapidement à cette nouvelle conjoncture, estiment la plupart des analystes.
La direction redouble d’efforts pour raffiner sa mise en marché afin de préserver sa proposition de valeur, raviver la fréquentation de ses magasins et augmenter le nombre d’articles dans le panier d’achats. À la suite de sept déclins du nombre de transactions en magasin au cours des dix derniers trimestres, un meilleur équilibre entre l’assortiment et les prix redevient la grande priorité de la direction. Les responsables des achats ont notamment reçu la consigne de remanier les achats afin d’offrir des articles de 1 $ à 1,25 $ dans chacune des catégories offertes.
Neil Rossy, le PDG, a reconnu que son équipe avait négligé cet aspect dans son zèle d’offrir de nouveaux articles aux prix supérieurs, lors de la téléconférence avec les analystes suivant les résultats du quatrième trimestre.
Dollarama entend aussi exploiter au maximum ses nouveaux outils d’analyse (un nouveau progiciel de gestion) pour améliorer l’assortiment d’articles au prix optimal, et même leur emplacement en magasin.
À plusieurs reprises, M. Rossy a évoqué son enthousiasme à l’égard de cette «occasion excitante à saisir», maintenant que les responsables des achats ont accès, depuis deux mois, à des données beaucoup plus précises sur la performance de chacun des articles en magasin.
«Nous avons plus de jus à presser du citron. Vous pourrez commencer à l’apprécier au cours des prochains trimestres», a illustré M. Rossy.
Le détaillant pourrait faire appel à l’envoi de circulaires pour mieux faire l’étalage de son offre améliorée, croit même Keith Howlett, de Desjardins Marché des capitaux.
Excursion à l’étranger l’an prochain
Tous les analystes s’attendent aussi à ce que la société exerce son option pour acquérir les 169 magasins Dollar City, en Amérique latine, en février 2020. Le détaillant ralentirait alors ses rachats d’actions afin que sa dette reste inférieure à moins de 3 fois son bénéfice d’exploitation, ajoute M. Howlett. L’analyste renouvelle sa recommandation d’achat et son cours cible de 43 $, soit 21 fois le bénéfice des quatre prochains trimestres, plus 3,50 $ pour la possibilité que Dollarama exporte son modèle à l’étranger.
Comme en témoigne le rebond de 8,8 % du titre de Dollarama depuis le début de l’année, la résilience de son modèle d’affaires regagne de la valeur aux yeux des investisseurs, qui appréhendent un ralentissement économique ou même une récession. Toutefois, son cours se collera plus que jamais à sa performance interne.
Mark Petrie, de Marchés mondiaux CIBC, exprime bien le dilemme boursier : Dollarama mérite encore une évaluation supérieure à ses semblables, mais une croissance de 10 % à 12 % du bénéfice à l’avenir ne justifie pas un multiple de plus de 20 fois. Son cours cible de 37 $ offre peu d’appréciation, d’où sa recommandation neutre.
Le cours cible moyen de 39,29 $ de 16 analystes laisse entrevoir un gain de 11,6 %.