Le Panier bleu transactionnel, encore une fausse bonne idée

Publié le 25/01/2021 à 16:21

Le Panier bleu transactionnel, encore une fausse bonne idée

Publié le 25/01/2021 à 16:21

Le gouvernement tente maintenant de rectifier le tir en nous annonçant une version transactionnelle de l’outil pour septembre prochain. Misère.(Photo: 123RF)

BLOGUE INVITÉ. Les scripteurs l’ont bien résumé lors du dernier Bye Bye: réunir des détaillants québécois dans un site web vitrine qui ne permet pas au consommateur d’acheter, c’est inutile. On a déjà Google pour ça.

Fort des critiques entièrement justifiées envers cette initiative dépassée soutenue par des fonds publics, le gouvernement tente maintenant de rectifier le tir en nous annonçant une version transactionnelle de l’outil pour septembre prochain. Misère.

Je ne peux pas croire que le gouvernement va mettre de l’argent dans une autre aventure de la sorte. C’est un ratage programmé d’avance. S’il y avait de l’argent à faire avec un Amazon made in Quebec, s’il y avait la moindre chance qu’une initiative de la sorte fonctionne, ça existerait déjà. Qui ne rêve pas de devenir riche comme Jeff Bezos? C’est bête comme ça, la beauté du capitalisme.

J’essaie de voir où est l’opportunité d’affaires derrière le Panier bleu, mais je ne trouve pas. Depuis quand l’origine du détaillant est-elle plus importante que la qualité des produits, le prix ou l’expérience client? Si l’origine du détaillant était si cruciale dans le processus d’achat, tout le monde magasinerait sur la rue Saint-Denis et les Costco seraient vides.

Et c’est précisément pour ça que le Panier bleu va faire patate, comme la plateforme de centre commercial virtuel shoooping.ca avant lui. Le fait de regrouper des milliers de détaillants connus ou inconnus dont le seul point commun est d’être québécois pour vendre des produits faits en Inde ou en Abitibi sans contrôler ni le prix, ni la logistique, ni le service, est proprement ridicule.

 

Trois clés de succès que ne possèdera jamais le Panier bleu

1. Un détaillant en ligne doit être hyper performant. C’est le modèle Amazon ou, à l’échelle locale, celui d’Altitude Sports qui livre le même jour! Qu’est-ce que le Panier bleu pourrait bien promettre en termes d’efficacité opérationnelle alors qu’il n’a aucun contrôle sur la logistique? On ne va quand même pas construire des centres de distribution bleus!

2. Un détaillant en ligne doit aussi être bien positionné pour sortir du lot. Être le spécialiste du ski ou du jardinage constitue un gros avantage en raison de l’expertise acquise, de la variété de produits offerts et des produits de niches disponibles. Le Panier bleu veut vendre de tout et de n’importe quoi. C’est de loin la pire idée possible. Si l’adresse du siège social des détaillants est la seule chose unique sur le site, on repassera pour le gros avantage compétitif.

3. Finalement, un détaillant en ligne est entièrement à la merci du jeu de la concurrence où tous les produits se comparent en deux clics. Il a donc intérêt à pouvoir exercer un contrôle sur ses prix. Est-ce que la télé faite en Chine qui sera en vente via les détaillants du Panier bleu sera moins chère que celle vendue chez Wal-Mart? On peut en douter, mais les dirigeants du Panier bleu ne pourront rien y faire de toute façon.

 

Quel avenir pour l’achat local en ligne?

Au-delà des chimères du Panier bleu, l’achat de produits locaux peut toutefois attirer le consommateur pour plusieurs raisons, dont le fait de pouvoir obtenir une meilleure qualité ou de réduire son empreinte écologique. Ce sont avant tout les marques locales (donc les manufacturiers) et non pas les détaillants locaux qui possèdent la clé du succès avec la démocratisation des outils de magasinage en ligne comme Shopify ou WooCommerce.

Si le gouvernement veut être utile, qu’il aide les entreprises à mieux s’outiller pour vendre leurs produits elles-mêmes sur le web, avant que l’effet de mode lié à la pandémie ne s’efface. Et il le fait d’ailleurs déjà, par le biais de plusieurs programmes de subventions.

Pour plusieurs commerçants, la guerre est malheureusement perdue d’avance. Que ce soit parce que leur offre est non différenciée ou parce que leurs dirigeants n’ont pas la capacité de faire face au changement. Mais encore plus cruel, parce que le marché est en train d’éliminer le besoin de passer par des intermédiaires non performants.

C’est triste, mais c’est ça. Le Panier bleu n’y changera rien… mise à part de donner l’impression aux électeurs que le gouvernement ne reste pas les bras croisés, ce qui serait pourtant la meilleure solution.

À propos de ce blogue

Stéphanie Kennan est présidente de Bang Marketing, une agence de branding et de marketing Web située à Montréal. Elle travaille auprès des PME québécoises depuis 1998 et se spécialise en marketing B2B. Stéphanie Kennan est également auteure du livre Mon site web chez le psy publié aux Éditions Transcontinental.

Stéphanie Kennan

Blogues similaires

Les salutations de Jacques Ménard... ainsi que les miennes

Édition du 30 Juin 2018 | René Vézina

CHRONIQUE. C'est vraiment la fin d'une époque chez BMO Groupe financier, Québec... et le début d'une nouvelle. ...