Reprendre des couleurs, une marquise à la fois


Édition du 21 Mai 2016

Reprendre des couleurs, une marquise à la fois


Édition du 21 Mai 2016

[Photo : Shutterstock]

La rue Saint-Hubert a longtemps été un des hauts lieux de l'activité commerciale à Montréal. Encore de nos jours, bien de futures mariées viennent y magasiner leur robe de noces. Elle fait partie du patrimoine urbain québécois. On l'a arpentée ou on s'en est fait parler même sans habiter la métropole.

Pourtant, elle a connu de meilleurs jours, comme tant d'artères de centres-villes partout au Québec. Il lui faut maintenant se réinventer pour survivre, tout comme ses commerçants.

Grâce à l'ouverture d'esprit de la mairie de l'arrondissement Rosemont-La Petite-Patrie, elle est en train de prendre des couleurs en attendant les travaux importants qui devraient la régénérer d'ici 2018 : les marchands ont désormais le droit de personnaliser la marquise (l'auvent continu qui surplombe le trottoir), en la décorant ou la peignant à leur goût. On s'apprête à lui donner un coup de jeune.

Pour Montréal, spécialiste des réglementations tatillonnes, c'est pratiquement une révolution. Qu'on ose ainsi faire preuve de flexibilité en ce qui concerne le domaine public (auquel appartient la fameuse marquise) relève quasiment de l'exploit.

C'est cependant la voie qu'a décidé de prendre le jeune maire de l'arrondissement, François William Croteau.

Il a compris que la vitalité de son coin de Montréal dépendait en bonne partie de celle des commerces de proximité, et qu'il convenait de les soutenir plutôt que de les embêter. L'exemple des mesures prises par son administration pourrait servir à bien d'autres endroits du Québec.

Qu'est-ce qui décourage les commerçants urbains ? Les taxes. Les permis. La paperasserie. Les labyrinthes administratifs. Les travaux qui n'en finissent plus. Et le sentiment qu'on se fiche de leurs problèmes, qu'on les tolère parce qu'ils engraissent les coffres municipaux jusqu'à ce qu'ils n'en puissent plus, au point d'abandonner. Cela se produit malheureusement souvent, et beaucoup de rêves virent au cauchemar du fait de la morgue bureaucratique, du genre «mais devrait-on lui faciliter la vie, lui qui vient ici pour faire de l'argent ?»

François William Croteau pense plutôt que oui. À ses yeux, on impose trop souvent aux postulants d'entrer dans une «maison de fous», comme dans Les 12 travaux d'Astérix... Il veut travailler avec les commerçants de son arrondissement pour leur faciliter la vie. Ses résidents pourront ainsi trouver près de chez eux ce dont ils ont besoin, en souhaitant que cette proximité serve d'antidote à la tentation de déménager en périphérie. Et ça doit fonctionner : l'âge moyen des citoyens de l'arrondissement est d'à peine 30 ans, une baisse marquée par rapport au début des années 2000.

Un guichet unique pour les entrepreneurs

Quelles mesures ont été mises en place par l'administration Croteau ?

Un guichet unique pour les entrepreneurs. Au lieu de courir à gauche et à droite, les entrepreneurs actuels ou en devenir font affaire avec une seule entité qui traite toutes les demandes et s'occupe de toutes les autorisations, en même temps qu'elle les informe des règlements touchant leur projet.

Également, un comptoir réservé à l'accélération des procédures. À Montréal, les délais sont souvent longs, trop longs. Par exemple, le restaurateur qui veut se doter d'une terrasse et qui recevra son permis en août, même s'il a entrepris ses démarches en avril !

«Notre objectif, dit le maire Croteau, c'est que l'entrepreneur obtienne le jour même, ou au plus tard le lendemain, le permis pour démarrer ses affaires, dès qu'il se présente à ce comptoir, sans même avoir pris rendez-vous !»

Et comme l'été s'annonce, il a été question lors de notre entretien des cafés-terrasses, un sujet sensible à Montréal même si ceux-ci font - en principe - partie de l'image de marque de la ville. Quand il fait beau, les clients aiment manger dehors. Mais encore faut-il arriver à les servir à travers le va-et-vient sur les trottoirs, sans que cet ajout coûte plus cher que ce qu'il ne rapporte.

Pour les restaurateurs, c'en est devenu kafkaïen. Règlements, normes et frais s'accumulent pour leur empoisonner la vie. Beaucoup finissent par laisser tomber.

Dans Rosemont-La Petite-Patrie, leur nombre est en hausse, et la tendance s'accentue. On en compte déjà 85, et il devrait s'en trouver 145 d'ici la fin de l'été. Pourquoi cette affluence ? Encore une fois, par ouverture d'esprit.

Les frais exigés pour la mise en place d'une terrasse ne dépendent pas de la valeur du bâtiment auquel elle est rattachée, ce qui risque d'augmenter la facture. Dans l'arrondissement, ces frais sont uniformes, quel que soit l'endroit.

Mais une terrasse sur la rue empiète sur le stationnement et réduit d'autant les revenus de parcomètres que reçoit l'organisme Stationnement de Montréal. Aucun problème, c'est l'arrondissement qui acquitte la facture, pas le commerce en question.

Impact de ces accommodements raisonnables ? Par exemple, un restaurateur comparait récemment dans La Presse + ce qu'il lui en coûtait pour deux terrasses à peu près similaires sur le Plateau Mont-Royal et dans Rosemont-La Petite-Patrie : respectivement 7 000 $ et 1 700 $.

Et pendant les belles journées d'été, les deux terrasses se remplissent. Si vous aviez à choisir, où investiriez-vous ?

Cette histoire aurait intérêt à se répercuter partout au Québec, où on fait trop souvent la vie dure aux commerçants et aux entrepreneurs.

De mon blogue

Infrastructures

Cette fois, Québec et Ottawa doivent s'entendre au plus vite

Comme le rappelait le ministre fédéral des Finances, Bill Morneau, invité d'honneur des assises de l'Union des municipalités du Québec, le plan du gouvernement Trudeau est d'investir 11,9 milliards de dollars dans les infrastructures au cours des cinq prochaines années. En attendant, les élus municipaux piaffent ; de là l'urgence d'une entente entre Québec et Ottawa pour qu'au moins les fonds disponibles soient débloqués. Mais sans le dire ouvertement, le fédéral pourrait fort bien vouloir orienter les choix. Ce qui amènerait alors le Québec à se rebiffer, à rappeler que les affaires municipales sont de compétences provinciales et qu'Ottawa n'a pas un mot à dire, même s'il signe les chèques.

À la une

Les proches aidants, l’angle mort de l’équilibre travail-famille

Mis à jour il y a 26 minutes | Catherine Charron

RHÉVEIL-MATIN. Les employeurs semblent mal comprendre leur réalité.

Bourse: la Banque Royale fait trembler le marché des actions privilégiées

BALADO. La Banque Royale envoie un signal clair qu'elle pourrait racheter toutes ses actions privilégiées.

Explosions en Iran: un ministre israélien critiqué pour avoir incriminé Israël

06:18 | AFP

Ni l'armée ni le gouvernement n'avait commenté à la mi-journée les explosions rapportées en Iran et attribuées à Israël.